Révolution blockchain: Et si les monnaies virtuelles n’achetaient pas que du vent?
DEVISE•L'exposition AYM vend ses oeuvres en ethers...Laure Beaudonnet
L'essentiel
- Une galerie d’art propose d’acheter des œuvres en ether, une monnaie virtuelle
- Ce type d’échanges est rendu possibles grâce au système de blockchains
- De plus en plus de magasins proposent de payer en bitcoin ou autres monnaies virtuelles
La prochaine fois qu’on vous parle de l’Ether, n’évoquez pas le liquide qui sent mauvais dans votre armoire à pharmacie, ça ferait mauvais genre. On a toutes les raisons de penser qu’il sera plutôt question de la monnaie virtuelle que le Web commence à s’arracher. Si tout le monde a déjà entendu parler du Bitcoin, l’Ether, crypto-monnaie lancée en 2015, est une challengeuse moins connue. Elle a décroché la deuxième place des devises les plus échangées du marché, elle trouve même un écho dans le milieu artistique.
Pendant le vernissage de l’exposition AYM, art de la génération Y, jeudi 27 avril, les amateurs d’art feront flamber des liasses d’ethers pour acheter les œuvres et, alors que le livre Big Bang Blockchain, la seconde révolution d’Internet de Stéphane Loignon (Editions Tallandier) vient de paraître, regardons de plus près ces monnaies un peu curieuses et ultra-volatiles qui pourraient bientôt se retrouver dans nos poches virtuelles pour acheter une baguette de pain.
Bitcoin, Ether… Il y en a combien comme ça ?
On a tous entendu parler du bitcoin, la plus ancienne monnaie virtuelle, et pas toujours pour les meilleures raisons. On connaît moins l’Ether, Monero ou ZCash, et il en existe plus de 700 dans le genre (796 selon Coinmarketcap). Si la plupart n’ont pas beaucoup de valeur, les 30 premières dépassent le dollar à l’unité. « Chacune correspond à une blockchain [une base de données distribuées transparente, sécurisée et sans structure intermédiaire] et elles ont toutes des fonctions spécifiques », note Stéphane Loignon. Elles se sont inspirées de leur aîné le bitcoin, la blockchain la plus ancienne. L’Ether, par exemple, repose sur le P2P (peer to peer) et les transactions sont validées par la preuve de travail. « Chaque bloc est validé, au fur et à mesure, par un système cryptographique complexe », explique Stéphane Loison dans Big Bang Blockchain. En gros : les ordinateurs du réseau sont mis en compétition et le premier qui valide le calcul approuve la transaction. Le reste du réseau l’examine à nouveau avant de l’archiver. L’opération étant répétée à chaque bloc de transactions traité, chaque ordinateur héberge un exemplaire de la blockchain. La preuve est démultipliée.
A quand les courses au supermarché avec les crypto-monnaies ?
Des œuvres d’art et pourquoi pas une bonne pinte de bière ou une pizza ? De plus en plus de sites Internet (Showroomprive, Expedia…) mais aussi de lieux physiques acceptent la monnaie virtuelle. A Paris, le passage du grand-cerf est surnommé « bitcoin boulevard » et le Sof’s bar dans le 2e arrondissement vend une mousse pour une poignée de « coins ». « A l’étranger, c’est très utile si on veut éviter les frais et les commissions, on peut faire des transactions en dehors du système bancaire et beaucoup de Chinois s’y sont mis », souligne Stéphane Loignon. Seul hic : trouver les bons spots. Et pour ça, coinmap peut vous servir, le site géolocalise les lieux qui acceptent les monnaies virtuelles.
On est plutôt team bitcoin ou team ether ?
Ça dépend un peu de ce que vous voulez en faire. Pour le quotidien -resto, bar, achats en ligne-, le bitcoin est plus adapté que sa concurrente. L’Ether, dont le langage informatique est un peu plus élaboré, a d’autres atouts. La blockchain Ethereum permet de mettre en place des « smart contracts » entre deux objets connectés, par exemple. Dans le futur, on pourrait imaginer un lave-linge qui commanderait sa propre lessive. On y est presque. A Brooklyn, il existe une smart grid -un réseau de distribution électrique intelligent- qui utilise la blockchain Ethereum pour revendre le surplus d’électricité. Les toits de cinq habitations sont équipés de panneaux solaires -les résidents n’ont plus besoin de s’approvisionner sur le réseau national- et le système fonctionne grâce à la blockchain. Là, on nous parle.
C’est joli tout ça, mais je la trouve où cette monnaie ?
En ligne, inévitablement. Le mieux c’est de créer un petit porte-monnaie virtuel. L’appli paymium par exemple permet de payer en bitcoin avec un code-barres dans les commerces. Pour l’Ether, on peut ouvrir un compte assez facilement sur myetherwallet ou Ethereum-Mist Wallet (un peu plus compliqué à utiliser). Pour acheter des œuvres à l’expo AYM ce jeudi, il faudra ouvrir un compte avant de venir. Mais, rien n’est perdu pour les têtes en l’air qui n’auraient pas prévu d’ethers sur eux. Le vernissage prévoit un comptoir pour les aider. On est sauvés.
Et c’est risqué ce truc ?
Ces monnaies sont ultra volatiles, leur cours fluctue en permanence. Un bitcoin valait 777 euros le 14 janvier 2017, et 1133 euros le 20 avril. Il peut perdre 20 % dans la journée, mais sur le long terme, il est plutôt en augmentation. « Certains pensent qu’il vaut mieux épargner et attendre que ça prenne de la valeur », sourit Stéphane Loignon. Contrairement à l’image un peu négative que se traînent le bitcoin, sa blockchain n’a pas beaucoup de faille, elle est difficile à pirater, mais, comme toutes les stars, elle est un peu victime de son succès. Chaque bloc peut traiter environ 2.000 transactions et quand elle est surchargée, elle peut mettre beaucoup de temps à valider l’opération. Et attendre 45 minutes au comptoir pour payer sa conso, ça peut vite agacer…