PHILANTHROPIEBonnes causes: Liker ne suffit pas!

Bonnes causes: Liker ne suffit pas!

PHILANTHROPIELes défis comme l'Ice Bucket Challenge ou #WakeUpCall ne sont-ils pas de simples coups d’épée dans l’eau?...
Un Ice Bucket Challenge à Washington le 27 septembre 2014.
Un Ice Bucket Challenge à Washington le 27 septembre 2014. - GREG LEHMAN/AP/SIPA
Anne Demoulin

Anne Demoulin

A vot'bon cœur m'sieurs dames! D’Octobre rose à Movember en passant par le Téléthon, la saison des dons a commencé. Après le Ice Bucket Challenge, qui a permis la levée de plus de 100 millions de dollars contre la maladie de Charcot, le #WakeUpCall, qui consiste à se prendre en photo le matin au réveil, lancé par l'Unicef pour aider les enfants syriens, vient de débarquer sur les réseaux sociaux. Ces défis ont-ils changé la face de la philanthropie ou s’agit-il de simples coups d’épée dans l’eau?

«L’Ice Bucket Challenge est à la philanthropie ce que Gangnam Style est à la musique, un OVNI», lance Eric Dutertre, président de l’agence conseil Excel, spécialisée dans les campagnes de levée de fonds. La force propagatrice du défi a «sidéré les associations qui admiraient son impact médiatique», poursuit l’expert.

La recette d’un phénomène viral

Pour le journaliste américain Timothy Stenovec, la recette du succès repose sur les ingrédients suivants: «Une part de défi, une part de charité, saupoudrer avec des célébrités et faire cuire avec Facebook [car] bien sûr, il y a le fait de se montrer

«L’Ice Bucket Challenge repose sur un story telling très simple, des porte-paroles décisifs, comme les grands patrons qui ont décomplexé les plus hésitants, et une diffusion adroite, avec le système de nomination de personnes que l’on connaît», énumère encore Eric Dutrertre. .» Le #WakeUpCall applique la même recette.

Des succès, bien exploité par les réseaux sociaux. «Mark Zuckerberg a vite compris son intérêt de se jeter à l’eau», note Eric Dutrertre.

Les réseaux sociaux utiles en cas d’urgence

«Les réseaux sociaux ont changé la vitesse à laquelle un message se répand, si ce message vaut la peine d’être partagé», estime Mark Leruste, country manager France de Movember. «Ils sont très utiles en cas de catastrophes comme le Tsunami de 2004», concède Eric Dutertre.

Mais aussi pour faire du lobbying. La campagne Génération Nutrition demande aux internautes de poster sur les réseaux sociaux une photo avec un clap et le hashtag #ClapDeFaim pour demander au gouvernement français de s’engager davantage dans la lutte contre la faim.

Les associations s’interrogent beaucoup sur la façon d’aborder des sujets sérieux via les réseaux sociaux. «En France, Bloom, qui œuvre pour la conservation marine, a rassemblé 800.000 signatures en trois semaines, grâce à une mise en dessin de Pénélope Bagieu, contre 25.000 en quatre ans avec la même pétition sous forme de texte», se rappelle Eric Dutertre.

Etre fun tout en parlant de sujets graves

Avec ses moustaches pour changer le visage de la santé masculine, Movember a réussi mener une campagne fun autour d’un sujet grave. «Les réseaux sociaux permettent de communiquer directement avec notre communauté», se réjouit Mark Leruste. Depuis 2003, cette communauté a rassemblé plus de 4 millions de participants dans 21 pays, et récolté 409 millions d’euros. En 2013, pour la seconde édition de Movember en France, les 13.700 participants ont réuni plus de 350.000 euros.

Après la déferlante de seaux glacés, des photos d’hommes s’agrippant les testicules avec le hashtag #FeelingNuts (contre le cancer des testicules) sont apparues sur Twitter et Facebook. «La tentation de la réédition est naturellement grande», reconnaît Eric Dutertre.

De bon goût ou de mauvais goût, le vrai défi est de transformer ces phénomènes viraux en financement et adhésion durable. Ces défis font beaucoup de bruit, mais nombreux sont ceux qui négligent la dimension collecte. «En 2013, le digital représentait seulement 6,4% des dons aux Etats-Unis!», rappelle l’expert.

Plus on vieillit, plus on donne et ce sont les seniors la cible des associations. «Les jeunes séniors se digitalisent rapidement et massivement, les associations collectent les fichiers d’e-donateurs, utilisent l’e-mailing, le crowdfunding», s’interroge Eric Dutertre. Bref, les slacktivistes (littéralement «activistes paresseux») ne les intéressent pas. Les likes ne valent pas tout l’or des dons.

Movember pour le nuls

Contraction de «Mo», moustache en Australie et « November » signifiant «Novembre », Movember invite dès le 1er octobre les hommes (Mo Bros), soutenus par les femmes de leur entourage (Mo Sistas) à s’inscrire sur Movember.com. Le 1er novembre, après un rasage de près, les Mo Bros se font pousser la moustache durant 30 jours. Durant cette période, seul ou en équipe, les Mo Bros exhibent leur création pileuse sur les réseaux sociaux pour sensibiliser l’opinion à la santé masculine. Au travers les réseaux sociaux et une pléiade d’événements funs et décalés, ils récoltent des dons via leur Mo Space dédié Movember.com.