Canal du Midi : la simplicité heureuse des marins d’eau douce
Tourisme fluvial•À bord d’une pénichette sans permis, la navigation sur le plus célèbre canal de France traverse le Midi au ralenti, loin des foules estivalesJean-Claude Urbain pour 20 Minutes
Un court briefing sur les règles de navigation, une initiation éclair aux manœuvres de l’engin, et l’aventure en pénichette peut déjà commencer ! Aucune compétence particulière n’est requise à bord, si ce n’est un minimum d’agilité pour larguer les amarres. Accessible au plus grand nombre, ce mode alternatif de transport se prête idéalement aux vacances en couple, en famille ou entre amis, à la découverte estivale des canaux de France. Il a d’ailleurs permis de sauver le plus emblématique d’entre eux : le canal du Midi.
Classé au Patrimoine mondial de l’Humanité par l’Unesco, celui qu’on appelait jadis « canal royal de Languedoc » a fonctionné sans interruption depuis sa mise en eau, en 1681 ! Jusqu’au milieu du XIXe siècle, 250 barques halées par des chevaux y transportaient fret et passagers.
Les péniches à moteur prirent le relais au début du XXe. Mais la concurrence du rail sonna le glas de ce trafic devenu trop lent. Menacé d’abandon à la fin des années 1980, le canal du Midi doit son salut au tourisme fluvial dont la principale vertu est, paradoxalement, la lenteur.
Pionnier des séjours en bateau sans permis, Locaboat Holidays est un acteur incontournable sur ce chef d’œuvre du génie civil français. Ses différentes bases d’Argens-Minervois, Bram et Négra permettent de choisir sa portion d’itinéraire et son type d’embarcation, en fonction de ses envies. Le voyage en pénichette à travers l’Occitanie rurale convient, en effet, aussi bien aux actifs à la recherche de nouvelles aventures qu’aux contemplatifs en quête de sérénité.
Le plus grand chantier du XVIIe siècle
Relier la mer Méditerranée à l’océan Atlantique pour éviter aux bateaux de marchandises le périlleux voyage autour de la péninsule ibérique fut un projet esquissé par les Romains dès l’Antiquité. L’Aude et la Garonne semblaient alors proposer une voie d’eau navigable à travers le Midi. Mais sous le règne de François Ier, l’idée se heurtait encore au problème de la jonction entre les deux fleuves.
La solution ne fut pas trouvée par un architecte ni par un ingénieur, mais par un collecteur d’impôts de Béziers nommé Pierre-Paul Riquet. Ce dernier persuada Louis XIV qu’on pouvait alimenter un canal entre l’étang de Thau et la Garonne, de Marseillan à Toulouse, en dérivant plusieurs ruisseaux de la Montagne Noire.
Le canal du Midi compte, avec le château de Versailles, parmi les plus prestigieuses réalisations du Roi Soleil. Lancé en 1667 et achevé quatorze ans plus tard avec l’aide de Vauban, ce chantier souleva d’innombrables difficultés techniques, toutes surmontées à grand renfort d’ouvrages d’art.
Sur les 240 kilomètres du canal, on recense ainsi quelque 63 écluses, 142 ponts et 67 aqueducs. La section qui longe l’Aude, entre Béziers et Carcassonne, en livre à elle seule de magnifiques exemples, comme l’escalier d’écluses de Fonserannes, le tunnel du Malpas, le pont-canal de Répudre ou le déversoir d’Argent Double.
Un maître-mot à bord : liberté
Au départ d’Argens-Minervois, ces prouesses techniques se découvrent au fil d’une navigation propice à la déconnection. Entre champs de vignes, villages médiévaux et guinguettes ombragées, le paysage gorgé de soleil défile au son des cigales. La vitesse maximale autorisée sur le canal est limitée à 8 km/h pour protéger ses berges des mouvements de l’eau.
L’exercice quotidien de l’éclusage exige, lui aussi, un peu de patience. Il faut compter un quart d’heure pour le passage d’une écluse simple. Mais la plupart sont doubles, voire triples, et leur accès peut être encore ralenti par l’affluence. On peut ainsi se retrouver jusqu’à quatre bateaux collés-serrés dans ces bassins de forme ovoïde, d’où se dégage une rafraîchissante convivialité.
Assez d’écluses pour la journée ? Le programme de la croisière s’invente heure après heure. Arrêt dans un port aménagé pour faire quelques emplettes, amarrage en pleine nature pour une sieste ou une balade à vélo... Le plus difficile reste de trouver un peu d’ombre !
Omniprésents le long des berges dès le début du XIXe siècle, les platanes ont longtemps fait la beauté du canal. Ces arbres massifs offraient plusieurs avantages : leurs branches formaient un tunnel d’ombre limitant l’évaporation, leurs feuilles mortes étanchéifiaient le fond et leurs racines stabilisaient les berges. Mais à partir de 2006, le chancre coloré, un champignon fatal et très contagieux, les décima en quelques années.
Au total, 29.000 platanes ont été arrachés. Leur remplacement par de nouvelles essences comme le micocoulier, le peuplier, le chêne, le tilleul ou le frêne est un travail de longue haleine. Depuis 2011, 16.700 ont été replantés. Engagé dans une démarche environnementale responsable, Locaboat Holidays est un partenaire de la première heure pour la Mission mécénat canal du Midi qui collecte les fonds nécessaires à ce programme. Chiffré à 200 millions d’euros, il durera 20 ans.