Grand NordIslande, le spectacle du feu et de la glace

Volcans et glaciers d’Islande racontent la grande saga des origines

Grand NordChamps de lave, sources chaudes, cascades tumultueuses, lagunes glaciaires… Toutes les splendeurs naturelles de l’Islande s’égrènent dans le sud du pays, au fil de la route 1
Jean-Claude Urbain pour 20 Minutes

Jean-Claude Urbain pour 20 Minutes

Aurore ou crépuscule ? Difficile à dire. De novembre à février, le soleil n’indique plus vraiment les heures aux abords du cercle polaire arctique. Une clarté hésitante traîne alors sur les paysages dantesques de l’Islande. Ce n’est pas par hasard que le cinéaste Terrence Malik a choisi ce pays pour mettre en images le mystère des origines dans son documentaire Voyage of Time. En effet, cette île de l’Atlantique Nord est une des plus jeunes terres émergées du globe.

Le cap Dyrholaey est le point le plus méridional de l'Islande.
Le cap Dyrholaey est le point le plus méridional de l'Islande.  - Jean-Claude Urbain

Grande comme un cinquième de la France, elle compte quelque 130 volcans qui répandent à eux seuls un tiers de tout le magma émis sur la planète ! Cette hyperactivité est liée à la position de l’île, à cheval sur deux plaques continentales qui fissurent la croûte terrestre en s’écartant de deux centimètres par an. L’Islande ne cesse donc de grandir, de gagner du terrain.

Façonnés par les éruptions et les débâcles glaciaires qu’elles génèrent, les panoramas du pays sont le théâtre d’histoires extravagantes. Bien avant la rédaction des sagas médiévales, l’environnement inquiétant de cette Terra Borealis suggéra aux Vikings venus de Norvège l’existence d’un peuple caché : le « Huldufólk ».

Utiliser un site naturel dans une ?uvre artistique peut lui porter préjudice. Les gorges de Fjadrargljufur, filmées dans un clip de Justin Bieber, ont ainsi souffert de l?affluence des fans.
Utiliser un site naturel dans une ?uvre artistique peut lui porter préjudice. Les gorges de Fjadrargljufur, filmées dans un clip de Justin Bieber, ont ainsi souffert de l?affluence des fans. - Jean-Claude Urbain

Les légendes racontent que ces esprits de la nature se concentrent sur le littoral méridional de l’île, où les chaos volcaniques leur offrent de confortables tanières. Ici, des rochers moussus abritent des elfes bienveillants. Là, des pics aux formes tourmentées sont des trolls pétrifiés par la lumière du jour. On peut apercevoir ces derniers en voyageant sur la route 1 qui fait le tour de l’Islande. Lorsqu’on interroge les habitants de Selfoss ou de Höfn à ce sujet, peu avouent y croire. Mais on ne sait jamais… Ainsi, on ne compte plus le nombre de chantiers interrompus ou de routes déviées pour épargner l’abri d’un elfe.

Chefs-d’œuvre du Sud

Entre chaque éruption d’un volcan au nom imprononçable, le paysage hyperboréen de l’Islande ne se prête pas qu’aux fables poétiques. Il invite surtout à la contemplation. Dans le sud du pays, d’impressionnants tableaux composés par la nature sont exposés en bord de route et n’exigent aucun effort pour être admirés. Il n’est pas de vert plus intense que l’herbe qui tapisse les gorges de Fjaðrárgljúfur, pas de noir plus profond que les plages du cap Dyrhólaey, ni de rouge plus puissant que la lave en fusion, que l’on peut observer de près, en toute sécurité, lors de démonstrations uniques au monde réalisées à Vík.

Impossible de dénombrer les cascades d'Islande ! Dans le Sud, Seljalandsfoss est une des plus accessibles.
Impossible de dénombrer les cascades d'Islande ! Dans le Sud, Seljalandsfoss est une des plus accessibles. - Jean-Claude Urbain

Seul le tumulte des cascades interrompt brièvement la sérénité du voyage. Mais les cassures du paysage qui précipitent les rivières entre les parois basaltiques sont autant de visions féeriques. Au moindre rayon de soleil, les chutes Seljalandsfoss et Skógafoss gratifient leurs visiteurs d’un arc-en-ciel, comme pour s’excuser du vacarme.

Retour au calme, face à une autre merveille de la nature. Sur les eaux opalines du lagon Jökulsárlón, les parois azurées d’icebergs paresseux scintillent sous un soleil pâle, suspendu à l’horizon. Un véritable paysage polaire, photogénique à souhait, avec, en toile de fond, la calotte virginale du Vatnajökull. Aussi étendu que la Corse, il s’agit du plus grand glacier d’Europe. Mais comme ses cousins du continent, il recule à un rythme inquiétant.

Les icebergs vêlés par le glacier Breidamerkurjökull composent un paysage polaire dans la lagune de Jökulsárlón.
Les icebergs vêlés par le glacier Breidamerkurjökull composent un paysage polaire dans la lagune de Jökulsárlón. - Jean-Claude Urbain

Dans ses entrailles, des rivières de fonte finissent par creuser des galeries qui s’illuminent à l’approche de la surface. Ces cavités éphémères ne figurent pas sur les cartes. Elles peuvent tout de même se visiter grâce à des compagnies qui en régulent la fréquentation. 500 personnes par jour tout de même… Qu’importe ! Quelques pas sous ces voûtes de glaces étincelantes suffisent à se rassasier de beauté.

Le grand frisson boréal

Une fournaise hante les profondeurs de ces splendeurs islandaises. Le magma qui mijote dans leurs tréfonds surchauffe des eaux qui finissent par s’échapper en nuées fantasmagoriques appelées fumerolles. La géothermie est un autre aspect du volcanisme islandais. Cette énergie naturelle est particulièrement bien exploitée dans les serres à fleurs et à légumes de Hveragerði. On fait même pousser des bananiers sous ces tropiques arctiques !

La tomate est reine sur la carte du restaurant installé dans les serres Fridheimar.
La tomate est reine sur la carte du restaurant installé dans les serres Fridheimar. - Jean-Claude Urbain

Sur la grève du lac Laugarvatn, l’eau qui bouillonne à cinquante centimètres de la surface sert depuis des générations à la cuisson des aliments. Aujourd’hui, le site reste non seulement utilisé pour faire lever de savoureux pains de seigle, mais il est également prisé des hédonistes qui viennent se prélasser dans les piscines délicieusement chaudes du complexe Fontana.

Il n’y a pas plus islandais que ce rituel du bain en plein air. Chaque localité possède sa piscine où l’on va comme au café, pour se rencontrer, discuter, trinquer et, accessoirement, nager. À la tombée de la nuit, on se donne rendez-vous dans ces bains extérieurs pour admirer le phénomène le plus spectaculaire de ces hautes latitudes. Quel plaisir d’assister au ballet céleste des aurores boréales, confortablement plongé dans les vapeurs fumantes !

Aurores boréales et cascades vertigineuses : toute la magie de l?Islande !
Aurores boréales et cascades vertigineuses : toute la magie de l?Islande ! - Thorir N. Kjartansson

Difficiles à prévoir, ces lueurs chimériques, le plus souvent verdâtres, apparaissent lorsque des particules solaires s’électro-magnétisent au contact de la haute atmosphère. Pour les voir, il faut que le ciel soit dégagé, de préférence sans lune, et dépourvu de lumières parasites. Depuis leurs cachettes, les elfes et les trolls doivent eux aussi guetter leur apparition. Les sagas racontent qu’elles indiqueraient le chemin du Valhalla, le domaine des dieux vikings.

Y aller

Tout au long de l’année, la compagnie aérienne Icelandair dessert quotidiennement l’aéroport islandais de Keflavík au départ de Paris. Chaque période a ses avantages. En hiver, le pays vit au ralenti. Les visiteurs sont moins nombreux et c’est le meilleur moment pour observer les aurores boréales.

Pour s’y rendre, il est actuellement obligatoire de présenter un certificat de vaccination contre la Covid-19 ainsi qu’un test négatif, PCR ou antigénique, de moins de 72 heures. Un formulaire doit également être renseigné en ligne pour obtenir un code barre à présenter avant le départ.

Se loger

Porte d’entrée du Sud islandais, idéalement située entre la capitale Reykjavík et la zone touristique du « Golden Circle », la petite localité horticole et bohème de Hveragerði possède un excellent parc hôtelier. Doté de grandes piscines extérieures, l’hôtel Ork est notamment apprécié pour la qualité de son restaurant Hver. Au centre du village, The Greenhouse est une toute nouvelle adresse, liée à un projet ambitieux de développement durable de l’offre touristique locale (centre de séminaires, glamping, tyrolienne, etc.). Soucieux de son impact sur l’environnement, l’établissement est décoré de mobilier recyclé et d’œuvres d’artistes locaux. Pour limiter l’usage du plastique, ses chambres ne sont pas verrouillées par des cartes, mais par des codes que l’on peut obtenir en ligne, sans passer par la réception. Séjourner ici donne enfin accès à de nombreux services : piscine municipale, spa, golf et vélos électriques pour rejoindre le site géothermique de Reykjadalur.

Deux autres adresses confortables et élégantes pour partir à la découverte du Sud : l’hôtel UMI et le Fosshotel Glacier Lagoon. Tous les deux isolés en bord de route 1, ils se prêtent très bien à l’observation des aurores boréales. Pour ne pas attendre en vain leur apparition, il suffit de s’inscrire sur une liste d’appel à la réception.

Se restaurer

Récemment rénové dans un style traditionnel et coloré, le centre de Selfoss invite à faire une pause gourmande sur la route 1. Installée dans une ancienne laiterie, sa halle gastronomique aux nombreux bars et restaurants abrite aussi une exposition permanente dédiée au Skyr. L’occasion d’en apprendre davantage sur ce yaourt islandais crémeux, très faible en matière grasse, et déjà consommé il y a 1.000 ans par les Vikings.

Dans toute la région Sud-Ouest, de très nombreuses serres agricoles utilisent la géothermie et la lumière artificielle pour produire fruits et légumes 365 jours par an. Ouvertes au public, celles de Friðheimar sont spécialisées dans la culture des tomates. On en récolte ici près de deux tonnes par jour ! De la soupe au dessert en passant par la bière, la tomate est donc la star du restaurant installé sous la serre, face aux rangées.

À voir

Des conditions de vie très difficiles jusqu’au milieu du XXe siècle n’ont pas favorisé le patrimoine historique de l’Islande. Mais proximité de Selfoss, les caves de Hella comptent parmi les rares sites archéologiques permettant d’imaginer le quotidien des premiers colons. Les douze grottes creusées dans le sous-sol de cette localité sont, en effet, les plus anciens témoignages du peuplement de l’île. Certaines, portant des inscriptions runiques, seraient même antérieures à l’arrivée des Vikings. À la lueur des lampes-torches, une visite chargée de mystères !

Renseignements

Transports, hébergements, activités, empreinte carbone… toutes les infos utiles pour préparer son voyage dans le sud de l’Islande sont compilées sur les sites officiels Visit Iceland et Visit South Iceland.