Chypre, l’autre île de beauté
Méditerranée•Aphrodite, la déesse grecque de l’amour et de la beauté, semble avoir répandu sa grâce sur chaque recoin de son île natale. Un trésor méditerranéen, à cheval entre l’Orient et l’OccidentJean-Claude Urbain pour 20 Minutes
À la croisée de l’Europe, de l’Asie et de l’Afrique, Chypre est la troisième plus grande île de Méditerranée. Une position stratégique qui explique son histoire mouvementée. Mycéniens, Phéniciens, Égyptiens, Perses, Romains, Francs, Vénitiens, Ottomans et Britanniques l’ont tour à tour convoitée. Aujourd’hui encore, le Nord du pays est occupé par la Turquie, faisant de Nicosie l’ultime capitale divisée d’Occident. Mais en dépit des influences successives, Chypre n’a jamais renié son identité grecque, fondée sur la mythologie.
C’est en effet dans l’écume de ses flots que serait apparue Aphrodite, la déesse antique de l’amour et de la beauté. Selon la légende, le lieu exact de cette naissance serait Petra tou Romiou, le « Rocher du Grec » posé sur un élégant littoral de calcaire blond. À proximité, Palaepaphos fut l’un des plus célèbres centres de pèlerinage du monde hellénique. On peut aujourd’hui y arpenter les ruines du sanctuaire d’Aphrodite dont les plus vieilles pierres datent du XIIe siècle avant J.-C.
Pour les férus d’archéologie, Chypre est un musée à ciel ouvert. Depuis la ville de Limassol, les sites s’égrènent le long de la côte sud jusqu’à Paphos. Inscrits au patrimoine mondial de l’Unesco, les vestiges de cette localité témoignent d’une vaste période, étalée de la Préhistoire au Moyen Âge. Joyaux du site, les sols en mosaïques des quatre villas romaines dites de Dionysos, de Thésée, d’Aeon et d’Orphée sont considérés comme les plus beaux de Méditerranée.
Incontournable, le site de Kourion possède lui aussi de magnifiques mosaïques. Mais cette importante « cité-royaume » est surtout connue pour son théâtre gréco-romain daté du IIe siècle avant J.-C. Au crépuscule, le spectacle qu’offre cette scène ouverte sur la mer permet de ressentir l’émoi des hommes qui décidèrent de célébrer ici le culte de la beauté.
Le temps suspendu
Les routes pittoresques qui éloignent les visiteurs des vestiges antiques de Chypre grimpent vers les montagnes du Troodos, à la rencontre d’un patrimoine plus récent, hérité du Christianisme. Culminant à près de 2.000 mètres, ce massif couvert de pins est le poumon verdoyant de l’île. Ses flancs constellés de petits villages aux rues pavées accueillent les skieurs durant l’hiver et les amateurs de grand air le reste de l’année.
De nombreuses églises et monastères byzantins sont blottis entre les vignobles et les vergers du Troodos. Protégés des incursions hostiles, ces édifices religieux sont restés intacts et sont toujours nimbés d’une puissante spiritualité. Leurs lourdes portes de bois s’ouvrent sur d’impressionnantes fresques murales décrivant en scènes multicolores certains passages de la Bible.
Parmi la dizaine de sites inscrits ici au patrimoine mondial, le monastère de Kykkos est remarquable pour son icône de la Vierge Marie. L’œuvre miraculeuse aurait été peinte par Saint-Luc en personne. Protégée sous une chape d’argent, elle trône devant une fastueuse cloison (iconostase) aux ors éblouissants. Prisé pour les vertus curatives de ses sources d’eau soufrée, le village de Kalopanagiotis abrite, quant à lui, l’église d’Agios Ioannis Lampadistis dont les fresques datées des XIIIe et XVIe siècles recouvrent toutes les surfaces, des coupoles aux piliers.
Mais Chypre n’est pas seulement tournée vers son glorieux passé. Dans les cafés tumultueux de chaque village, les bruyantes parties de backgammon se disputent dans les volutes des narguilés. Et s’il est une ville, sur l’île, synonyme de modernité, c’est bien Limassol. Cosmopolite, cette cité côtière est animée de tavernes, de galeries et de boutiques. Ultra-branchée, sa nouvelle marina est le point de départ idéal pour se lancer à la découverte du pays.