Pour les vacances, l’astro-tourisme surgit de la nuit
UN PEU PLUS PRES DES ETOILES•La «propreté» du ciel de certaines régions françaises (Morvan, Cévennes…) devient un atout pour attirer des visiteurs désireux de contempler les étoiles sans pollution lumineuseCamille Langlade
L'essentiel
- Et pourquoi ne pas choisir sa destination de vacances en fonction de la «propreté» du ciel?
- Regarder le ciel étoilé et profiter de l’absence de pollution lumineuse devient une activité touristique.
- Certaines régions misent sur l’astro-tourisme pour attirer les visiteurs désireux de fuir lampadaires, phares et autres LED.
Vers l’infini, et la campagne. Il y a 50 ans, Neil Armstrong allait sur la Lune pour en admirer les cratères. En 2019, les touristes français ont la même vue depuis le Morvan. Et ils sont toujours plus nombreux à avoir la tête dans les étoiles. Ce que les professionnels du tourisme ont bien compris.
Certains acteurs publics comme privés misent sur un ciel « propre » pour attirer amoureux du cosmos et citadins en manque de nature. « Beaucoup de régions ont compris que le tourisme se faisait aussi la nuit », analyse Christophe Lehénaff. Cet astronome amateur est l’auteur d’Astro-tourisme en France et dans le monde 2018, le premier guide thématique sur le sujet du Petit Futé. Preuve du pouvoir d’attraction des étoles, notamment dans les parcs nationaux.
Deux réserves de ciel étoilé en France
« Le Morvan est un territoire peu habité avec un ciel d’une grande pureté », décrit Jean-Philippe Caumont, le directeur du parc naturel régional éponyme, candidat à la Rice (réserve internationale de ciel étoilé), un label délivré par l’association américaine International dark sky association et qui récompense les ciels les plus noirs (purs) du monde. En France, seuls le Parc national des Cévennes et le Pic du midi de Bigorre sont classés Rice.
En partenariat avec la société d’astronomie de Bourgogne, le parc organise chaque semaine des animations autour de l’astronomie, mais aussi de la faune et la flore nocturne locale. Car l’astro-tourisme revêt également un enjeu environnemental. « Réduire les pollutions lumineuses permet aussi de préserver la biodiversité », ajoute le directeur. Ces instants à ciel ouvert sont plébiscités par les visiteurs du parc. « S’immerger dans la nuit profonde, c’est vraiment une expérience à part entière », commente-t-il. Rester là, sans bouger, dans le noir, en silence : ça change. Surtout quand on habite sous une chape de pollution.
Ciel artificiellement lumineux
Selon l’Atlas mondial de la clarté artificielle et du ciel nocturne, publié par la revue Science Advances en 2016, 80 % de la population mondiale vit sous un ciel artificiellement lumineux. « La plupart des gens logent en ville ou dans des communes qui éclairent leurs rues la nuit. Ils sont totalement déconnectés du ciel et de ses phénomènes, complète Christophe Lehénaff. Quand ils partent en vacances, ils vont chercher des lieux qui les coupent de leurs habitudes. »
Et recherchent la lumière naturelle. « Ils ont cette envie, peut-être inconsciente, de (re) découvrir le ciel. » Philippe Peeters, lui aussi passionné d’astronomie, a cofondé en 2016 Terre Constellée, une agence de voyages spécialisée dans l’astronomie basée à Lésigny, en Seine-et-Marne. Il tempère : « L’astro-tourisme est en train de se développer en France, mais ça reste une activité marginale. Pour la plupart des gens, elle se limite aux aurores boréales et aux événements importants comme les éclipses et les Nuits des étoiles. »
L’éclipse de 1999
Pour Christophe Lehénaff, cet engouement remonte, entre autres, à l’éclipse totale du 11 août 1999. « Elle a intéressé des millions de gens et cela s’est répercuté sur l’achat de matériel, qui s’est par la suite démocratisé. Les points de vente se sont multipliés », note l’auteur. Derrière comme devant les écrans : « Documentaires, films, émissions, aujourd’hui on a un accès facile au domaine de l’astronomie, alors qu’avant il était réservé aux spécialistes. »
Une galaxie bigarrée, composée à la fois de fins connaisseurs et de néophytes. « L’astro-tourisme, c’est profiter d’un beau ciel et cela peut se faire de plusieurs manières », poursuit Christophe Lehénaff. D’abord, à l’œil nu, puis avec un peu de matériel : « Avec une paire de jumelle basique on peut déjà voir pas mal de choses, comme les satellites de Jupiter », assure-t-il.
Mais la condition sine qua non reste un beau ciel dégagé, vide de toute pollution lumineuse. Les métropoles ne sont donc pas des spots à privilégier, même si l’on y trouve des observatoires, comme le fait remarquer Christophe Lehénaff. « Mais on est condamné à regarder les cratères de la lune et les planètes, pas les étoiles, ni la voie lactée, les galaxies, ou les nébuleuses. » Bien peu de chose quand les merveilles de l’univers attendent les curieux dans le massif du Morvan ou ailleurs.