Vous avez interviewé José Bové sur la polémique autour du gaz de schiste
VOS QUESTIONS•L'eurodéputé d'Europe Ecologie a répondu à toutes vos questions...M.B. avec A.C.
José Bové a récemment pris position dans l’affaire contre les gaz de schiste. Il souhaite obtenir l’abrogation des permis de prospection de gaz et d’huiles de schiste dans le sous-sol français. La pétition qu’il a lancée contre les exploitations de gaz et d’huile de schiste a déjà recueilli 40.000 signatures.
Même si les gaz de schiste pourraient permettre d’assurer dix à vingt ans de gaz à la France, il avait expliqué à 20minutes.fr que « ce serait tourner le dos au Grenelle de l’environnement et à tout ce qui a été discuté à Copenhague.»
Il continue aussi à se battre contre les élevages intensifs avec la diffusion de «Pig business» au Parlement Européen.
Dans un livre d’entretiens avec Jean Quatremer, «Du Larzac à Bruxelles» (publié aux Editions du Cherche-midi), il explique son engagement et son rapprochement avec le député vert Daniel Cohn-Bendit.
Il a répondu à toutes vos questions sur son engagement politique, l’alter-mondialisme, et l’actualité liée aux gaz de schiste.
Mot de la fin: En guise de conclusion de ce dialogue, je vous propose toutes et tous de vous mobiliser dans vos territoires, de signer et de faire signer la pétition : Gaz de schiste non merci (sur mon site internet). Merci et à bientôt. José
Est-il vrai que l'Etat a déjà accordé des permis d'exploitation des gaz de schiste, notamment en région Parisienne? Lors du lancement d'un forage, une enquête d'utilité publique est-elle obligatoire? Des recherches sur l'éventuel impact sismique de l'exploitation des gisements de gaz de schiste sont-elles en cours?
Citoyen en perdition
Salut Citoyen "retrouvé"
Il est exact que le ministre Borloo a octroyé un permis de d'exploration sur l'huile de schiste sur le bassin parisien. L'entreprise qui a été choisie pour le faire s'appelle "toréador" elle est dirigée par le frère cadet de Monsieur Balkany, Maire de levallois (92) et intime du Président de la République. Le périmètre de ce permis fait environ 4500 km2 il concerne notamment le département de Seine et Marne. Un collectif vient d'y être créé et des mobilisations sont prévues sur le terrain. Les permis d'exploration ne nécessitent pas d'enquête d'utilité publique. Le droit minier est très particulier et se singularise du droit classique. De nombreux scientifiques travaillent actuellement sur les conséquences de la fracturation hydrolique et de l'utilisation de produits chimiques dans les techniques de prospection et d'exploitation. La communauté scientifique est aujourd'hui unanime pour condamner cette technologie polluante tant pour les risques sur les nappes phréatiques que sur l'environnement en général.
Que pensez-vous de la campagne polémique de France Nature Environnement sur l’agriculture? Est-ce que vous ne «délaissez» pas un peu les questions agricoles depuis votre arrivée au Parlement européen?
Bertrand
Salut Bertrand,
Je pense que la campagne de France Nature Environnement pose de vraies questions sur les dérives de l'agriculture industrielle. C'est tout l'objet du débat auquel je participe au Parlement européen depuis 1 an et demi. Nous avons déja réussi à bloquer plusieurs projets comme celui de vouloir importer de la viande clonée ou celui de permettre l'utilisation de la "thrombine" pour reconstituer la viande. Le débat sur la réforme de la PAC met au coeur de la discussion à la fois la transformation des pratiques agricoles et celui d'une nouvelle répartition équitable des soutiens aux agriculteurs. Avec l'agmentation des prix des matières premières agricoles on assiste aujourd'hui à une spéculation sur l'alimentation des habitants les plus pauvres de la planète mais aussi à une remise en cause de secteurs entiers de l'élevage qui ne peut plus faire face à ses approvisionnements. Il est urgent de sortir l'agriculture de cette spirale spéculative et de reconnaître le droit à la souveraineté alimentaire pour tous. Si vous voulez plus d'info sur le travail au quotidien sur les questions agricoles que je mène au Parlement vous pouvez consulter mon blog.
La polémiques sur les gaz de schistes posent surtout la question sur "la France et son énergie". Que ce soit le gaz, le nucléaire, le pétrole, les énergies renouvelables... Quelle est votre position sur les principes d'importation d'énergie sous toutes ces formes avec les contraintes que cela comporte (exploitation d'autres pays, instabilité politique, coût social, environnemental)... Et le fait d'exploiter les ressources nationales? Doit-on produire local, ou exploiter international? N'avons-nous pas la responsabilité de notre consommation nationale même si la production est externalisée (les problèmes également). En bref, pour nos besoins, mieux vaut-il spolier les autres que d'assumer notre pollution sur notre territoire?
Eole
Salut Eole,
Je vois avec plaisir que la question du gaz de schiste permet outre les questions de destruction de l'environnement d'aborder la question centrale de l'énergie. Il faut d'abord affirmer que l'énergie est un besoin pour tous quelque soit le lieu que l'on habite sur terre. Nous ne pouvons pas aujourd'hui réfléchir à cette question sans se poser aussi celle de l'impact de sa production sur les bouleversements climatiques et sa juste répartition. Les compagnies pétrolières gazières ou nucléaires à travers leur fuite en avant et leur volonté d'augmenter leurs bénéfices pervertissent le débat en créant des besoins artificiels. Si l'on regarde objectivement on s'aperçoit des grandes disparités dans l'accès à l'énergie entre les pays et les continents. Devons-nous laisser à ces seuls opérateurs la possibilité de décider? Comment pour l'agriculture et l'alimentation, l'énergie doit être pensée au niveau international en permettant l'accès à tous et en même temps en réduisant les impacts négatifs sur la planète.
Je crois nécessaire que, dans le cadre des Nations Unies, ce débat doit être porté et que les droits fondamentaux soient respectés. Je suis d'accord avec vous, la façon dont les compaganies pétrolières détruisent des territoires entiers dans les pays du sud est parfaitement inacceptable et qu'il faudrait les poursuivre pour crimes sociaux et écologiques. Pour ce qui est de l'UE et de la France en particulier, le débat doit porter d'abord sur la lutte contre le gaspillage énergétique. 30% de l'énergie produite est gaspillée! Il faut donc mettre en place un plan à la fois de réduction des gaspillages, d'efficacité énergétique et de développement d'énergies renouvelables non polluantes. C'est pourquoi j'appelle de mes voeux la prise en compte de cette question comme fondamentale pour 2012.
Bonjour M. Bové,
Comment verriez-vous l'éventuelle candidature de Nicolas Hulot ?
Leroy Jethro Gibbs
Bonjour Leroy
Je ne peux aujourd'hui prendre position sur une candidature non déclarée. A Europe Ecologie pour l'instant c'est la candidature d'Eva Joly qui est reconnue et soutenue par le plus grand nombre. Si demain Nicolas Hulot faisait acte de candidature nous serons ammenés à discuter collectivement pour envisager le choix de celui ou celle qui défendra le mieux nos propositions. Je suis contre les écuries de course et favorable à un choix par consensus.
Les forages d’huiles de schiste existent déjà et ne sont pas concernés par le moratoire décrété par le Ministère mais ces forages utilisent les mêmes méthodes que pour les gaz: est-ce que la mobilisation contre les gaz de schiste n’arrive pas un peu tard ? N’a-t-elle pas été « importée » du Canada et des Etats-Unis ?
Gaëlle
Bonjour Gaëlle,
Il n'y a pas de moratoire, ni pour le gaz ni pour l'huile de schiste. Il y a juste une mission à la demande des ministères de l'industrie et de l'environnement pour savoir comment les industriels comptent respecter les normes environnementales françaises. Les techniques de fracturation hydrolique sont en effet les mêmes pour les deux énergies. Elles viennent des USA et sont couvertes par des brevets. Les compagnies qui ont bénéficiées des permis d'exploration sont toutes adossées à des entreprises des USA parce que qu' aucune entreprise française ne maîtrise cette technologie.
Nous avons démarré la mobilisation contre les permis d'exploration parce que, contrairement aux discours de NKM, l'exploration découle quasi automatiquement sur l'exploitation si on lit correctement le code minier. Aujourd'hui il est possible pour le gouvernement d'abroger les permis octroyés. C'est l'objet du combat actuel sur l'ensemble des territoires concernés. Nous demandons un débat public sur la production et la consommation d'énergie qui s'inscrive dans les obligations de lutte contre le réchauffement climatique adopté au niveau européen.
Bonjour Monsieur Bové,
Est-ce que vous trouvez normal que la France légifère pour diminuer la vente de panneaux photovoltaïques sous prétexte que cela revient trop cher à EDF pour privilégier à nouveau l'exploitation de ressources fossiles polluantes (consommation d'eau indécente entre autres)?
Pandrose
Bonjour Pandrose,
Je trouve parfaitement scandaleux cette volte face de la France sur la question de la production d'énergie renouvelable. Notamment sur l'énergie photovoltaïque. C'est une présentation faussée qui a été faite sur le coût pour les consommateurs qui a servi de prétexte a arrêter le développement de cette production. Je souhaite que le gouvernement reveinne sur cette décision et que l'on favorise au contraire le développement de ces panneaux notamment sur les bâtiments industriels et commerciaux qui sont grands consommateurs d'énergie fossile ou nucléaire. C'est ici une question d'emplois et de lutte contre le changement climatique.
Vous avez demandé au Ministère de l’Ecologie de vous communiquer les documents d’autorisation de prospection de gaz de schiste : avez-vous obtenu une réponse ? Pensez-vous que la voie judiciaire dans laquelle vous vous êtes engagé est la meilleure ? Comment pouvez-vous faire reconnaître l’opacité avec laquelle ces permis ont été accordés alors qu’ils ont été publiés au JO?
Audrey
Effectivement les permis ont été publiés au JO mais même si personne n'est sensé ignoré la loi je ne connais pas un seul élu local qui soit abonné au JO. C'était aux préfets d'informer les différentes collectivités locales de la mise en place de ces propositions avant qu'elles ne soient envisagées. Dans la mesure où l'exploitation du gaz de schiste a des conséquenecs graves sur l'environnement il était necessaire d'avoir un débat préalable. Nous n'avons à ce jour obtenu aucun des documents demandés, ni ceux des autorisations, ni ceux des appels d'offre. Quand le délai d'un mois suite à notre demande sera échu, nous saissirons la comissions des documents administratifs (CADA).