Faut-il encore faire un master pour décrocher un bon job ?
DIPLÔME•Le master ouvre des portes, mais pas toutes. Cette enquête interroge la réelle portée du bac +5 sur le marché de l’emploi
Fostine Carracillo pour 20 Minutes
L'essentiel
- Le master reste un levier efficace pour accéder à l’emploi, mais son impact varie selon la spécialité.
- Les écarts de salaires et de statut sont importants entre filières.
- Un bac +5 ouvre des portes, à condition de savoir lesquelles on veut franchir.
Contrairement à une idée parfois relativisée, décrocher un master reste un atout solide pour entrer sur le marché du travail. C’est ce que confirme une récente étude du Céreq, qui montre que les titulaires d’un bac +5 s’insèrent en général plus rapidement et dans de meilleures conditions que les diplômés de niveau inférieur. Toutefois, cette longueur d’avance n’est pas garantie pour tous : elle varie fortement selon la spécialité choisie, certaines filières offrant plus de débouchés que d’autres dès les premiers pas dans la vie professionnelle.
Inscrivez-vous pour accéder à des milliers d’offres d’emploi et faciliter vos démarches et recherches de job.
Des milliers d'offres d'emploi en un clicUn bac +5, oui, mais pas toujours synonyme de statut
Trois ans après avoir quitté les bancs de la fac, une large majorité des diplômés de master ont trouvé leur place sur le marché du travail : 85 % d’entre eux étaient en poste en 2020, selon les données de l’enquête « Génération 2017 » du Céreq. L’essentiel avait signé un CDI et touchait en moyenne 2.170 euros net par mois. Une insertion globalement solide, que le Céreq a documenté dans un rapport en s’appuyant sur les trajectoires de jeunes diplômés suivis de près pendant trois ans.
Mais derrière ce tableau plutôt favorable, la réalité est plus nuancée. Si le master ouvre la voie à des postes qualifiés, notamment ceux de cadre, cette promesse ne se concrétise pas immédiatement pour tous. En 2020, seuls 63 % des jeunes actifs titulaires d’un master occupaient effectivement un poste de cadre, contre 75 % parmi ceux issus de formations plus sélectives comme les mastères spécialisés ou les grandes écoles. Autrement dit, le bac +5 universitaire rassure les employeurs, mais ne garantit pas toujours l’accès rapide aux responsabilités.
Tous les masters ne se valent pas
Derrière le même diplôme, les écarts de trajectoire sont frappants. Vivre en Île-de-France double les chances d’une insertion réussie, grandir dans un foyer où les deux parents sont cadres augmente d’un tiers les probabilités d’accéder rapidement à un emploi bien payé. En filigrane, le rapport du Céreq rappelle que les débuts professionnels ne se jouent pas uniquement sur les bancs de la fac, mais aussi sur le terrain social et géographique. À diplôme égal, les réseaux et le contexte familial pèsent lourd dans la balance.
D’autres leviers influencent le parcours, comme l’alternance, choisie par une minorité encore timide, mais stratégiquement payante : une hausse de 40 % des chances d’insertion à la clé. Pourtant, c’est la spécialité du master qui, plus que tout, conditionne les premières années de vie active. Ceux issus de l’informatique ou de la finance entrent presque naturellement dans le monde professionnel par la bonne porte. À l’inverse, un master en lettres ou en arts offre bien moins de garanties : seuls 7 % de leurs titulaires décrochent une insertion qualifiée dans les temps.
Des différences de salaires selon les spécialités de master
À l’entrée dans la vie active, le portefeuille ne pèse pas le même poids selon la spécialité choisie. Un jeune diplômé en « finance et banque » perçoit en moyenne 2.480 euros net par mois, quand son homologue passé par un master en « éducation et formation » doit se contenter de 1.720 euros. Une différence marquée, qui illustre l’impact concret des orientations académiques sur le revenu dès les premières années.
Pourtant, ces chiffres ne suffisent pas à raconter toute l’histoire. Comme le souligne le Céreq, « tous les masters n’ont pas les mêmes objectifs formatifs ni d’insertion professionnelle, certains étant davantage axés sur la poursuite en doctorat ou la recherche ». Autrement dit, comparer les revenus bruts revient parfois à mettre sur le même plan des projets de vie très différents. Et malgré les écarts, un constat s’impose : neuf diplômés sur dix déclarent se « réaliser professionnellement », preuve que la valeur d’un master ne se mesure pas uniquement à la hauteur du salaire.
Un bac +5 de plus en plus prisé, mais pas toujours bien ciblé
Face à un marché de l’emploi moins favorable aux postes peu qualifiés, beaucoup de jeunes ont préféré prolonger leurs études, parfois sans véritable projet derrière le diplôme. Le rapport du Céreq s’inscrit dans ce contexte : il confirme que les masters facilitent globalement l’insertion, mais rappelle aussi que tous n’ouvrent pas les mêmes portes. Une stratégie d’attente ou de précaution, devenue très répandue. En dix ans, le nombre d’étudiants dans les années supérieures a augmenté de 20 %, avec 500.000 inscrits en plus, selon le ministère de l’Éducation nationale. Une manière, souvent efficace, d’éviter le chômage immédiat : l’Insee indique que 90 % des diplômés de master trouvent un emploi rapidement, même si un tiers choisit de poursuivre encore ses études.
Pourtant, ce choix par défaut peut conduire à des désillusions. Les débouchés proposés après un master sont souvent éloignés du terrain, orientés vers des fonctions administratives ou sédentaires, et peuvent ne pas convenir à tous. Le Céreq, en montrant les écarts entre spécialités, rappelle aussi que le diplôme n’efface ni les inégalités sociales, ni les attentes personnelles. Un bac +5 augmente les chances d’emploi, mais ne garantit ni satisfaction, ni adéquation avec ses envies.
Le master, un atout réel, mais à valoriser intelligemment
Le diplôme rassure, c’est un fait, mais il ne dit pas tout. Dans un paysage où les recruteurs peinent parfois à s’y retrouver parmi la diversité des cursus, ce sont les compétences concrètes, l’aisance en entreprise et la capacité d’adaptation qui priment. Les stages de fin d’études et l’alternance font ici figure de véritables tremplins. La preuve dans les chiffres : un étudiant sur deux recruté par son entreprise d’accueil et 92 % d’insertion en moins d’un an dans certaines filières. La clé ne tient plus uniquement dans le diplôme, mais dans l’usage qu’on en fait.
Une tendance se dessine : avoir un bac +5 ne garantit pas un chemin tracé, mais offre des marges de manœuvre. Encore faut-il savoir les saisir. Le parcours ne se joue pas seulement sur les bancs de l’université, mais dans les démarches engagées, les choix de stages et la précision du projet. De plus en plus, les jeunes diplômés s’orientent vers des formats hybrides, des contrats à l’étranger ou des secteurs connexes à leur formation. Au-delà du diplôme, l’insertion passe par la capacité à se projeter, à ajuster le tir et à ne pas attendre que le diplôme parle à sa place. Un bac +5, oui, mais avec un cap clair.
À lire aussi