La santé mentale des travailleurs a le moral dans les chaussettes
ça va pas•La caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) a récemment fait état d’une augmentation des dépenses liées aux arrêts maladies.Youssef Zein
L'essentiel
- La crise du Covid a exacerbé les fragilités mentales des salariés, en particulier chez les moins de 35 ans où près d’un sur deux considère que son travail met en danger sa santé mentale.
- Les burn-out explosent dans les entreprises mais restent tabous et source de culpabilité, en raison notamment du manque de bienveillance et de la suspicion des manageurs.
- Le marché de l’emploi étant plus favorable aux candidats, les jeunes sont plus exigeants sur les conditions de travail et l’équilibre vie pro/perso devient un critère clé.
La santé mentale sera la grande cause de 2025. C’est ce qu’a annoncé Michel Barnier lors de son discours de politique générale. Longtemps négligée, ce sujet est devenu de plus en plus récurrent au cours des dernières années. Si l'on devait le placer, le point de bascule tomberait certainement sur la période covid, tant l'épidémie a mis les travailleurs à rude épreuve. C’est tout du moins ce que suggère une étude menée par Indeed parue début octobre, qui relève une « explosion » des arrêts maladies et burn-out, signe d'une fragilisation de la santé mentale.
D’après le document, plus d’un salarié sur trois (37 %) pense que rester dans leur entreprise actuelle met en péril leur santé mentale. Ce sentiment morose est généralisé, mais il touche davantage les plus jeunes, où ces chiffres s’élèvent à 47 % chez les moins de 35 ans. De leur côté, les entreprises semblent avoir pris conscience du phénomène et tentent de s’adapter. « Elles voient ces chiffres exploser et elles en ont conscience. L’affaire des suicides chez France Télécoms a marqué un tournant » commente Eric Gras, spécialiste du marché de l’emploi pour Indeed France.
Des milliers d'offres d'emplois en un clicUn mal dissimulé
Les chiffres des burn-out affichés dans l’étude sont pour le moins inquiétants : 71 % des 1.050 salariés interrogés témoignent de situations d'épuisement professionnel (burn-out) dans leur entreprise. Malgré une hausse globale, ils restent dans bien des cas une souffrance inavouable. 57 % des sondés reconnaissent qu’ils se sentiraient coupables de se faire arrêter pour cette raison. Pour ceux actuellement en situation de burn-out, 78 % éprouvent de la culpabilité.
En cause ? Le milieu de l'entreprise, où la confiance n’est pas au beau fixe. Un salarié sur deux touché par un burn-out fait état d'un comportement suspicieux de la part de sa hiérarchie. « Selon ses moyens et sa maturité, la boîte a tout intérêt à accompagner ses équipes sur ces problématiques, y compris pour ses propres performances », constate Eric Gras. « Pour décomplexer les personnes concernées, il faut impérativement instaurer une culture inclusive et bienveillante. »
Une hausse des exigences des jeunes candidats
Depuis quelques années, les études Indeed et BVA XSight ne manquent pas pour souligner l’importance du bien-être au travail aux yeux des jeunes. Pour Eric Gras, outre la question générationnelle, cette importance est liée à un marché du travail plus favorable aux candidats : « Avant, les candidats étaient moins exigeants sur leur cadre de travail et avaient tendance à faire le dos rond. Aujourd’hui, il est plus facile de trouver un emploi, – 45 % d’offres d’emplois de plus en moyenne qu’avant la crise Covid –, la recherche de l’équilibre vie professionnelle et personnelle devient un véritable critère. » D'après l'INSEE, 1,3 million d’emplois salariés ont été créés depuis fin 2019. Cela représente sensiblement le nombre cumulé d’emplois créés entre 2009 et 2019.
À lire aussi