Nouvelle-Aquitaine : A la découverte de Cassinomagus, pépite parmi les thermes gallo-romains
PATRIMOINE Le site antique de Cassinomagus se met à l’heure d’Halloween pour les vacances de la Toussaint, l’occasion de découvrir les thermes gallo-romains les mieux conservés de France
- Les thermes de Cassinomagus figuraient parmi les plus importants des trois Gaules entre le Ier et le IIIe millénaire.
- Situé à la frontière du peuple des Lemovices et de celui des Santons, le but de ce site qui comprenait aussi un immense temple était d’impressionner le voyageur.
- La structure des thermes est toujours très bien conservée, et permet une immersion dans le quotidien des Gaulois de l’époque.
Crise du Covid-19 oblige, des sens de circulation seront mis en place pour la murder party et le couloir des enfers. Mais les animations autour d'Halloween devraient bien se tenir aux thermes gallo-romains de Cassinomagus, sur la commune de Chassenon en Charente.
L’occasion d’aller découvrir ce site exceptionnel, puisqu’il s’agit tout simplement des thermes gallo-romains les mieux conservés de France. « Ici, nous avons encore les fonds des bassins - ce qui n’existe nulle part ailleurs en France - les enduits peints à certains endroits, et les trois niveaux – le niveau de circulation des baigneurs, les niveaux de chauffage, et les fondations – ce qui est très rare » insiste Charlotte Chalard, responsable de la médiation du site de Cassinomagus.
Des divinités créées par la fusion de dieux grecs et gaulois
Si aujourd’hui on s’apprête à célébrer la fête des morts, il y a 2.000 ans on vénérait des dieux tout à fait singuliers, sur ce sanctuaire de 7 ha, qui se situait alors à la frontière du peuple des Lemovices (les Limousins) et des Santons (dont la capitale était Saintes). « L’ensemble du site comprenait les thermes, mais aussi un temple, et un édifice de spectacle – théâtre ou amphithéâtre ce n’est pas encore très sûr, poursuit Charlotte Chalard. On retrouve très souvent ces trois monuments ensemble sur les sites de campagne, ils sont emblématiques de la nouvelle civilisation romaine qui arrive, surtout les thermes. En revanche, ce qui dénote à Cassinomagus, c’est la taille de ces monuments : le temple mesure plus de 30 mètres de haut, et les thermes font plus de 10.000 m2… C’est beaucoup trop grand comparé à la ville où nous étions. Cassinomagus étant le dernier village Lemovice avant le changement de peuple, et se situant sur la Via Agrippa, une énorme voie romaine qui reliait Lyon à Saintes, le but était d’impressionner les voyageurs et leur montrer qu’on arrivait chez les riches et puissants Lemovices. »
C’est surtout le temple qui attirait les foules ; « les gens devaient s’y arrêter pour obtenir la protection des dieux. » « Ils viennent remercier Marti Granno, un dieu gallo-romain créé de la fusion du dieu romain Mars et du dieu gaulois Grannus. Il y a à cette époque des créations totales de la part des peuples gaulois, pour montrer leur allégeance à l’empire, tout en continuant de marquer leur emprise sur le territoire. Mars peut être associé à plein de dieux différents. Il y a aussi Cobrandia, une déesse gauloise qui correspond à la déesse des frontières, et dont on a trouvé trace uniquement à Cassinomagus. » Les thermes, eux, servaient non seulement à se laver, mais aussi à faire ses ablutions rituelles avant de se présenter aux dieux, « une sorte de prélude au temple. »
Douze fours alimentés au bois pour chauffer les thermes
Le fonctionnement des thermes s’effectuait avec un système de chauffage au sol (hypocauste), via douze fours alimentés au bois. « L’air chaud circulait entre des petites piles de briques sous le sol, et il y avait un système de chauffage spécifique pour l’eau. » Le parcours de soins débute soit par l’exercice physique dans les salles dédiées (gymnases ou palestres), soit par la transpiration et l’immersion dans les bains chauds des salles chaudes (caldarium, piscines chaudes). L’usager passe par les salles tièdes (tepidarium), espace de transition pour habituer le corps aux variations de température. Le rituel du bain finit dans les salles froides (frigidaria) ou dans les espaces extérieurs (palestres à natatio) pour redonner du tonus à sa peau et la raffermir.
« C’est le circuit basique, et les textes romains nous disent que l’on reste en moyenne deux heures dans les thermes. L’objectif est de se laver en transpirant, un peu comme dans les hammams et les saunas. Puis quand on est propre, on plonge dans l’eau froide pour faire un choc thermique et raffermir la peau, comme dans les spas. » L’eau était apportée, froide, par un aqueduc qui alimentait également le temple. Le bâtiment reposait sur 24 couloirs voûtés, qui soutenaient le poids des thermes et servaient de vide sanitaire.
Effondrés au IIIe siècle après un incendie
Entamés en 90 après J.C., ces thermes étaient les quatrièmes plus importants des trois Gaules. Ils ont subi un incendie au milieu du IIIe siècle, ce qui les a fait s’effondrer d’un seul coup. « Et c’est ce qui a permis de les conserver si bien, car les gens du village ont abandonné ce tas de gravats, le tout s’est recouvert de terre et a disparu des yeux de la population, explique Charlotte Chalard. Comme Pompéi, le site a été détruit d’un coup et enseveli ce qui l'a préservé. »
Découverts en 1958 par Jean-Henri Moreau, ils sont par la suite devenus propriété du département de la Charente, qui en a confié l’exploitation à la société Alfran. Le conseil départemental espère obtenir prochainement l’autorisation de lancer de nouvelles fouilles, pour retrouver des vestiges de l'édifice de spectacle.
L’activité « Sueurs froides aux thermes » est proposée les 31 octobre et 1er novembre, et un jeu « La voie des enfers » est proposé durant toutes les vacances de la Toussaint. Visites du site de 10h à 18h.