Toulouse : Les 4.200 tonnes de nitrocellulose des ballastières seront-elles dépolluées en 2024 ?
Explosif•Alors que les études se poursuivent pour connaître les procédés de dépollution de ces 4.200 tonnes de nitrocellulose, la préfecture annonce que la phase de travaux « devrait » démarrer d’ici deux ansBéatrice Colin
L'essentiel
- Depuis un siècle, plus de 4.200 tonnes de nitrocellulose, une poudre explosive, sont immergées dans quatre lacs en bordure de Garonne, à Toulouse.
- Depuis vingt ans, la dépollution de ce site militaire est envisagée, sans jamais aboutir.
- Après un nouveau comité de suivi du dossier, les services de l’Etat annoncent un début des travaux de dépollution et de réhabilitation envisageables pour 2024.
Les promesses n’engagent que ceux qui y croient. Et des promesses, dans le dossier des ballastières de Braqueville, à Toulouse, il y en a eu des dizaines au cours des deux dernières décennies. Et des dizaines d’autres au cours du siècle qui vient de s’écouler. Les ballastières, ce sont quatre lacs où sont enfouies depuis les années 1920 plus de 4.200 tonnes de nitrocellulose, un produit explosif qui était utilisé dans la fabrication des obus produits lors de la Première Guerre mondiale, dans la poudrerie voisine. Cette installation a laissé la place à la zone chimique sud qui perdura jusqu’à l’explosion de l’usine AZF, le 21 septembre 2001.
La plus grande catastrophe industrielle d’après-guerre avait remis ce dossier bien encombrant sur la table, les riverains réclamant une évacuation de ces bandelettes, un temps estimé à 46.000 tonnes, puis réévaluées à 5.000 tonnes, puis 4.200 tonnes désormais. Aujourd’hui, 20 ans après, l’Oncopôle t ses patients traités contre le cancer ont pris place à proximité des ballastières, survolées quotidiennement par le téléphérique.
Si l’immersion de la nitrocellulose dans l’eau la rend inerte, la levée de boucliers des riverains a poussé il y a quelques années les services de l’Etat à relancer la réflexion sur la dépollution de ce site militaire. En 2017 déjà, Bernard Cazeneuve, le Premier ministre de l’époque, annonçait que les travaux seraient engagés d’ici 2022. Trois ans plus tard, l’un de ses successeurs, Jean Castex, s’engage par courrier auprès du maire de Toulouse à la mise en place d’un groupe de travail chargé d’étudier le dossier.
Deux ans plus tard, une réunion du comité de suivi dédié au projet de réhabilitation s’est tenue le 29 novembre dernier. « Les premiers résultats des études naturalistes lancées au printemps 2021 ont permis de constater qu’au-delà de la présence de nouvelles espèces sur le site, la richesse environnementale est en forte croissance. Ces études ont aussi permis de préciser les modalités potentielles d’intervention pour les opérations de déstockage », indiquent la préfecture de la Haute-Garonne et la métropole de Toulouse dans un communiqué.
Procédés de dépollution connus mi-2023 ?
Le site étant classé Natura 2000, la flore et la faune y ont repris leurs droits depuis longtemps. Ce que Geneviève Darrieussecq, alors ministre déléguée auprès de la ministre des Armées, avait déjà relevé en 2020 lors d’une réponse faite à l’Assemblée nationale qui lui était adressée par la députée de la circonscription de l’époque.
Quant aux procédés de réhabilitation qui seront utilisés, ils sont pour l’heure toujours en cours d’étude indiquent les services de l’Etat. Dès 2013, la direction générale de l’Armement avait proposé plusieurs hypothèses pour traiter cette nitrocellulose. Celle du thermique d’abord, qui consiste à la brûler en dehors du site et dont le coût était alors estimé à 40 millions d’euros. L’option de la biodégradation par bactéries sur place avait été envisagée mais elle nécessitait la mise en place d’un site Seveso et l’utilisation de 9 kg de sable pour un kilo de nitrocellulose. Difficile à mettre en place avec un hôpital situé juste à côté.
Près de dix ans plus tard, la préfecture indique ce mardi que « trois essais sont actuellement menés sur une courte durée » et qu’un « volume réduit d’échantillons de poudre a été prélevé afin de comparer ces procédés innovants à des solutions plus conventionnelles, comme celle du traitement thermique des poudres. Les résultats complets sont attendus au premier semestre 2023 ». Et de conclure dans son communiqué que « la phase de travaux devrait démarrer en 2024 ». Un conditionnel de rigueur dans ce dossier qui fait figure de véritable arlésienne.