Toulouse : Cent ans après, des lycéens vont reconstruire un avion légendaire piloté par Saint-Exupéry
TRAVAUX PRATIQUES•A Toulouse, dans le berceau des pionniers de l’aéronautique, un projet inédit prend son envol, celui de reproduire un avion mythique, le Laté-28, avec l’aide de cinq générations de lycéens
Hélène Ménal
L'essentiel
- Seuls 50 exemplaires du légendaire avion Laté-28 sont sortis des chaînes Latécoère de Toulouse il y a près d’un siècle et il n’en reste plus aucun.
- Mais deux Laté-28 sont sur le point de renaître. Dont l’un à Toulouse, à l’endroit exact de son invention.
- Pendant cinq ans, les élèves d’une quinzaine de lycées spécialisés de la région Occitanie vont participer à cette aventure technologique.
On ne le trouve plus qu’en photo dans les livres d’histoire ou sur les cimaises des musées, à la limite en maquette sur le bureau d’un collectionneur. Il ne reste pas un seul des 50 exemplaires du Laté-28 sortis entre 1928 et 1932 des usines Latécoère de Toulouse. L’appareil mythique, piloté par Saint-Exupéry, Guillaumet ou Mermoz a pourtant marqué l’histoire de l’aéronautique par sa fiabilité et le confort offert à ses huit passagers installés dans des fauteuils en osier. Mais il sera bientôt de retour, avec son immense hélice bipale de 4 m d’envergure, sa carcasse de bois et de métal. En deux exemplaires même.
Le premier volera. Grâce à la folie des passionnés du Cercle des Machines Volantes (CMV) qui, dix ans durant, ont rassemblé les plans authentiques et la documentation d’époque et doivent faire décoller leur machine en 2029.
Plans authentiques mais technologies d’aujourd’hui
Le deuxième Laté-28 version XXIe siècle sera assemblé dans le berceau de ses ancêtres, à Montaudran, où les usines Latécoère ont cédé l’espace à un lieu hommage, l'Envol des pionniers, qui retrace les aventures de l’Aéropostale. Cet exemplaire-là sera statique et destiné à être exposé sur place. « Il sera fait à partir des plans d’origine transmis par le CMV, précise Alain Gaboriaud, le chef de projet de l’association Laté 28, mais nous allons utiliser les méthodes et les moyens d’aujourd’hui ». Et les mécanos du moment aussi. Car pour l’usinage de certaines pièces, les élèves d’une quinzaine de lycées technologiques ou professionnels d’Occitanie – à Toulouse, Blagnac, Tarbes ou encore Auch – vont être sollicités pendant cinq années consécutives. Le Laté-28 fera partie de leur cursus pédagogique, de leurs travaux pratiques et de leur parcours de « transmission des savoir-faire ». « Cette pédagogie par projet permet de s’aventurer au-delà des disciplines, et ainsi de mobiliser les compétences transversales des élèves et des étudiants », assure Mostafa Fourar, le recteur.
Khaled, élève en deuxième année de BTS en Conception des produits industriels au lycée Dupuy de Tarbes, fait partie des pionniers de l’aventure. Il sort d’un stage d’un mois à l’association Laté 28 et a été chargé de reproduire l’armature du fuselage. « J’ai d’abord dû décrypter les plans d’époque puis j’ai reproduit la pièce à plat avec un logiciel », raconte l’élève, conforté dans ses rêves d’aéronautique, et qui ne connaît pas encore sa note de stage. L’année prochaine, ses camarades devront motoriser l’énorme hélice de l’exemplaire toulousain. Et faire en sorte qu’elle ne blesse aucun des visiteurs venus fêter ce retour aux sources.