Toulouse: Œuvre à l’abandon, paysage de cimetière… Polémique autour du Mémorial de la catastrophe AZF
CATASTROPHE•Quatre associations de victimes d’AZF montent au créneau. Elles contestent la tournure que prend le Mémorial de la catastrophe, avec ses cyprès façon cimetière et une œuvre traitée « avec désinvolture»…Hélène Ménal
L'essentiel
- Quatre associations contestent l’aménagement du site du Mémorial AZF.
- La plantation de cyprès rappelle un cimetière et dénature l’œuvre d’art érigée en 2012 selon ces associations.
- Le concepteur de l’œuvre, jusqu’ici discret, se joint au concert de plaintes.
«Quand j’arrive sur le site, j’ai l’impression de pénétrer dans un cimetière. J’en ai un haut-le-cœur ». Pauline Miranda, la présidente deassociation des sinistrés du 21 septembre, n’est pas la seule à regarder de travers les 31 cyprès - autant que de victimes de la catastrophe - qui forment une allée au milieu du mémorial AZF puis entourent l’œuvre d’art érigée en 2012. Avec l’association de Familles endeuillées, Plus jamais ça et le comité de quartier de Croix de Pierre, ce sont quatre associations en tout qui montent au créneau après une réunion très houleuse avec la mairie mardi.
Parce qu’elles n’ont jamais validé cette configuration. Ce sur quoi elles discutent, depuis déjà trop longtemps, c’est d’un « parcours de mémoire » : une esplanade rectangulaire, dont chaque côté serait consacré à un pan de l’affaire (l’histoire de l’usine, l’histoire de l’explosion, etc.) grâce à des petits panneaux explicatifs. La réunion était d’ailleurs consacrée à leur rédaction.
Un parcours de mémoire imposé
« On nous a annoncé que les panneaux seraient placés entre les cyprès, point final, raconte, Gérard Ratier au nom des familles endeuillées, or nous n’avons jamais approuvé ce projet ». Les associations demandent le déplacement des cyprès « le long de la piste cyclable », derrière l’œuvre, pour retrouver le fameux rectangle.
Et cette requête a trouvé un allié de poids. Gilles Conan, l’artiste toulousain, qui, avec ses collègues belges, a créé l’œuvre mémorielle. Ceux qui la connaissent, et ne la prennent pas pour un garage à vélo, savent qu’elle est hérissée de poteaux, dont 31 portent le nom des victimes. Qu’elle est ronde comme la célèbre tour de granulation d’AZF mais aussi comme le cratère que l’usine a laissé. Normalement, les poteaux produisent des sons, d’abord doux puis qui deviennent agaçants, et s’allument la nuit, en blanc comme des cierges, en rouge et blanc comme la tour.
Les chauffeurs de bus cherchent toujours le Mémorial
« C’est une œuvre numérique contemporaine », explique Gilles Conan, jusqu’ici très discret. Sauf qu’elle est éteinte, sale, et que la mairie l’a informé qu’elle ne comptait plus s’acquitter des frais de maintenance estimés à « 30.000 euros par an en moyenne ».
Par ailleurs les cyprès gâchent les perspectives de l’œuvre qui est censée jouer avec la lumière. « Il ne s’agit pas de mon ego d’artiste mais il n’y a plus aucune correspondance avec la réalité que, moi aussi, j’ai vécue », souligne le Toulousain.
Et l’on ne parle pas de l’absence totale de signalétique du Mémorial dans Toulouse. « Il y a des chauffeurs de bus scolaires qui m’appellent pour que je les guide », s’indigne Pauline Miranda. « Tout cela réuni dénote d’un grand mépris pour l’œuvre, pour la mémoire des Toulousains et pour les associations », résume Denis Molin de Plus Jamais ça.
La mairie n’a pas encore donné suite aux sollicitations de 20 Minutes sur cette affaire.