VIDEO. Plan Borloo pour les banlieues: A Toulouse, les habitantes du Mirail passent au crible le plan de l'ancien ministre
SOCIETE•Jean-Louis Borloo présente ce jeudi son Plan pour les quartiers difficiles. 20 Minutes a demandé aux habitantes du Grand Mirail, à Toulouse, théâtre d’une flambée de violence la semaine dernière, si elles ont des idées à lui souffler…Hélène Ménal
L'essentiel
- Jean-Louis Borloo présente ce jeudi son rapport sur les quartiers difficiles.
- Au Mirail, théâtre d’émeutes la semaine dernière, «20 Minutes» est allé à la rencontre des habitantes.
- Elles n’attendent pas une nouvelle vague de rénovation urbaine.
- Elles veulent une aide à la parentalité, un meilleur niveau scolaire pour leurs enfants, de la mixité et de la sécurité.
Quand on voit un groupe d’enfants en vacances s’initier en rigolant au canoë sur le paisible lac de la Reynerie, entouré de verdure, difficile de croire qu’il y a une semaine encore des voitures brûlaient à quelques mètres de là. A Toulouse, le grand Mirail a deux visages. Celui des marchés animés du matin et des immeubles neufs ou en cours de reconstruction et celui du trafic et des caillassages dans les coursives obscures le soir venu. Ici, un tiers de la population a moins de 25 ans et plus de 30 % des habitants sont au chômage.
Les plans gouvernementaux pour les quartiers difficiles (maintenant il faut dire « en reconquête républicaine »), tout le monde s’en rappelle. Mais pas pour leurs bienfaits. « Je suis arrivée en 1995, raconte une mère de famille de la Reynerie. On était bien, il y avait de la mixité, de la vie, des activités. Aujourd’hui, on s’ennuie et les communautés sont repliées sur elles-mêmes ».
Jean-Louis Borloo pourra-t-il remédier à ce mal-être avec son plan ? Le Nordiste allume en tout cas une petite étincelle dans les yeux des habitants. « Au moins lui, il sait de quoi il parle, il faut espérer qu’on le laissera faire », réagit une responsable d’association de Bellefontaine qui souhaite rester anonyme. Des conseils au grand homme, elle en aurait plein.
Et le premier serait de réparer une boulette originelle : « Quand ils ont annoncé qu’ils s’attaquaient aux emplois aidés, j’ai cru rêver. Ce sont les associations qui sont sur la ligne de front, au contact avec les habitants, qu’on ne me dise pas que c’était une priorité budgétaire ».
Des mères dépassées
Ensuite, cette fine connaisseuse du quartier, suggérerait de ne pas rejouer le coup du grand bâtisseur. « On a des immeubles neufs aussi hauts que ceux qui ont été démolis et les nouveaux habitants sont des réfugiés, poursuit-elle.
« On peut embellir tout ce qu’on veut, ça ne crée pas la mixité » »
« Le problème ce n’est pas les constructions, la rejoint une quadragénaire, mais l’autorité parentale. Les pères ne sont pas très présents pour l’éducation et les mères de familles nombreuses sont vite débordées. Les jeunes ne les écoutent plus, suivent le mauvais exemple et tombent dans le trafic. »
L’aide à la parentalité et le sujet de l’école reviennent souvent dans les préoccupations des habitants. Ou plutôt des habitantes, les hommes n’étant pas très bavards. Pour les CP à 12 élèves, elles distribuent un bon point. Mais les mères d’adolescents déchantent. « Ma fille était bonne à l’école puis au collège ici. Elle est rentrée dans un lycée de Balma [banlieue résidentielle] et s’est immédiatement aperçue qu’elle n’avait pas du tout au niveau ». Ce reproche de ne pas être réellement préparé à la « réalité extérieure » est récurrent.
La police pas si indésirable
Enfin, on ne peut pas parler du Mirail sans parler de sécurité. D’autant que les patrouilles sont nombreuses depuis quelque temps. « Elles me mettent mal à l’aise, j’ai toujours l’impression qu’il va se passer quelque chose et ça fait peur aux enfants », confie une jeune femme. Certains prétendent même que c’est cette pression policière qui a mis le feu aux poudres.
Alors, faut-il lâcher la grappe des habitants ? « Vous rigolez j’espère ! répond notre responsable associative. La police c’est la seule réponse possible. Je dirais que 95 % des gens la souhaitent ». Le problème pour la future « police du quotidien », ce sera les 5 % restant.