Toulouse: 29 ans après le meurtre non élucidé d'Hadja, sa famille attaque l'Etat
JUSTICE•D’abord classé en suicide, le meurtre sauvage d’Hadja Benyoucef n’est toujours pas résolu après 29 ans d’errements judiciaires. Sa sœur a décidé de porter plainte contre l’Etat…Hélène Ménal
C’est un petit garçon de sept ans qui a fait la macabre découverte en rentrant de l’école un soir de novembre 1987. Le corps de sa mère gisait dans leur appartement toulousain, dans une scène sordide.
Hadja Benyoucef, 26 ans, avait une couche-culotte enfoncée dans la gorge, un couteau planté dans le cou et un cordon de rideau de douche qui l’étranglait. Sa petite fille de sept mois dormait dans son berceau dans la pièce d’à-côté.
Un improbable suicide
Vingt-neuf ans après, le crime est prescrit et l’affaire toujours non élucidée. Sénussia Clément, la sœur d’Hadja, vient, comme l’a révélé Le Parisien, de déposer plainte auprès du tribunal de grande instance de Toulouse. Une « assignation contre l’Etat en responsabilités pour les dysfonctionnements de la justice et une immense souffrance qui n’a cessé d’être niée », précise Kamel Benamghar, l’avocat de la famille.
« #Toulouse #Justice L'impossible suicide d'Hadja. Sa famille porte plainte contre l'Etat. https://t.co/SI51N0ki6L via @le_Parisien — Jean-Marc Ducos (@jeanmarcduc) February 8, 2016 »
Pour les proches d’Hadja, le calvaire judiciaire a commencé dès les jours qui ont suivi la découverte du corps, quand la médecin légiste a rapidement conclu, malgré les éléments plus que troublants de la scène de crime, à un « raptus suicidaire », un coup de folie autodestructeur.
Le procès d’assises annulé
Sénussia se bat et obtient l’ouverture d’une première information judiciaire. Un homme, collègue de travail et amant présumé d’Hadja, est inquiété, puis relâché, et le suicide reste une option.
Après une longue parenthèse, le dossier ressurgit au détour de la deuxième affaire Alègre, en 2002, quand les gendarmes s’intéressent aux meurtres de femmes non résolus. La mort d’Hadja ne sera pas attribuée au tueur en série. En revanche, la réouverture de l'enquête permet l’exhumation du corps en 2004 et d’écarter définitivement la thèse du suicide.
De nouveau, le même homme est inquiété. Les juges d’instruction décident même en 2007 de le renvoyer devant les assises pour meurtre. Mais le procès n’aura jamais lieu. « La procédure a été annulée purement et simplement », rappelle Kamel Benamghar qui dénonce « un dysfonctionnement du service public indigne d’une société démocratique ». Et qui ne permet ni à la sœur, ni aux enfants de la victime, de surmonter le traumatisme.