Le costard-cravate, nouvelle icône d'une mode dégenrée

Quel est le point commun entre Marlene Dietrich et Greta Garbo ? Ne nous dites pas qu'elles ont marqué l'histoire du cinéma. Encore moins qu'elles ont toutes deux débuté au théâtre, ou été naturalisées américaines. Aurait-on vraiment pris la peine de poser la question ?

C'est un détail vestimentaire, et non des moindres, qui lie ces deux stars hollywoodiennes : le tailleur-pantalon. Elles ont toutes deux contribué à le démocratiser dans les années 1930, à une époque où robes et jupes étaient la norme, s'attirant par la même occasion - toutes deux - les foudres de celles et ceux - mais plutôt ceux - qui ne voyaient pas d'un très bon oeil que les femmes tentent... de leur ressembler.

Détricoter les normes et les stéréotypes

Près d'un siècle plus tard, on ne prend pas exactement les mêmes mais on recommence. Alors oui, de l'eau a coulé sous les ponts, si l'on considère que le pantalon s'est depuis longtemps imposé dans la garde-robe des femmes - rappelons tout de même que la loi interdisant le port du pantalon aux femmes n'a été abrogée qu'en 2013. Mais la gent féminine se joue en ce printemps 2025 des codes de la masculinité, fait fi des normes de genre, et se réapproprie le costard-cravate pour le rendre plus stylé que jamais.

« Les femmes prennent les codes de l’autorité, de la masculinité, et les détournent, les déconstruisent, pour les remettre en question », explique Vincent Grégoire, tendanceur chez NellyRodi. Et de préciser que ce sont essentiellement les plus jeunes générations qui revoient et corrigent ces codes, « des filles et des femmes fortes, puissantes, qui revendiquent autonomie et indépendance ». Un « manifesto », plus qu'une simple question de style, qui témoigne également, dans la continuité de ces dernières années, d'une volonté de bousculer toujours plus les normes et les stéréotypes du genre.

« La déconstruction vise l’horizontalité, c’est le nouvel unisexe des années 70. Le nouveau no gender. Les femmes peuvent flirter avec des symboles masculins, et les hommes avec des symboles féminins », poursuit le chasseur de tendances. Il s'agit donc (aussi) de montrer que chacun s'habille comme il l'entend, homme ou femme, peu importe finalement, sans se prendre au sérieux. Le costard-cravate en est l'exemple parfait puisque les femmes ne se sont jamais autant amusées à le détourner.

Comment le porter ?

On ne se prend pas au sérieux, donc on oublie tout de suite le costard-cravate porté avec une veste cintrée ou un pantalon moulant. Au contraire, on privilégie les costumes oversize dans des matières fluides, souples. « C’est une façon surréaliste de jouer cette déconstruction », explique Vincent Grégoire. Des silhouettes vues lors des défilés printemps-été 2025 sur les podiums de Vivienne Westwood par Andreas Kronthaler, Saint Laurent (bien sûr), Loewe, Bally, Atlein, Moschino, Erdem, Coach, Stella McCartney ou encore Bottega Veneta.

C'est également dans ce style que de nombreuses personnalités publiques, de Demi Moore à Rihanna en passant par Iris Mittenaere, Hailey Bieber ou Zainab Johnson, l'ont réinventé, avec ou sans cravate. On peut d'ailleurs aussi opter pour un look encore plus audacieux, et porter la cravate avec de la lingerie uniquement, voire sur un torse-nu simplement recouvert d'une veste de costume épaulée, toujours version XXL, ou troquer le pantalon du costume contre un micro-short ou un bermuda, toujours avec une veste ample.

Et pourquoi ne pas mixer les genres en associant un pantalon de costume avec un maillot de foot ? « On s’empare des codes des hommes mais on ne le prend surtout pas au premier degré », rappelle Vincent Grégoire. Et de décliner le tout dans des couleurs vives, tout en l'associant avec des sneakers et des bijoux en excès pour définitivement casser les codes.