Lunettes rondes, rouge à lèvres et accessoires XXL, Iris Apnel avait le sens de la démesure. Décédée vendredi à 102 ans, l’Américaine d’origine russe, suivie par 3 millions de personnes sur Instagram, a marqué le secteur de la mode de son vivant avec ses tenues des quatre coins du monde. Décoratrice d’intérieur, designer et architecte, elle excellait dans son domaine, ayant travaillé à la Maison-Blanche pour neuf présidents, de Truman à Clinton. Mais c’est dans le secteur de la mode qu’elle fit résonner son nom malgré elle, comme elle le décrit dans son autobiographie, « Icône malgré moi » (édition Michel Lafon).

« Peu connue du grand public, selon Cécile Poignant, experte en tendances mode, elle est devenue une icône à plus de 80 ans grâce à sa garde-robe mémorable ». En sa mémoire, 20 Minutes revisite les moments marquants de la carrière de l’entrepreneuse en avant-garde des mouvements d’acceptation de soi.

Exposition surprise

« On était en 2005, lorsqu’une exposition de sa collection personnelle de vêtements au Metropolitan Museum à New York l’a vraiment lancée aux yeux du monde », explique Cécile Poignant. Cette opportunité s’est présentée après l’annulation d’une exposition à l’Institut du vêtement. Harold Koda lui a offert la possibilité d’exposer ses pièces qu’elle avait dénichées lors de ses nombreux voyages. Au total, 300 pièces de sa garde-robe y ont été présentées, un exploit sans précédent au MET, qui réserve habituellement ses expositions aux femmes décédées ou influentes dans l’industrie de la mode.

« C’est ainsi, un peu par hasard, qu’elle est devenue cette icône, donc je dirais que c’est assez remarquable », ajoute l’experte, justifiant cela par l’appréciation de ses bijoux et vêtements artisanaux uniques. La sortie de son autobiographie en 2008 n’a fait qu’ancrer sa légitimité d’icône, un statut consolidé lorsqu’elle est devenue égérie de la marque de maquillage Mac Cosmetics et designer de sa collection de vêtements en collaboration avec H & M.

À l’ère des réseaux sociaux, elle est devenue incontournable pour son extravagance : « Elle bousculait les codes entre la couleur, les motifs, la superposition de pièces. Pour elle, c’était aussi une liberté créative de sortir du cadre du style discret attendu pour les personnes d’un certain âge », conclut l’experte.

Naturellement mémorable

Icône incontournable, Iris Apfel fait partie de ceux dont l’identité est indélébile. « Elle s’est créé un personnage avec sa façon très colorée de s’habiller et ses cheveux d’un blanc éclatant. Elle a été l’une des premières femmes visibles à participer au changement de regard sur les personnes âgées », explique Cécile Poignant. Influenceuse avant l’heure, Iris incarne la mamie cool par excellence pour la nouvelle génération, laquelle la découvre dans les publicités Citroën dont elle est l’égérie, ou encore dans le documentaire Netflix IRIS.

Détenant la poupée Barbie à son effigie la plus âgée, Iris Apfel inspire par son identité excentrique et sa soif de liberté. Décédée à l’âge de 102 ans, Iris restera dans le cœur des amoureux de la mode, étant considérée comme « quelqu’un qui a commencé à tracer la voie de l’extravagance à tout âge », au même titre que Peggy Guggenheim ou Frida Kahlo, qui ont créé tout un imaginaire vestimentaire autour d’elles, selon l’experte en tendances mode.