C’est quoi ces « filets végétaux » qui reproduisent le goût et la texture du poulet ?
Foodtech•Largement soutenue par des subventions, la start-up française Umiami a inauguré lundi son usine en Alsace, à Duppigheim. Où elle produit des filets végétaux avec la texture et le goût du poulet. Avant de passer au poisson et au bœufThibaut Gagnepain
L'essentiel
- La start-up française Umiami produit des « filets végétaux » avec la texture et le goût de poulet, mais sans les impacts environnementaux liés à la production de viande.
- Selon son PDG, cela permet d’épargner des millions de poulets et d’économiser de l’eau et des émissions de CO2.
- Ces filets végétaux sont fabriqués par une ligne automatisée dans une usine où travaille une cinquantaine de personnes. Ils sont composés principalement de soja.
- Est-ce bon ? 20 Minutes était à l’inauguration de l’usine en Alsace et vous raconte.
Demain, peut-être, la population mondiale ne mangera plus que ça. Des « filets végétaux » avec la texture et le goût de n’importe quelle viande ou poisson, mais sans les impacts environnementaux liés à leurs productions. Pionnière dans ce secteur, la start-up française Umiami a cette ambition.
« Cette année, nous allons épargner 75 millions de poulets, économiser 30 millions de litres d’eau et éviter l’émission de 15.000 tonnes de CO2 », annonce fièrement Tristan Maurel, le « CEO » de l’entreprise. Le jeune PDG (27 ans) l’a cofondée en août 2019 avec un ancien camarade de prépa aux écoles de commerce, Martin Habfast.
Eau, huile, sel, soja…
« Nous sommes partis d’un constat simple, c’est que l’un des morceaux de viande le plus consommé, c’est le filet, explique ce dernier. Or quand on veut trouver une alternative, c’est souvent haché. Nous avons donc voulu offrir aux gens ce qu’ils ont l’habitude de manger. » C’est-à-dire un « filet végétal »… avec « la texture et le goût » du produit remplacé. Pour l’instant, Umiami propose uniquement une version « poulet », avant d’autres comme le poisson ou le bœuf.
Avec quels ingrédients ? De l’eau, de l’huile, des arômes naturels, de l’acide citrique, du sel et surtout… « principalement du soja », répond Emmanuel Romary, le directeur de l’usine de Duppigheim (Bas-Rhin) . Celle-ci a été inaugurée ce lundi avec sa ligne automatisée qui va permettre de sortir 80 millions de pièces, avec de nettes possibilités d’augmentations vues la superficie du bâtiment.
La production se décompose en quatre étapes. Dans la première, les ingrédients sont réhydratés et mélangés de façon à former « une pâte ». Puis, secret industriel donc interdit de prendre en photo la machine où cette bouillie est « texturisée ». « On arrive à fibrer le produit telle la viande. C’est une technologie unique et naturelle », assure encore Emmanuel Romary avant de continuer la visite. Pour une prochaine halte où les filets sont cuits et surgelés, avant d’être finalement pesés et mis en sachets.
Le tout par des machines encadrées d’opérateur, une cinquantaine au total sur le site. Tous en blouse blanche, avec charlotte et gants… De quoi parfois donner à l’usine des allures de celle de Tricatel, la célèbre industrie alimentaire du film L’aile ou la cuisse.
« C’est bluffant »
Mais pas de salades ou de poissons recomposés ici, seulement des filets qui ressemblent à s’y méprendre à ceux issus des poulets. Et avec quel goût alors ? Une dégustation était organisée ce lundi et les convives ont pour la plupart été agréablement surpris. « Si on ne me l’avait pas dit… », était la phrase qui revenait souvent, comme « c’est bluffant ».
Il faut dire aussi que les filets végétaux étaient cuisinés. Simplement snackés ou dans des pitas, avec du potimarron, etc. Umiami, « contraction de miam et d’umami, la cinquième saveur », revendique un millier de recettes possibles avec son produit. Et des débouchés commerciaux exponentiels.
Pour le moment, la marque s’exporte surtout aux Royaume-Uni, en Suisse, en Italie, aux Pays-Bas, et en Espagne. En France, pas encore de grande distribution. Seul un site Internet commercialise les fameux filets végétaux, contre environ 40 euros les 20 pièces. « Ce n’est pas nous qui fixons le prix mais les revendeurs. Cela dit, on veut être compétitif par rapport au poulet premium », assure Clémence Pedraza, la n°3 de la boîte, en en vantant les qualités nutritionnelles. « Le but, c’est vraiment de faire la transition alimentaire donc de permettre au maximum de consommateurs d’en acheter. »
L’Etat croit en tout cas beaucoup en la start-up. La banque publique d’investissement (BPI France) n’a cessé de l’accompagner depuis ses premiers pas et a consenti, au total, quelque 70 millions euros de subventions et prêts. « C’est un moment historique pour l’avenir de l’alimentation », a lancé Tristan Maurel en parlant d’un « produit révolutionnaire ». Demain, peut-être, la population mondiale ne mangera plus que ça.
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