C'était un chef audacieux et novateur, considéré comme l'inventeur de la « nouvelle cuisine » dans les années 1970 et salué depuis par la critique et nombre de ses pairs comme l'un des cuisiniers les plus talentueux du XXe siècle. Michel Guérard, triplement étoilé au Guide Michelin depuis 1977, est décédé à 91 ans à son domicile dans la nuit de dimanche à lundi.

Il a allégé les sauces sans en atténuer le goût

Premier chef à avoir fait la Une de Time Magazine aux Etats-Unis, il restera dans les mémoires pour avoir inventé un nouveau répertoire savoureux de « cuisine minceur » pour les gourmands soucieux de leur ligne, la fameuse « nouvelle cuisine » qui a permi d'alléger les sauces sans en atténuer le goût. C'est en inventant sa « salade folle », à base de foie gras qui se substitue à la vinaigrette, que le terme fut pour la première fois prononcé.

Né le 27 mars 1933 à Vétheuil (Val d'Oise), ce fils de bouchers doit abandonner très tôt ses études. Alors qu'il rêvait d'être médecin, il fait son apprentissage en pâtisserie à Mantes-la-Jolie. Meilleur ouvrier de France à 25 ans, il exerce ses talents au Crillon puis au Lido mais c'est dans un « boui-boui » de banlieue parisienne qu'il acquiert ses lettres de noblesse. En 1965, il achète à la bougie le « Pot-au-feu », petit bistrot nord-africain d'Asnières, du côté de Gennevilliers. Après des débuts difficiles, il y fait venir le Tout-Paris, décroche une, puis deux étoiles avant de s'installer à Eugénie-les-Bains dans les Landes en 1974, où son restaurant « Les Prés d'Eugénie » décrochera, trois ans plus tard, les trois étoiles du Guide Michelin et les quatre toques du Gault & Millau, sans jamais les perdre.

Une idée de la gastronomie qu'il voulait accessible

Malgré les récompenses et les honneurs, il n'a eu de cesse de vouloir rendre la sa cuisine gastronomique accessible au plus grand nombre. Il fut notamment le premier grand chef à s'associer à l'industrie agro-alimentaire en élaborant des plats surgelés pour la marque Findus de Nestlé, en inventant notamment le « Pithiviers feuilleté mousse de cresson et beurre blanc » qui fit le bonheur, dans son enfance, de l'auteur de ces lignes.

« J'ai eu une vie passionnante et passionnée », disait-il de son parcours, celui d'un enfant qui « a eu la ''chance'' d'avoir connu la guerre et d'avoir eu faim et froid pour permettre ensuite de relativiser tout le reste ».

Le confit de légumes du film « Ratatouille »

Ses plats emblématiques resteront sa « salade folle » (ou « gourmande ») inventée en 1968, son « loup en varech », un poisson cuit sans assaisonnement dans un nid d'algue (1972), son « homard à la cheminée », cuit à feu doux, faut-il préciser (1976), son « confit byaldi » avec de fines rondelles de légumes de méditerrannés, recette célébrée dans le film d’animation Ratatouille (1976), son « homard des pêcheurs de lune » plongé entier dans l'armagnac (2011) ou son « bœuf sur le bois et sous les feuilles », de nouveau cuit délicatement à la cheminée (2007).