Journée mondiale des intelligences animales : Les parents humains ont-ils à apprendre des parents animaux ?
grrrr•Un cycle de conférences est organisé ce samedi à la Cité des sciences et de l’industrie à Paris, pour la 6e Journée mondiale des intelligences animales. L’occasion de regarder comment les animaux se comportent comme parentsClio Weickert
L'essentiel
- La 6e Journée mondiale des intelligences animales se tient ce samedi. A cette occasion, la journaliste Yolaine de La Bigne organise un cycle de conférences autour des facultés souvent méconnues des animaux, à la Cité des sciences et de l’industrie à Paris.
- Elle y présentera notamment L’Animal parent (éd. Alesio), un livre collectif qui réunit 11 spécialistes du monde animal sur le thème de la parentalité.
- Education, matriarcat, entraide… Les parents humains ont-ils des choses à apprendre des parents animaux ?
Vous êtes jeune parent et entre les kilos de couches, la charge mentale quotidienne et les nuits hachées, vous ne voyez plus le jour… Ou alors, vos enfants ont bien grandi et votre problème à vous, c’est de trancher entre éducation positive et « time out » ? Mais comment ça se passe chez nos amis les bêtes ? Eles aussi, elles galèrent ? Ou au contraire, les parents humains ont-ils à apprendre des parents animaux ?
« Une des choses qui me fascine chez les animaux, c’est que c’est une grande école de la tolérance. La nature est exubérante, dynamique, intelligente, pragmatique… Elle s’adapte. Et nous, on est bourrés d’idées préconçues qui nous empêchent d’avancer. C’est la grande leçon que nous devons tirer », estime Yolaine de La Bigne, qui organise un cycle de conférences autour des facultés souvent méconnues des animaux, à la Cité des sciences et de l’industrie à Paris ce samedi, à l’occasion de la Journée mondiale des intelligences animales. Elle y présente notamment L’Animal parent (éd. Alesio), paru le 24 janvier, un livre collectif qui réunit 11 spécialistes du monde animal sur le thème de la parentalité. Education, matriarcat, solidarité… Les animaux ont des choses à nous enseigner.
Prenez soin des jeunes mères
Donner la vie, ce n’est pas rien. Dans notre monde, toute une équipe de sages-femmes, d’infirmières et de médecins obstétriciens peuvent s’affairer pour encadrer et accompagner l’accouchement. C’est aussi le cas chez les animaux marins où certains se soucient particulièrement du bien-être de la mère. « On a parfois l’impression qu’elles donnent naissance dans un coin, en fait non, elles sont vraiment aidées. Chez le cachalot, il y a carrément toute la famille qui vient, c’est tout un événement, explique Yolaine de la Bigne. Chez les dauphins, deux trois femelles viennent, un peu comme des tantes et des cousines. Elles aident la maman à respirer et quand elle vient d’accoucher et qu’elle est hyper fatiguée, elles prennent le bébé et s’en occupent pendant qu’elle se repose. »
Conseil à prendre : Proposez votre aide aux jeunes mères, apportez-leur des petits plats, occupez-vous de leurs tâches ménagères, prenez soin d’elles… Important : demandez-leur leur avis avant, on ne s’impose pas. N’est-ce pas, les belles-mères ?
Tchao le fantasme de la mère parfaite
Vous voyez ce mythe de la mamounette qui tombe en amour pour son bébé dès le premier regard et se dévoue corps et âme pour lui ? Spoiler : C’est loin d’être une évidence. Les cachalots l’ont compris et n’en font pas tout un foin. « L’océanographe François Sarano explique qu’il y a des mamans cachalots qui ne sont pas maternelles et d’autres qui le sont, sans toutefois être mères. Il donne l’exemple d’une baby sitter cachalot qui a gardé des générations de bébés. Elle n’a jamais eu de petits elle-même mais a gardé ceux des autres et a allaité un nombre incroyable de bébés », raconte l’autrice du livre L’Animal parent.
Conseil à prendre : On se détend avec ce fantasme de la mère parfaite, on ne se met pas la pression et on demande de l’aide autour de soi (dans la mesure du possible).
Des bras et du renfort
Si vous êtes jeunes parents vous avez déjà probablement entendu ce proverbe : « il faut tout un village pour éduquer un enfant ». En d’autres termes, pour s’occuper et faire grandir un bébé, il faut des bras et du renfort. Dans le monde animal, certains animaux ne se posent même pas la question. Comme chez les chevaux, où tout le monde prête main-forte pour garder les petits, les autres juments comme les étalons. « C’est très communautaire, ce sont des animaux très grégaires et le troupeau est très uni », souligne Yolaine de La Bigne. Elle ajoute : « Chez certains, le sens de la famille est hyper important. On voit aussi que les frères aînés peuvent jouer un vrai rôle, comme chez les suricates, les singes tamarins… Ils font du baby-sitting et aident beaucoup la maman. C’est aussi une transmission culturelle car le jeune va comprendre ce que c’est que d’élever un bébé en voyant ses parents et il va apprendre des choses qu’il va lui-même transmettre à ses petits. »
Conseil à prendre : Si on est en souffrance, on ne reste pas tout seul dans son coin et on n’hésite pas à déléguer des tâches aux personnes de confiance pour souffler un peu. Tout le monde y gagnera.
A bas le patriarcat
La nature a l’esprit bien moins étriqué que beaucoup d’humains. Chez les castors, le papa en pleine charge mentale se démène pour la maman et ses petits (ce qui pourrait surprendre certains papas humains). Il y a aussi des espaces de non-mixité dans la savane. « Il y a beaucoup de communautés de femelles, précise l’autrice. Les lionnes vivent en groupe et se synchronisent pour avoir des bébés en même temps. Ça leur permet d’allaiter et de garder les petits des autres pendant qu’elles vont chasser par exemple. C’est un modèle pour nous de tolérance de voir que tous les schémas familiaux sont possibles. »
Conseil à prendre : Stop à la rigidité et bye-bye le vieux monde.
« L’effet grand-mère »
Et si bien s’occuper des plus jeunes c’était aussi protéger les plus vieux ? Un même phénomène a été observé chez les éléphants, les girafes ou encore les orques. « Chez les animaux qui vivent entre femelles, elles sont dirigées par la plus vieille d’entre toutes, la matriarche. Si les animaux ont toujours un grand respect pour les seniors, c’est que ce sont ceux qui ont le plus de culture, qui savent, qui sont souvent les plus courageux. Chez les lionnes, la grand-mère aide les jeunes mères, enseigne aux petits, les protège, indique où il y a à boire… On s’est rendu compte que quand la grand-mère est tuée, par des chasseurs par exemple, ça met en péril tout le groupe. Tout d’un coup ils sont perdus et souvent ça crée un grand drame », précise Yolaine de La Bigne.
Conseil à prendre : Pour prendre soin de nos petits, préoccupons-nous aussi de nos aînés (oui, même de nos belles-mères).
Education positive ou time out ?
Attention on finit sur une question qui fâche : plutôt « time out » ou éducation positive ? On envoie réfléchir son enfant dans sa chambre ou on lui explique les choses à sa hauteur et on l’accompagne sur le chemin de l’autonomie ? Eh bien figurez-vous que les chevaux, eux, ont tranché. « Cécile Gilbert-Kawano raconte que le poulain est vraiment élevé par tout le troupeau et quand il fait une bêtise on le met au coin. On le repousse et il se retrouve un peu tout seul pour qu’il comprenne qu’il a fait une connerie… », rapporte Yolaine de La Bigne.
Autre exemple d’éducation, la maman ours, une main de fer dans un gant de velours. Elle élève seule son ou ses enfants pendant deux ans et leur apprend la vie comme personne. « Il y a des vidéos où par exemple, le petit doit traverser une rivière. La maman traverse, attend mais ne revient pas comme nous, on aurait un peu tendance à faire. Elle est au bout, elle l’encourage et il se débrouille tout seul. Il met le temps qu’il faut mais il y arrive. A deux ans, elle va laisser son petit vivre dans la nature et il doit donc savoir traverser une rivière, gravir une montagne, se défendre, trouver à manger… On dit beaucoup que c’est une mère exemplaire parce qu’elle est à la fois très tendre, très protectrice et en même temps exigeante parce qu’il faut préparer les petits à la dureté de la vie », précise l’autrice.
Conseil à prendre : N’abandonnez pas vos enfants dans la nature au bout de deux ans et ne tentez pas de leur faire traverser une rivière. Mais trouvez le juste dosage entre bienveillance et pédagogie pour leur permettre un jour de quitter le nid les yeux fermés.
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