AlimentationEst-ce vrai que « ça ne coûte pas plus cher de bien manger » ?

Produits les moins chers bourrés de sucre : Est-ce vrai que « ça ne coûte pas plus cher de bien manger » ?

AlimentationManger sainement demande souvent des efforts passés en cuisine, mais cela peut aussi coûter plus cher à la caisse
Anissa Boumediene

Anissa Boumediene

L'essentiel

  • Cette semaine, Foodwatch a comparé au sein de mêmes gammes de produits alimentaires les références les plus chères et les moins chères.
  • Et à chaque fois, les moins chères contiennent beaucoup plus de sucres ajoutés que les plus chères.
  • Pour une alimentation saine, on entend souvent qu’il faut se tourner vers des produits bruts, non transformés et moins chers. Mais est-ce vraiment plus économique de mieux manger ?

«Ça ne coûte pas plus cher de bien manger ! » Ça, c’est la théorie. Mais en pratique, c’est parfois un peu plus compliqué que ça. L’organisation de défense des consommateurs Foodwatch a analysé la teneur en sucre de douze catégories de produits vendus en supermarchés, selon leur gamme de prix. Résultat : les moins chères sont plus sucrées, dénonce-t-elle dans une étude publiée mercredi.

Et on ne parle pas de bonbons et de biscuits, mais de références dans lesquelles on n’imagine pas trouver des sucres ajoutés, à l’instar de la mayonnaise, des petits pois en conserve, du pesto ou encore des cordons-bleus. « Si votre budget est serré, vous ne pourrez pas faire le meilleur choix pour votre santé », s’est alarmée Audrey Morice, chargée de campagnes chez Foodwatch. Mais avec du temps passé en cuisine et quelques astuces, il est possible de bien manger tout en n’explosant pas son budget.

D’énormes écarts de prix sur les produits bruts

Les experts en santé et les chefs cuistots le martèlent : pour bien manger, la meilleure solution, c’est de cuisiner des produits bruts : ce que l’on gagne en budget en évitant les produits ultratransformés au prix finalement assez élevé au kilo, on le compense par du temps passé aux fourneaux pour concocter soi-même petits plats et goûters sains pour toute la famille à base de produits bruts, plus sains et moins chers.

Mais même en étant des pros du fait maison, acheter des produits bruts que l’on va cuisiner ne coûte pas le même prix selon ce que l’on choisit de mettre dans son panier. On peut ainsi acheter des filets de poulet à moins de 9 euros le kilo qui, à ce prix-là, seront souvent issus de volailles importées d’Europe de l’Est ou d’un pays hors UE, issues d’un élevage intensif, où les animaux ne voient pas la lumière du jour, sont confinés les uns sur les autres et reçoivent d’importantes doses d’antibiotiques pour éviter les maladies.

En version bio ou Label Rouge, garantissant des conditions d’élevage plus saines et éthiques, et une meilleure qualité nutritionnelle, le prix au kilo peut s’envoler à plus de 20 euros le kilo, voire dépasser les 50 euros en supermarché bio à Paris. Un prix difficilement accessible pour nombre de foyers. Conséquences : face à la flambée des prix alimentaires, en 2023, les Français ont réduit leur consommation de viande de 3,7 %, selon l’Agreste, le service de statistiques du ministère de l’Agriculture.

Des options moins chères et meilleures pour la santé

Heureusement, le tableau de la composition de nos assiettes n’est pas tout noir, même quand on a un budget serré. Quelques trucs et astuces permettent de réduire la facture tout en atteignant son objectif de mieux manger. On commence par privilégier les fruits et légumes de saison. Produits localement, donc moins chers que ceux importés du bout du monde, comme les mangues par avion qui coûte le prix d’un demi-poulet fermier, ni écolos, ni accessibles financièrement. On s’évitera aussi de payer plus de 8 euros son kilo de tomates bio cultivées sous serre chauffée. On attendra plutôt le retour des beaux jours pour remanger des tomates mozza.

Un réflexe qui, en plus d’être plus vertueux pour la planète, est meilleur pour notre santé : les fruits et légumes de saison, cueillis à maturité, couvrent à chaque saison nos besoins spécifiques en vitamines et minéraux. Ainsi, en hiver, kiwis et agrumes, dont c’est la pleine saison en ce moment, assurent nos besoins en vitamine C, ce qui renforce notre immunité et nous aide à mieux résister face aux virus saisonniers en embuscade. Selon l’Anses, pour la vitamine C, « l’apport nutritionnel conseillé pour les adultes est de 110 mg par jour, 120 pour les femmes enceintes, et 170 pour les femmes allaitantes ». En pratique, deux kiwis par jour suffisent à couvrir largement nos besoins. De quoi se protéger au passage du scorbut, maladie provoquée par une carence sévère en vitamine C, qui est en forte recrudescence notamment chez les enfants.

Et plutôt que d’acheter une sauce industrielle riche en sucre et en additifs chimiques, on optera pour une sauce maison réalisée à partir de tomates bio en conserve. Une solution économique et bonne pour la santé : ces tomates, cuites et conditionnées avec leur jus, sont encore plus riches en lycopène, un puissant antioxydant aux nombreuses propriétés, notamment anticancer de la prostate.

Les trucs et astuces pour réduire la facture

Autre astuce qui ravira les lève-tard du dimanche pour bien manger tout en épargnant son porte-monnaie : faire le marché à la cloche. En y allant peu avant que les commerçants ne remballent, on peut faire de bonnes affaires, avec souvent une baisse du prix au kilo ou des petits cadeaux du genre « deux pour le prix d’un » sur les salades et autres fruits et légumes vendus à la pièce.

Et puisqu’il n’y a pas de petites économies et qu’on devrait tous avoir le droit de manger sainement sans y laisser un rein, il existe aussi des moyens de manger bio sans se ruiner. C’est ce que propose La Fourche, épicerie bio en ligne. « C’est même notre raison d’être, de rendre accessible le bio à tous », souligne Lucas Lefebvre, cofondateur de l’enseigne. Mais comment ? « Le modèle économique de la marque repose sur l’adhésion, une cotisation annuelle, au prix de 59,90 euros, qui permet de réduire nos marges, tout en rémunérant justement les producteurs et en proposant des produits de qualité, bio, éthiques et respectueux de l’environnement et de la santé, à des prix jusqu’à 50 % moins chers que dans le commerce. On échange de la fidélité contre du pouvoir d’achat. Mais parce que nous savons que le coût de l’adhésion peut être un frein économique, elle est gratuite pour tous les foyers en situation de précarité ».

Pour aller plus loin, « nous avons aussi créé notre marque, avec notre gamme propre de produits, et à chaque création, nous associons nos adhérents via un questionnaire : ils peuvent influer sur la composition, la recette, l’origine des aliments, et donc le prix, explique Lucas Lefebvre. Cela nous permet de leur proposer des produits vertueux qui répondent à leurs attentes, comme du thon en boîte qui respecte les seuils européens de mercure, contrairement à la plupart des références du commerce. Mais aussi une très forte offre de vrac, de grand format, que nous conditionnons nous-mêmes, ce qui permet de baisser les prix : 30 % moins cher au kilo en moyenne ». Et les chasseurs de bonnes affaires pourront aussi se faire plaisir avec l’offre antigaspi, « qui nous permet de proposer des produits avec des dates courtes, par exemple de l’épicerie avec une DLUO de moins de trois mois, dont la grande distribution ne veut pas. Cela nous permet d’éviter que des produits de qualité et consommables en toute sécurité encore plusieurs mois ne finissent à la poubelle, et nous les proposons à nos adhérents avec des réductions allant jusqu’à 70 % ».