La mode passe à la casserole pour la Fashion Week de Paris

Fashion week de Paris : Gastronomie et mode qui se ressemblent, s’assemblent

COLLABSDeux experts décryptent pour « 20 Minutes » les raisons de l’attirance mutuelle entre les milieux du luxe et de la gastronomie
Léa Zacsongo-Joseph

Léa Zacsongo-Joseph

L'essentiel

  • De plus en plus de marques de luxe s’associent avec des chefs pour ouvrir des adresses dédiées à la restauration.
  • Frédéric Godart et Thomas Jaspers expliquent à 20 Minutes comment les deux milieux bénéficient de leurs images respectives et partagent des valeurs communes telles que l’excellence et l’artisanat haut de gamme.
  • La fusion entre la mode et la gastronomie donne des idées de collaborations créatives avec d’autres industries, comme le design, la musique ou le cinéma.

Chanel, Dior, Louis Vuitton, Armani ou même Ralph Lauren comptent parmi les marques de luxe qui ont déjà ouvert un restaurant, un food store, un café ou un salon de thé à leur nom. Éphémères ou permanentes, ces collaborations entre les milieux de la mode et la gastronomie sont de plus en plus fréquentes. Pour quelles raisons ? Quels avantages chacun de ces deux milieux en retirent-ils ?

« Pour les marques, c’est un mode de vie qu’elles souhaitent offrir, en plus de leurs vêtements » estiment Frédéric Godart, sociologue de la mode, professeur chercheur à l’école de commerce Insead, et Thomas Jaspers, fondateur de l’agence food et événementiel, Staff Meal. Un prolongement d’expérience haut de gamme que décryptent ces experts pour 20 Minutes.

Un mode de vie propre aux marques

En ouvrant l’Emporio Armani Caffè sur le boulevard Saint-Germain en 1998, Georgio Armani a posé les bases d’une relation durable entre la mode et la gastronomie. Au Figaro, le couturier parlait de « créer un style de vie Armani complet ». Et s’associer avec le chef Sicilien Massimo Tringali lui a permis de transposer son univers « du patron à l’assiette », confiait-il à Gastronomico.

« Derrière ces restaurants, l’idée pour ces marques est de fidéliser le client. Offrir une consommation expérientielle en plus d’une consommation matérielle, permet de maintenir un lien entre deux collections, explique Frédéric Godart. Les marques italiennes sont les premières à avoir ainsi renforcé leur soft power en s’associant à des chefs ».

Chanel a suivi en s’associant à Alain Ducasse en 2004 à Tokyo pour ouvrir le restaurant Beige. Leur objectif commun : valoriser le savoir-vivre à la française au Japon. Le restaurant est aussi devenu un exemple de savoir-faire en matière de conception de restaurants allié à une marque de luxe. En 2010, Ralph Lauren ouvrait de la même manière son restaurant de cuisine américaine Ralph’s avec l’ambition de devenir « le meilleur restaurant de sa catégorie à Paris ». Plus récemment en 2022, Louis Vuitton s’est associé au pâtissier Maxime Frédéric pour la création du café chocolaterie, LV dream, tandis que Dior a fait appel à Jean Imbert pour son restaurant Monsieur Dior sur l’avenue Montaigne.

L’œuf Christian Dior de Jean Imbert
L’œuf Christian Dior de Jean Imbert - Charles Negre

Une collaboration qui bénéficie à tous

« Les collaborations entre les chefs et les marques, c’est aussi une manière de bénéficier de l’image de l’autre », estime Thomas Jaspers, fondateur de l’agence food et événementiel, Staff Meal. On ne s’étonne pas de retrouver aux fourneaux les noms d’Amandine Chaignot (Rosy & Maria pour Carita), de Mory Sacko (Louis Vuitton à Saint-Tropez), de Juan Arbelaez (Café Messika) ou de Jean Imbert (Dior)…

« Ce sont des chefs dans l’air du temps et perçus comme des stars, souligne Thomas Jaspers. Le métier de chef vend du rêve et cela attire naturellement le luxe. Comme les deux industries sont en recherche permanente de nouveautés et de distinctions, c’est une manière pour elles d’explorer ensemble de nouvelles possibilités, sachant qu’elles se partagent les mêmes consommateurs. »

Un sens de l’artisanat en commun

Au-delà d’une simple stratégie commerciale bien pensée, la collaboration entre la mode et la gastronomie trouve également sa justification dans le partage de valeurs communes. « On parle d’excellence, de travail acharné et d’artisanat dans les deux disciplines », souligne Thomas Jaspers.

« La mode, tangible et sensorielle, offre un terrain de jeu exceptionnel pour les chefs qui bénéficient d’une totale liberté et proposent des créations uniques pour une marque, un événement ou une collection, créant ainsi une expérience sur mesure », estime Thomas Jaspers. Au Café Messika installé pour l’été (au moins jusqu’au 5 octobre) sur la terrasse du 7e ciel du Printemps Haussmann, la maison de joaillerie propose une carte unique signée par Juan Arbelaez qui marie saveurs et textures dans un ingénieux jeu d’opposition entre le chaud, le froid, le sucré et le salé.

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Au restaurant et café Rosy & Maria, de la maison de beauté Carita, la cuisine « parisienne, délicate et sourcée » est servie par la cheffe Amandine Chaignot. Au café du 19M, un espace d’exposition initié par la maison Chanel, l’ambiance se veut conviviale et chaleureuse, idéale pour une pause gourmande grâce à la carte créée par la cheffe Laurine Marty. Mais la mode sait aussi se passer de chefs renommés, pour privilégier des espaces de restauration plus simples, à condition qu’ils collent à leur image.

Agnès b, avec Le Pain grillé, propose ainsi un café-restaurant « comme à la maison » avec des produits locaux et de saison. La Maison Kitsuné avec son café Kitsuné, moderne, cosmopolite et accueillant, met en avant l’esprit du petit café intime.

Cette approche va au-delà d’un simple partenariat entre la mode et la gastronomie selon Frédéric Godart qui imagine un avenir encore plus riche en collaborations créatives : « Tout est envisageable. Des restaurants et des marques qui s’associent ensuite avec des musiciens, des cinéastes ou des créateurs de jeux vidéo. Tout devient possible. »