«Marseille, capitale du crime?»: Frédéric Diefenthal raconte le temps des caïds
DOCUMENTAIRE•Après s’être intéressé aux crimes célèbres de Paris, Frédéric Diefenthal arpente la cité phocéenne pour remonter son histoire et évoquer les grandes figures, de Carbone et Spirito à Francis le Belge...Annabelle Laurent
Heureusement, le titre garde son point d’interrogation. «On ne voulait surtout pas laisser penser que Marseille est une zone de non droit», prévient Frédéric Diefenthal, qui a arpenté pour 13ème Rue les quartiers de celle qui est devenue sa «ville d’adoption», après y avoir tourné huit films, dont les trois Taxi. Alors que la capitale avait été évoquée à travers ses faits divers célèbres pour un premier documentaire (et un livre), Marseille était, pour l’équipe, une réponse logique. «D’un point de vue coppolesque ou scorsesesque, il y avait Marseille ou la Corse», commente le comédien de 46 ans.
Diefenthal en bad boy
«Pour comprendre le milieu d’aujourd’hui, il faut en revenir aux origines»: le documentaire passe ainsi en revue les figures légendaires du grand banditisme: Carbone et Spirito (1925-1944), les frères Guérini (1944-1968), Gaëtan Zapa dans les années 1970, puis le duo Jack Le Mat-Francis le Belge de 1984 à 2000, et l’affaire du juge Michel et sa croisade contre la French Connection, qui fait parallèlement l’objet du film La French avec Jean Dujardin et Gilles Lellouche. Avocats, historiens, anciens policiers, gardiens de prison et habitants se succèdent en interviews entrecoupées d’images d’archives et de plateaux de Diefenthal qui joue au bad boy. «Je m’amuse! Il fallait garder une certaine distance. Ceux à qui ça ne plaît pas, je les emmerde».
Un sujet délicat
«Ce qui m’amusait, c’était de remettre un peu les points sur les i. A Marseille il y a les voyous d’un côté, et la vie de l’autre». Le sujet est délicat, surtout quand les caméras des chaînes d’info sont passées par là pour de nombreux reportages et une couverture médiatique parfois décriée, à l’image de l’Envoyé Spécial qui avait fait polémique à Grenoble. «Ces médias là alimentent le système. Ils font de l’empirisme pour faire de l’audience», rétorque Frédéric Diefenthal.
«On les regretterait presque»
Que peut nous apprendre le passé de la cité phocéenne sur son présent? Quel héritage ont laissé ces caïds devenus légendaires? «Quelque part, d’avoir eu des grands parrains des grandes figures du banditisme, ça nous rend fiers», reconnaît le manager du groupe 400 Coups. «Les gangsters de l’époque avaient une autorité, un effet pacificateur, commente Maître Sophie Bottaï, l’avocate de Zampa. Ils faisaient peur, et ils régulaient la délinquance qui partait de tous les côtés». A l’heure des réglements de compte à la kalachnikov, alors que le démantèlement de la French Connection a mis à fin à l’empire des caïds, le documentaire, construit comme un polar, prend le risque d'en conclure qu'«aujourd’hui, on les regretterait presque».