Depuis 2004, Stéphane Saunier a reçu près de 400 artistes dans le studio de la Plaine-Saint-Denis où est enregistrée l’émission «L’album de la semaine», diffusée le samedi à 11h25 sur Canal +. Le programmateur musical de la chaîne a de quoi être fier: Amy Winehouse y a donné son premier concert français en live, Arcade Fire et Arctic Monkeys aussi. Entretien.

Dix ans d’émission télé, c’est très rare!

On a la chance sur Canal + de ne pas avoir l’audimat comme ligne de mire. Même si l’émission est diffusée en clair, on doit satisfaire nos abonnés. On essaye de donner aux gens un programme de qualité et qui est nulle part ailleurs.

Comment expliquez-vous qu’il n’y ait pratiquement plus de musique live à la télé?

Je pense que ça dépend du bon vouloir des dirigeants des chaînes. S’ils ont envie de faire de la culture ou pas… Mais c’est vrai que sur les autres chaînes que Canal + c’est un peu plus compliqué de proposer des émissions de musique live à la télévision, car elles ne font pas d’audience.

Pourquoi? Tout le monde aime la musique pourtant…

Combien d’artistes aujourd’hui vendent un million d’albums? Très peu. Un million de téléspectateurs sur une chaîne, c’est un très mauvais score. Donc voilà…

Est-ce que ce n’est pas aussi une question de moyens? Faire du live, ça a un coût…

Oui. Et à côté de ça, les émissions de téléréalité rapportent beaucoup d’argent. Entre les produits dérivés, les tournées, ça permet aux maisons de disques et aux télés de s’y retrouver.

Combien coûte la production d’un numéro d’une émission musicale de Canal +?

On est mutualisé avec trois autres émissions, donc ça couple les frais, mais une «Musicale», par exemple, c’est 400.000 euros. [Pour comparer, un épisode de téléréalité peut coûter 30.000 euros seulement].

Il y a des exceptions. Les émissions de variétés comme les hommages à Piaf ou «Les Enfoirés» marchent très bien…

Les gens ont peut-être besoin d’avoir un repère. Le record de mon autre émission, «La Musicale», en termes d’audiences, c’était pour la spéciale Gainsbourg.

Quel regard portiez-vous sur «Taratata» et «One Shot Not» à l’époque où les émissions étaient encore diffusées sur France 2 et Arte?

Elles étaient intéressantes. Ca nous a permis de ne pas nous endormir sur nos lauriers, d’essayer d’être créatif, en avance. J’étais plus fan de l’émission de Manu Katché que de l’émission de Nagui. Je n’aime pas quand l’animateur est plus star que les artistes. Après, plus il y a de musique à la télé, mieux je me porte. C’est bien d’avoir cette exposition pour les artistes.

A vos débuts, est-ce que vous aviez une émission musicale de référence?

Oui, «Chorus», présentée par Antoine de Caunes et Jacky [sur Antenne 2 entre 1978 et 1981]. Je regardais cette émission à l’Empire. Je trouve que c’est la meilleure émission de télé qui n’ait jamais existé. Il y a eu tellement d’artistes, un spécial rock français… C’était du live, c’était super.

Vous en avez vu des artistes jouer en dix ans d’«Album de la semaine»! Quels sont les moments les plus inoubliables?

Björk m’a surpris en venant la première année! Un moment émouvant aussi, c’était la venue de Bobby Womack avec Damon Albarn (Blur) et des musiciens de TV on the radio. C’est une des rares fois où j’ai eu la larme à l’œil. Il y a eu aussi Them Crocked Vultures avec Dave Grohl, John Paul Jones (Led Zeppelin) et Josh Homme (Queens of the Stone Age). C’était incroyable, ils n’étaient pas là pour vendre des disques mais pour faire un jam sans aucune prétention.

Quel artiste rêvez-vous de recevoir?

Tom Waits. J’adorerais. Mais il n’aime pas la télé. Et comme son album a bien marché récemment il a décidé de ne pas tourner…

Samedi 22 mars à 00h10, Canal+ diffuse le concert de Queens of the Stone Age au Zénith de Paris capté par les équipes de «L'album de la semaine» le 14 novembre dernier.

Dimanche 23 mars à 22h30, la chaîne cryptée propose de revivre le meilleur de l'émission avec «La nuit des 10 ans de L'album de la semaine».