BALEINE SOUS GRAVILLONEn Alsace, une histoire de concasseur fait grand bruit

Alsace : « Un climat assez délétère »… A Muhlbach-sur-Munster, une histoire de concasseur fait grand bruit

BALEINE SOUS GRAVILLONCertains habitants craignent des nuisances pérennes liées à l’implantation d’une entreprise de BTP sur une friche qui fait face au village
Luc Sorgius

Luc Sorgius

L'essentiel

  • L'arrivée d'un concasseur à Muhlbach-sur-Munster a mis une partie des habitants en émoi.
  • Active pendant trois semaines entre mars et avril, la machine a servi au terrassement d'un chantier d'implantation d'une entreprise locale de travaux publics.
  • Un collectif d'habitants de ce village niché dans une vallée encaissée appelle le maire à donner davantage d'informations sur le sujet, car il craint que les nuisances sonores soient pérennes.

Il a disparu du paysage mais, à entendre un riverain, c’est comme si le bruit résonnait encore dans la vallée. A Muhlbach-sur-Munster (Haut-Rhin), l’arrivée d’un concasseur sur le site de l’ancienne décharge à la fin mars a provoqué de sacrés remous dans cette commune de 800 habitants, nichée dans une vallée encaissée.

Au point d’engendrer la création d’un collectif baptisé « Muhlbach en campagne », dont l’objectif est « l’organisation d’une réunion publique ouverte à toutes et à tous pour une information précise sur l’aménagement du site », situé en face du village.

« Communication zéro »

C’est là le nœud du problème : depuis plusieurs mois, un fossé s’est creusé entre certains habitants et le maire Patrick Althusser. En cause : la décision de la municipalité de céder les terrains en friche de l’ancienne carrière à l’entreprise de travaux publics Fritsch/Werey. Ou plutôt « la communication zéro avec la municipalité » qui s’en serait suivie, déplore un membre du collectif, alors que l’entreprise souhaite y installer des bureaux et des endroits pour stocker véhicules et matériels.

« Ce qui est marrant », ironise un témoin, « c’est que le même maire qui faisait le buzz il y a deux ans pour défendre les bruits de la nature autorise aujourd’hui qu’une entreprise de BTP s’installe en face du village pour y faire des activités de recyclage de matériaux de chantier ». En 2020, l’élu a fait installer un panneau au message caustique à destination des gens qui se plaignent des nuisances sonores liées à la vie rurale.

Depuis, la situation s’est sérieusement tendue avec une partie de la population, mise « devant le fait accompli » avec l’arrivée d’un concasseur début mars, et la crainte que cette installation se pérennise. « Il n’y aurait pas de sujet s’il y avait des dialogues », peste un membre du collectif.

« Des activités qui font du bruit, on n’en veut pas ! »

« On l’a su quand les travaux ont commencé à devenir sérieux. Le bruit du nouveau chantier est intolérable, ça rend fou ! », souffle une membre de « Muhlbach en campagne » qui souhaite rester anonyme « à cause du climat assez délétère » : « Que l’entreprise s’installe pour des bureaux et des ateliers, on n’est pas contre. Mais des activités qui font du bruit, on n’en veut pas ! »

Alors que le concasseur a quitté la place fin avril, le collectif reste dans l’expectative : « Il n’y a eu aucune réaction officielle, simplement des rumeurs. Jamais le maire n’a voulu organiser une réunion d’information, alors qu’on aimerait juste qu’on réponde à nos questions, qu’on sache ce qu’il en est ! » À terme, le collectif craint que l’entreprise n’implante « des activités bruyantes de recyclage (concassage, broyage, criblage) ».

« Je ne comprends pas ce qu’ils n’ont pas compris… »

Face à ces critiques, Patrick Althusser est circonspect : « Pour nous, c’était clair ! Je ne comprends pas ce qu’ils n’ont pas compris… » Le maire évoque « un entretien que le collectif a eu avec les deux gérants de l’entreprise » durant lequel ces derniers ont expliqué leur démarche : « La seule activité susceptible de faire du bruit, ce sera du broyage de végétaux et de bois qui serviront au chauffage des locaux. Ce ne sera pas une activité commerciale, et le bruit n’a rien à voir avec celui d’un concasseur ! »

Quant au fameux concasseur, il réapparaîtra « fin octobre, début novembre pendant quelques jours, avant de disparaître définitivement », indique l’élu qui confirme que le projet de l’entreprise est de construire « des bureaux, ainsi que des locaux de stockage de matériels et d’engins ».

« A un moment donné, ça suffit »

S’il reconnaît « une possible faille dans la communication », Patrick Althusser est passablement agacé par les reproches qui lui sont adressés : « Le conseil municipal a pris la décision, tous les privés sollicités ont vendu leurs terrains et l’administration a étudié le projet. Qu’on arrête de dire que c’est la faute du maire ! »

De son côté, Olivier Kirchenmeyer, gérant de BTP Fritsch/Werey, se dit « fatigué de tout ça » : « On a déjà rencontré les gens du collectif, mais à un moment donné ça suffit. On est une petite entreprise et là, il y a toute une polémique alors qu’on veut juste construire des nouveaux locaux. » Une certitude : à Muhlbach-sur-Munster, s’il n’y a pas baleine sous gravillon, il y a au moins friture sur la ligne.