SANTELa salle de shoot de Strasbourg va héberger certains de ses usagers

Strasbourg : La salle de shoot va héberger certains de ses usagers

SANTEHuit places pour dix personnes vont être ouvertes pour héberger les usagers de drogues en précarité à Strasbourg
Nils Wilcke

Nils Wilcke

L'essentiel

  • Trois ans après sa création, la salle de consommation à moindre risque Argos de Strasbourg, va ouvrir un hébergement pour ses usagers.
  • Dans un premier temps, huit places pour dix personnes devraient être ouvertes, vingt places devraient être aménagées à terme.
  • L’absence d’hébergement et le développement de pathologies nécessitant un suivi médical sont les deux principaux critères d’admission.

C’est une première en France. Trois ans après sa création, la salle de consommation à moindre risque – appelée aussi salle de shoot – Argos de Strasbourg, va ouvrir un hébergement pour ses usagers. Les toxicomanes qui se rendent dans ce centre pour réduire les risques sanitaires liés à la consommation de drogues pourront loger sur place.

Dans un premier temps, huit places pour dix personnes devraient être ouvertes : six chambres individuelles et deux chambres doubles. Et dix de plus à terme. L’idée a germé chez les responsables de la structure dès l’ouverture du centre, en 2016. D’autant que le centre ne désempli pas. Selon le dernier bilan établi en novembre (voir l’encadré ci-dessous), 899 personnes sont passées au quai Ménachem-Taffel depuis l'ouverture du centre.

Dix places vont être ouvertes dans un premier temps à Strasbourg.
Dix places vont être ouvertes dans un premier temps à Strasbourg.  - Nils Wilcke

Les chiens sont les bienvenus

« Beaucoup de nos usagers ne rentrent pas dans les dispositifs “classiques” à cause de l’interdiction de consommer des drogues ou d’accueillir leurs chiens, explique Gauthier Waeckerle, directeur de l’association Ithaque, qui gère la salle. Alors que pour ces personnes, leur chien, c’est souvent tout pour eux. » C’est pourquoi les amis à quatre pattes pourront faire partie de l’hébergement, « dans la limite de trois ou quatre animaux à la fois ».

Les futures chambres de l'hébergement sont encore en travaux.
Les futures chambres de l'hébergement sont encore en travaux.  - Nils Wilcke

Quels sont les critères d’admission ? L’absence d’hébergement et le développement de pathologies nécessitant un suivi médical. « Ce type de lieu n’existe nulle part en France », indique le docteur Alexandre Feltz, adjoint au maire chargé de la santé. « Les besoins sont réels, poursuit le médecin. Certains développent une infection pulmonaire ou une hépatite, des pathologies que l’on peut traiter chez soi avec une infirmière, mais pas pour ceux qui sont à la rue. »

Difficile de se soigner quand on n’a pas de toit

« La prévalence de l’hépatite C est en baisse mais il reste 20 à 25 % de prévalence chez les usagers », complète le directeur Gauthier Waeckerle. Ce type d’hépatite se soigne aujourd’hui en quelques mois à condition de bien suivre son traitement. Difficile quand on n’a pas de toit à soi. La salle de shoot est-elle en butte à des critiques, comme cela est le cas à Paris ou à Marseille ? Laquelle a abandonné le projet sous la pression de riverains. « Pas vraiment, répond Gauthier Waeckerle. Nous sommes installés au sein d’un hôpital, il n’y a pas d’habitations donc pas de polémiques ».

A terme, l’association Ithaque souhaite loger 60 à 80 résidents par an, avec une rotation tous les deux mois. A leur sortie, les usagers seront dirigés vers un dispositif dédié aux personnes en errance et souffrant d’addictions, lequel compte actuellement 100 places à Strasbourg.

Encore incertain il y a un an, le budget couvrant l’aménagement du lieu a été bouclé. Au total, ce sont 750.000 euros d’investissement, partagés entre la ville, l’Agence régionale de santé (ARS) et les hôpitaux universitaires de Strasbourg. Reste à finaliser celui qui permettra à l’hébergement de fonctionner.

Qui sont les usagers de la salle de shoot à Strasbourg ?

« Il est difficile de dresser un portrait type de l’usager à Strasbourg mais nous accueillons bien entendu des personnes en grande situation de précarité », explique le directeur Gauthier Waeckerle. Sur les 899 personnes passées par le centre depuis son ouverture (bilan établi en novembre 2019), 667 sont des usagers de l’espace de consommation, dont 23,1 % de femmes et 0,6 % de personnes transgenres. Les hommes restent majoritaires et représentent 76,3 % des toxicomanes accueillis au centre. Le nombre de passages journaliers oscille entre 50 et 80.