UNIVERSITEA Strasbourg, on veut croire que le zombie est un bon modèle d'étude

Strasbourg: Le zombie est-il un bon modèle d'étude pour les neuroscientifiques?

UNIVERSITEUne conférence sur le cerveau des zombies comme modèle d'étude est proposée au grand public samedi 16 mars à Strasbourg
Alexia Ighirri

Alexia Ighirri

L'essentiel

  • Le zombie serait-il le modèle parfait pour étudier le fonctionnement du cerveau? Des Strasbourgeois se sont penchés sur la question.
  • « C’est un bon modèle d’étude pour, entre autres, comprendre le fonctionnement du cerveau et essayer de voir quelles sont les conséquences d’un certain nombre d’altérations de structures cérébrales sur le plan fonctionnel, débute Jean-Christophe Cassel. Ceci dans l’idée de comprendre un peu mieux les maladies neurodégénératives. » Du type, Alzheimer, Parkinson ou la maladie de Charcot.
  • Dans le cadre de la Semaine du cerveau, une conférence grand public sur ce sujet est organisée à la librairie Kléber de Strasbourg samedi 16 mars à 14h

A l’université de Strasbourg, le zombie est un modèle d’étude comme un autre. Peut-être même un modèle de meilleure qualité encore quand il s’agit d’évoquer le fonctionnement du cerveau. C’est ce que pensent deux Strasbourgeois spécialistes en neurosciences : le professeur Jean-Christophe Cassel et le docteur Laurent Nexon animeront, dans le cadre de la Semaine du cerveau, une conférence grand public samedi 16 mars (14h) à la librairie Kléber de Strasbourg.

« Non seulement c’est un bon modèle d’étude mais on l’utilise ici à l’université de Strasbourg pour, entre autres, comprendre le fonctionnement du cerveau et, en particulier aussi, essayer de voir quelles sont les conséquences d’un certain nombre d’altérations de structures cérébrales sur le plan fonctionnel, débute Jean-Christophe Cassel. Ceci dans l’idée de comprendre un peu mieux les maladies neurodégénératives. »

Le zombie, « un être exceptionnel »

Le professeur énumère alors Alzheimer, la démence à corps de Lewy, Parkinson, la maladie de Huntington, la sclérose latérale amyotrophique (ou maladie de Charcot) ou encore « un certain nombre d’ataxies cérébelleuses, qui touchent le cervelet ». Selon lui, le zombie offre la chance d’étudier sur un même modèle – qui s’apparente en plus au primate humain — des questions touchant à une multitude de maladies neurodégénératives ou développementales. « Un être exceptionnel qui ne court pas les rues », ajoute Laurent Nexon.

Il suffirait presque d’observer le comportement du mort-vivant pour comprendre. « Il a une faim inextinguible : il peut manger, manger, manger, ça ne conduira jamais à la satiété. Quand il se déplace, il claudique, il est lent. Il n’a pas d’inhibition, il a une mémoire qui fonctionne de façon catastrophique…, liste Jean-Christophe Cassel. Quand vous conjuguez ces différentes caractéristiques comportementales, forcément vous vous dites qu’il doit y avoir deux, trois choses qui ne tournent pas rond dans son cerveau. Et comme on sait comment est organisé le cerveau, ça nous donne une indication assez claire des différentes régions cérébrales dans lesquelles il faut aller essayer de chercher. »

En gros:

  • la démarche du zombie = une dégénérescence cérébelleuse,
  • le manque d’inhibition = une dégénérescence du lobe frontal
  • les problèmes de mémoire = une dégénérescence des lobes temporaux et de l’hippocampe
  • l’insatiabilité = altérations au niveau de l’hypothalamus.

« Le cervelet du zombie a la taille d’une noisette, il manque 90 % des neurones. Le lobe temporal est atrophié lui aussi : ça explique qu’il a des difficultés majeures sur le plan amnésique et sur le plan émotionnel », complète Jean-Christophe Cassel. « Vous lui faites une projection de Titanic, à aucun moment il ne verse une larme », image encore Laurent Nexon.

Des expérimentations, vraiment ?

Comment peuvent-ils en être si sûrs ? « On a vérifié par la suite ces hypothèses par diverses expériences », confie le docteur en neurosciences. A partir de là, il faut se laisser porter par le récit des chercheurs (puis lire encadré ci-dessous). Accrochez-vous.

Pour avancer sur leurs recherches, les deux hommes ont décidé d’attraper un zombie. « Mais parce qu’on ne pouvait en approcher sans risquer de se faire mordre et de devenir zombie soi-même. On a fabriqué un outil spécifique pour le tuer à distance en esquintant a minima le cerveau », racontent-ils. Puis, pour les capturer vivant, ils mettent au point un système pointu de détention, inspiré de celui des cages à lions ou tigres dans les cirques. Pour se protéger, ils enfilent « une armure », pour faire des prélèvements, « on tend à manger, le zombie passe le bras à travers la cage et on lui coupe un doigt »… Ils ont réponse à tout. Alors, y a-t-il eu des ratés ? Des erreurs ? Des drames ? Sur ce sujet, les chercheurs restent mystérieux : « Rien de significatif ».

Des scientifiques un peu perchés, nous direz-vous ? C’est aussi ce que pensaient les organismes chargés de contribuer au financement de leurs recherches. Jusqu’à ce que les deux Strasbourgeois gagnent en crédibilité au détour d’un faits divers : « On a eu un coup de bol phénoménal quand un des quatre prix Nobel de Strasbourg, incontestable sur le plan scientifique, a été poursuivi un soir par deux zombies ». Au final, ils ont quand même réussi à lever 1,5 million d’euros. Un bon coup de pouce pour la recherche de ces pionniers en la matière, qui peuvent croire à leur tour au prix Nobel si dans 30 ans, comme ils l’envisagent, des médicaments pour les maladies neurodégénératives sont commercialisés, grâce aux tests de molécules sur les zombies. « Le modèle de l’avenir », assurent-ils. A prendre au 22e degré!

20 secondes de contexte

Vous l'aurez compris, Jean-Christophe Cassel et Laurent Nexon ne manquent pas d'imagination et ont décidé d'avoir recours à la fantaisie pour annoncer leur conférence grand public proposée samedi à Strasbourg (et si vous ne l'avez vraiment pas compris: il n'y a pas de zombies enfermés dans un sous-sol du campus).

Si vous êtes adepte de leur esprit, sachez qu'ils en usent sur scène: ils ont notamment écrit et mis en scène une pièce de théâtre, baptisée «On cherche encore», qui traite du financement de la recherche. Tout un programme.