VIDEO. Affaire Grégory: A Lépanges-sur-Vologne, «des gens savent des choses dans le village»
JUSTICE•Au village du petit Grégory, à Lépanges-sur-Vologne, comme sur les lieux où son corps a été repêché il y a près de 33 ans, les habitants veulent tourner la page et ne veulent pas s’emballer, même si le drame plane toujours…Gilles Varela
Après avoir franchi plusieurs cols, avoir compté pour tuer le temps les nombreuses scieries qui longent les départementales qui fendent les sombres forêts de sapins, voici Lépanges-sur-Vologne, dans les Vosges. A première vue, rien de particulier.
Une route sépare en deux le village, sillonné sans cesse par des poids lourds comme des milliers d’autres. Des petites maisons plus ou moins cossues sur les hauteurs. Rien d’angoissant et pourtant l’endroit n’est pas sans rappeler une des pages les plus sombres de l’histoire judiciaire française : l’affaire du petit Gregory, assassiné le 16 octobre 1984.
« Des gens savent des choses dans le village »
« Même quand je suis en vacances, quand on me demande où j’habite, la conversation finit toujours par des "ah, le village du petit Grégory" », explique Jacky en revenant de la pêche. Difficile en effet pour ses habitants de tourner la page même si depuis des années, l’affaire n’est plus évoquée dans les familles.
« On n’en parle plus, mais c’est toujours là, il reste des mystères et des choses sont cachées, reconnaît le sexagénaire. Il y a quelque chose qui plane sur le village, c’est reparti pour un tour. Avec ce rebondissement, on va en reparler mais il ne faut pas s’emballer. Il y a tellement eu d’erreurs, il n’y a rien de vraiment nouveau, wait and see ! ».
Un peu plus loin, dans l’avenue principale, un habitant à sa fenêtre ne s’épanchera pas sur le sujet. Tout juste sous-entend-il que « des gens savent des choses dans le village ». Oui mais quoi ? Pas de réponse.
« Il faut voir, ne pas s’emballer »
A la boulangerie, on affirme ne pas en parler. « Je n’entends jamais de conversations sur ce sujet et de toute façon les rumeurs ne m’intéressent pas, c’est du passé, explique Patricia la boulangère. D’ailleurs, il n’y a pas eu plus de journaux vendus ce matin d’ailleurs, peut-être même moins ».
Même son de cloche à la charcuterie du village. Pour son propriétaire, « Il faut tourner la page, stop. On n’en parle plus depuis longtemps ».
« « Les jeunes ne savent même plus de quoi il en retourne, poursuit-il. Ça a sauté une génération. Et il ne faut pas s’emballer cette fois encore. C’est une vieille histoire, je comprends que c’est important pour les parents du petit Grégory, de savoir la vérité pour faire leur deuil. Mais les gens en ont assez et sont passés à autre chose. Ils ont d’autres priorités. Mais si les criminels tombent, c’est bien. » »
« Bien sûr qu’on en parle à chaque fois qu’il y a du nouveau »
« Bien sûr que l’on en parle dans le village, à chaque fois qu’il y a du nouveau. Beaucoup de choses ont été dites. On va voir, il faut rester prudent », reconnaît Stéphanie la coiffeuse. A quelques encablures de là, près de l’ancienne maison de la famille Villemin, en revanche, un résident n’hésite pas à faire part de son indifférence : « Je n’en ai rien à foutre et je n’ai rien à dire, je n’étais pas là à l’époque. » Fin de la discussion.
« Il faut laisser ça de côté, considère Emilie, qui promène son chienà Docelles où le corps de l’enfant a été trouvé dans la Vologne il y a près de 33 ans. Il faut laisser cet enfant et sa famille en paix. J’ai bien peur que l’on fasse à nouveau des erreurs et que l’on mette à nouveau des innocents en prison. Il y a si longtemps. »
Mais on peut aussi s’attendre à tout. A Aumontzey, où résident des membres de la famille mise en garde à vue mercredi, Roger, un septuagénaire, bêche son jardin et s’interroge. « Je ne comprends pas, attendre aussi longtemps pour les mettre en garde à vue, alors qu’ils habitaient à quelques mètres de la famille Laroche, estime-t-il. Pour l’instant, il n’y a rien de vraiment concret. Ce sont des gens courtois avec qui je parle de tout et de rien parfois. Mais bon l’habit ne fait pas le moine, on ne sait jamais. Il faut voir, même si ce n’est jamais bon pour un village des histoires comme ça. C’est lassant. »