Basket: En route pour la NBA, Frank Ntilikina sera-t-il le nouveau Tony Parker?
SPORT•L'avenir du jeune meneur de la SIG Strasbourg s'écrira aux Etats-Unis...Alexia Ighirri
Les deux sont nés en Belgique, portent le maillot de l’équipe de France et évoluent au poste de meneur. Voilà pour les points communs évidents entre Tony Parker et Frank Ntilikina. Difficile toutefois de ne pas pousser le rapprochement entre les deux basketteurs plus loin : l’avenir du meneur de la SIG Strasbourg, 18 ans, va s’écrire outre-Atlantique (il est officiellement inscrit à la Draft NBA), et tous espèrent qu’il suivra le chemin exemplaire tracé par la star du basket et des Spurs « TP », de 16 ans son aîné.
Avant de s’envoler pour les Etats-Unis (Frank et la SIG ont d’abord une demi-finale de play-offs à jouer cette semaine contre l’Asvel… dont Tony Parker est le président), 20 Minutes a étudié la comparaison avec les consultants George Eddy et Jacques Monclar ainsi qu’avec le coach de la SIG et sélectionneur de l’équipe de France Vincent Collet.
Physique. Commençons par l’évidence. Ceux qui ont l’habitude de les regarder jouer le savent : physiquement, Parker (1m88, 84kg) et Ntilikina (1m94, 88kg) ce n’est pas vraiment la même chose. « Frank a plus le gabarit d’un combo guard alors que Tony est un meneur pur, débute Vincent Collet. Sa morphologie et ses mensurations sont adaptées à la NBA. Il est très long avec une envergure de plus de 2m10. C’est stupéfiant pour un joueur de cette taille-là et c’est très gênant pour ses adversaires directs. » En attaque comme en défense.
Style de jeu. La défense, c’est là l’une des grandes différences : le Strasbourgeois est meilleur défenseur, s’accordent à dire nos trois experts. Ils sont aussi sur la même longueur d’ondes concernant les styles de jeu des deux meneurs. « Tony est plus agressif vers le panier, Frank est plus gestionnaire », résume Jacques Monclar.
Une analyse que détaille Vincent Collet : « Frank est un meneur qui par certains côtés garde les qualités des meneurs d’antan, très soucieux de l’organisation du jeu. Alors que Tony dès qu’il avait la balle il ne pensait qu’à battre son adversaire direct et il le faisait mieux que n’importe qui. Car il avait cette vitesse et ce premier pas fulgurant. »
George Eddy complète : « Tony a basé son jeu sur la vitesse d’exécution, la pénétration vers le panier, mais il n’était pas à l’aise avec les tirs à mi-distance. Alors que Frank est déjà adroit dans ce secteur, et même aux tirs à trois points. Il a un jeu plus complet. »
Reste que le jeune Strasbourgeois doit, de l’avis des trois techniciens, travailler son agressivité. « Par rapport à une ligue où on est beaucoup sur le rapport en un contre un, il est pour l’instant parfois un peu timoré », souligne son coach, même s’il note des progrès cette saison.
>> Vendredi en play-offs, le Strasbourgeois s’est encore illustré et notamment en défense face au meilleur joueur du championnat D.J. Cooper
Etat d’esprit. En dehors du terrain, les deux garçons sont appréciés. « Ils ont une forme de contact chaleureux avec le public », confirme Vincent Collet, impressionné par Frank par sa « maturité et son aisance à s’exprimer en public ». Jacques Monclar poursuit : « Frank est un garçon qui a la tête sur les épaules. Et qui, comme sur le terrain, franchit les choses étape par étape. Il n’est ni bruyant, ni silencieux, mais résolument quelqu’un qui est heureux de ce qu’il lui arrive. »
La différence alors avec Tony Parker, selon George Eddy : « Tony était aussi sûr de lui : à 15, 16 ans, il disait à ses copains qu’il jouerait en NBA. Il aime bien parler alors que Frank, lui, est plutôt timide. Il ne va pas se vanter. Peut-être qu’il doit vaincre ça encore, parce qu’il doit montrer qu’il a confiance pour s’imposer en NBA. »
Parcours. Pour les consultants, on a affaire à « deux talents précoces » avec la similitude d’être « drafté jeunes après avoir joué en ProA ». Tony Parker avait été choisi en 28e position, on annonce Frank Ntilikina autour de la 10e. Et peut-être même « entre la 5 et la 10 » nous souffle-t-on. Il pourrait être le Français le mieux classé (le pivot Joakim Noah avait été drafté en 9e). « Frank est beaucoup plus coté que Tony à l’époque, parce qu’il y avait peu de joueurs étrangers et français en NBA. Aujourd’hui la France est le pays qui fournit le plus de joueurs étrangers, les recruteurs regardent ici pour voir les jeunes qui deviendront les prochains Parker, Noah, Batum, explique George Eddy. Tony a eu la chance d’être choisi par les Spurs. Le risque pour Frank c’est d’être choisi plus haut mais par une équipe plus faible. Mais ça lui offrira alors plus d’opportunité de temps de jeu. »
Sans oublier leur trajectoire sous le maillot bleu : si la carrière de Tony Parker n’est plus à présenter, Frank Ntilikina a lui brillé avec les sélections jeunes, couronné notamment d’un titre de champion d’Europe U18 où il a été sacré MVP de la compétition. A l’heure de la retraite internationale pour « TP », le Strasbourgeois fait sa première apparition dans la liste élargie de la « Team France Basket » chargée de préparer toutes les échéances jusqu’aux JO de 2020. « On pense que très rapidement, il pourrait répondre à l’une ou l’autre des convocations. Et puis son profil, de bon défenseur, peu de joueurs sur les lignes arrières l’ont », explique Vincent Collet. Le sélectionneur prévient toutefois : « Je comprends aussi qu’on puisse rêver d’avoir un nouveau Tony Parker, et moi le premier, mais de grâce laissons le s’épanouir à son rythme. Ce serait bien qu’on laisse Frank être Frank Ntilikina ».