Football: Avant Strasbourg-Lens, le lanceur de chants du Racing, Chonchon, raconte sa vie de capo
SPORT•Capo du Racing depuis désormais 16 ans, Sébastien alias Chonchon, 36 ans, s’apprête à ambiancer une fois de plus le kop strasbourgeois samedi contre Lens, dans un choc attendu côté tribunes…Bruno Poussard
Il n’a plus vraiment l’air ronchon. Surnommé « Chonchon » dans ses premières années en tribunes, le râleur a bien grandi. A l’heure de la réception du RC Lens par le Racing, Sébastien, membre des Ultras Boys 90 depuis 20 ans, n’a rien perdu de sa passion. Au bureau directeur du groupe chargé de l’ambiance du kop jusqu’en 2008, ce Strasbourgeois en est le capo depuis l’an 2000.
Le quoi ? « Mais si, quand tu regardes un match à la télé, tu vois le mec torse nu dos au terrain qui lance et structure les chants ? Eh bien, c’est moi », a-t-il l’habitude de répondre aux profanes. Un job (bénévole et indépendant) à risque, presque, pour la voix notamment… « J’en chie, rigole-t-il. Après 30 secondes j’ai parfois la voix cassée. »
Une voix à la Marge Simpson et une visite chez un ORL à une époque
En 16 ans, l’ambianceur de la grosse tribune du Racing n’a néanmoins dû abandonner qu’une ou deux fois en cours de match. « Il y a un moment, on m’appelait Marge Simpson parce qu’il m’arrivait de partir très haut dans les aigus, reprend Chonchon. Cela a duré un peu, et comme je suis un brin hypocondriaque, j’ai même fini par aller voir un ORL ! »
Mais il n’a rien trouvé. Et le désormais jeune papa est encore là, mégaphone à la main sur son perchoir, plus de 250 déplacements derrière lui et aucun match à domicile raté. Une figure connue. Des autorités, aussi, en ces temps de répression accrue envers les assidus supporters aux quatre coins de l’Hexagone. Car la vie d’ultra est surveillée.
« Les supporters, tout le monde s’en fout, personne ne nous défend »
En tant que simple lanceur de chants, Sébastien s’est ainsi déjà vu demander sa carte d’identité par les services de renseignement. Les membres du kop strasbourgeois ont pourtant une très bonne image, mais le capo craint qu’ils puissent un jour être interdits de déplacement à Troyes ou à Metz (en cas de montée), par exemple. Comme ça.
« Sans faire les victimes, les supporters, tout le monde s’en fout, personne ne nous défend, pense-t-il. Les interdictions de déplacements bafouent la liberté de circulation en France sans que personne ne dise rien. Et quand deux ou trois font des actes débiles comme à Metz l’autre jour, toute une tribune se retrouve souvent sanctionnée. »
Une solidarité entre ultras, des échanges constructifs avec le club
A l’image de la banderole déployée en soutien de la Brigade Loire du FC Nantes, les supporters français sont essentiellement solidaires. Sébastien, par exemple, correspond encore avec le désormais ex-capo des Magic Fans de Saint-Etienne. A Strasbourg, il a gagné en crédibilité au fil des ans, comme l’ensemble de son groupe structuré.
Les Ultra Boys 90 ont aujourd’hui de « bonnes relations » avec Marc Keller, le président du club, jugé « à l’écoute » par Chonchon, dans la logistique dans le civil. Malgré un petit point d’achoppement autour du mot « Alsace » aux côtés du nom historique du « Racing club de Strasbourg », les ultras peuvent dire ce qu’ils pensent en réunion. Constructif.
Une implication à quasi-plein-temps à ses débuts, autour des tifos et des chants
S’il a connu d’autres périodes plus complexes (celle du dépôt de bilan avec le président Jafar Hilali, en premier lieu), Sébastien a lui aussi pris du recul, avec l’âge. Loin de l’époque où il préparait les tifos, lançait des idées et proposait des chants, peu après un déplacement un Metz et sa découverte de la Meinau en 95. Par la volonté d’être acteur.
« J’ai de suite été impressionné par les chants en continu, le virage qui s’enflamme, raconte-t-il les yeux encore pétillants, 20 ans après. Je voulais aider à peser sur les matchs. » Il a alors découvert une bande de potes, même s’il a dû faire sa place. « On n’est pas des monstres, reconnaît-il. Mais c’est vrai qu’il y a un vrai côté macho, viril… »
Seulement des bribes de match en quelques années
Son implication a pesé lorsqu’il a candidaté, à la fin des nineties, avant sa nomination à la place d’un des deux capos d’alors sur le départ. Depuis, il ne voit que des bribes de match. « On se retourne quand même pour tâter la température, adapter les chants », ajoute Sébastien qui a vécu à son poste montées et finales de Coupe de France.
Avec la nouvelle tribune du kop, le capo doit également s’adapter, devant un public plus large et légèrement plus féminin qu’avant. « Il faut être plus communicatif, explicatif aujourd’hui. Il faut un peu éduquer pour avoir une tribune de supporters. » Le pari du changement est en bonne voie. Chonchon place pourtant la barre encore plus haut.