INTERVIEWAlexis Lebrun veut « bousculer l’hégémonie asiatique »

Tennis de table : Avec son frère Felix, Alexis Lebrun veut « bousculer l’hégémonie asiatique »

INTERVIEWLe Français Alexis Lebrun, 19 ans, a récemment battu le numéro 1 mondial, le Chinois Fan Zhendong, pour se hisser au 18e rang du classement mondial de tennis de table
Propos recueillis par Nicolas Camus et Antoine Huot de Saint Albin

Propos recueillis par Nicolas Camus et Antoine Huot de Saint Albin

L'essentiel

  • Chaque jeudi, « 20 Minutes » reçoit un ou une athlète qui rêve de podium aux JO 2024 dans son émission Twitch LCTC. Cette semaine, il s’agit d’Alexis Lebrun.
  • A 19 ans, le pongiste a réalisé l’exploit de battre le numéro 1 mondial Fan Zhendong, une performance jamais réalisée depuis 25 ans.
  • Avec son plus jeune frère Felix, ils s’entraînent en espérant atteindre les sommets du tennis de table mondial, réservés aux Asiatiques.

Les frères Lebrun, un vent de fraîcheur sur le tennis de table français. Alexis Lebrun, 19 ans, a récemment gagné 200 places au classement mondial pour se hisser au 18e rang. Il s’entraîne quotidiennement avec Felix, son petit frère de 16 ans déjà classé 30e mondial, avec qui il se lance des défis pour venir bousculer l’hégémonie asiatique de la discipline. Celui qui a justement battu le numéro 1 mondial, le Chinois Fan Zhendong, il y a quelques semaines, s’est confié, dans « Les Croisés tu connais », sur cet exploit jamais réalisé par un français depuis 25 ans.



On a beaucoup parlé de vous quand vous avez battu le numéro un mondial, Fan Zhendong, est-ce que c’est ça qui vous a fait prendre conscience que tout est jouable au plus haut niveau ?

Forcément, ça aide de battre le numéro 1 mondial. Mais ça faisait un petit moment que j’étais persuadé que je pouvais jouer tout le monde. Après, de là à battre les tout meilleurs Chinois, c’est autre chose. Je me suis prouvé que j’étais capable de le faire une fois, maintenant il faut réussir à répéter ce genre de performances pour faire des médailles sur des grosses compétitions.

Est-ce que vous abordez les matchs différemment depuis cette victoire ?

Non, j’essaye de les aborder pareil. De ne pas me mettre plus de pression par rapport à ça. C’était un super match, j’ai joué à un super niveau, il ne faut pas que je change ma manière de faire. Elle a plutôt bien fonctionné jusqu’à la donc j’essaye de rester pareil.

Est-ce que vous vous imaginiez battre ce genre de joueur aussi tôt à 19 ans ?

Non, forcément. Si on m’avait dit ça il y a deux ans, je ne l’aurais pas cru. C’est un truc de fou et je suis super content d’avoir pu faire des performances comme ça.

Vous avez récemment gagné 200 places au classement mondial, est-ce qu’il y a une place à se faire au milieu des Asiatiques ?

Pour l’instant, ils dominent largement. Ils sont 8 dans le top 10, mais il y a des places à prendre. Il faut y aller pour bousculer cette hiérarchie.

Est-ce que vous partez avec un sentiment d’infériorité par rapport à eux, est-ce qu’on arrive à reculons dans les compétitions face à leur domination ?

Non, moi je n’ai jamais eu ça, plutôt avec pas mal d’envie. Se dire il y a des choses à faire et réussir à bousculer ça, plutôt que de la peur de se dire que les Asiatiques sont plus forts. C’est plutôt l’envie d’aller les battre.

Votre frère est 30e mondial à 16 ans, votre père était top 10 Français, vous avez toujours baigné dans le tennis de table en fait…

J’ai commencé à y jouer à trois ans avec mon père qui était entraîneur. Je l’ai vite suivi, j’ai vite pris les raquettes et j’ai toujours continué à jouer. J’ai fait un peu de basket et pas mal de tennis jusqu’à mes 10 ans, après il a fallu choisir et j’ai préféré le ping-pong.

Est-ce qu’aujourd’hui on peut vivre du tennis de table en France ?

Oui, c’est professionnel donc on peut en vivre en France. Depuis que je suis né, il y a des joueurs professionnels.

Est-ce que vous avez l’impression de lutter à armes égales avec les Asiatiques, en termes d’infrastructures, d’entraînements ?

On ne lutte pas à armes égales on va dire, ils ont beaucoup plus de moyens. Ils ont aussi plus de licenciés, donc ils ont plus de chances d’avoir des très bons joueurs. Et ils ont des moyens illimités, donc c’est compliqué de rivaliser. Mais ça ne nous empêche pas d’essayer de faire notre mieux, et de trouver différentes idées pour compenser ce manque de moyens. Pour arriver par nous-même à développer notre style, et les embêter avec ça.

Est-ce qu’être à deux avec votre frère, c’est plus le côté cool qui l’emporte ou plus le côté concurrence ?

On est en concurrence, mais on le vit plutôt bien, c’est plutôt qu’il y a le côté cool. Ça nous permet de parcourir le monde à deux, et de jouer contre les meilleurs joueurs tous les deux ensemble. Je trouve que c’est un point fort déjà sur l’entraînement d’être à deux, ça nous permet de ne pas galérer pour trouver des adversaires. Et on échange beaucoup, on essaye pas mal de se conseiller. Même si on est en concurrence, notre but est d’avancer le plus loin tous les deux ensemble. Et après, si c’est lui le plus fort, ou moi, c’est entre nous. Mais le but c’est qu’on soit le plus haut possible.

Qui le plus fort à l’entraînement ?

[Rires] Le plus souvent c’est moi en confrontation directe. On se fixe plein de défis, on se charrie beaucoup, on essaye de se dépasser l’un et l’autre. Quand Felix me bat, il vient me chambrer, et inversement, donc il y a une petite concurrence mais ça reste très bon enfant et on en rigole beaucoup.

Pourquoi Felix joue avec la prise porte-plume, à la chinoise, chez les Européens ça ne se voit pas beaucoup ?

Felix, c’est assez particulier, c’est un des seuls européens sans origine asiatique à jouer de cette façon-là. C’est parce que quand il était petit il y avait un Chinois qui jouait au club d’Istres et qui s’entraînait à Montpellier. Felix avait 4 ans, il l’a vu joué et l’a pris comme idole. Il a voulu le copier et jouer en porte-plume. Je ne pense pas qu’il y a une bonne prise ou une mauvaise prise. Si les Chinois jouent comme ça, c’est qu’il y a aussi des avantages.