TENNISA 16 ans, Mirra Andreeva arrive pour tout casser sur le circuit féminin

Roland-Garros : Bouille d’enfant, grand sourire et gros talent… A 16 ans, Mirra Andreeva arrive pour tout casser

TENNISOpposée ce jeudi à Diane Parry au deuxième tour de Roland-Garros, la toute jeune Russe Mirra Andreeva, âgée de 16 ans, est présentée comme un prodige qui ne demande qu’à faire son trou chez les grands
Aymeric Le Gall

Aymeric Le Gall

A Roland-Garros,

Vous faisiez quoi, vous, à 16 ans ? Mirra Andreeva, elle, colle des trempes à des joueuses du top 30 mondial et cela ne semble pas la surprendre outre mesure. Opposée ce jeudi à la jeune Française Diane Parry (20 ans), de quatre ans son aînée tout de même, au deuxième tour de Roland-Garros, la gamine au visage poupon et au sourire naïf expédie la pression comme elle éclate les records de précocité.

« Je m’entraîne tous les jours et je travaille pour ça. Un jour ou l’autre ça devait arriver et mieux vaut tôt que tard. Je ne peux pas dire que je vis un rêve, c’est normal », déclarait-elle après avoir éclaté aux yeux du monde lors du dernier tournoi de Madrid, lors duquel elle a scalpé tour à tour la Canadienne Leylah Fernandez, finaliste de l’US Open en 2021, Beatriz Haddad Maia, tête de série numéro 13 du tournoi, puis Magda Linette (tête de série numéro 17) avant de céder face à la numéro 2 mondiale Aryna Sabalenka en 8es.

A Paris, celle-ci a roulé sur les qualifs sans perdre le moindre set, pas le temps de niaiser, avant de composter le billet retour de l’Américaine Alison Riske-Amritraj, 85e mondiale, là aussi en deux sets (6-2, 6-1) et cinquante-six minutes de jeu.

« Elle va toujours bien ! »

A l’image de sa joueuse, qu’il entraîne dans son académie cannoise depuis plus d’un an, quand toute la famille Andreeva a décidé de poser ses balluchons dans le sud de la France, Jean-René Lisnard n’a pas eu besoin de se pincer pour y croire. « Quand on la suit comme moi au quotidien, on n’est pas surpris comme peut l’être le grand public qui la découvre et qui se dit ‘oh putain, c’est quoi ce phénomène ? On savait qu’elle était capable de battre des tops joueuses, analyse-t-il sereinement. Avant d’arriver à Madrid elle avait gagné deux tournois et elle était sur une série de 13 victoires de suite. Elle est arrivée lancée, en plus elle aime bien les grands événements, pas le genre à se dégonfler devant la pression, le contexte. »

S’il n’hésite pas à qualifier la gamine de « prodige », il n’est pas non plus tombé de l’armoire en la voyant jouer la première fois. « Ce n’est pas la joueuse impressionnante qui tape bim, bam, boum, mais on voyait bien qu’elle avait des facultés pour son âge à tenir la balle dans le terrain, à sentir le jeu. » Ce qui plaît à Jean-René Lisnard, c’est la mentalité de sa joueuse. « Elle va toujours bien. Vous arrivez le matin et vous lui demandez comment ça va, elle vous répond toujours ‘fantastique !’. Ça fait plaisir parce que des gens qui vont mal, qui ont ci, qui ont ça, qui se plaignent, on en croise quand même pas mal. Elle, c’est tout le contraire, on est en présence de quelqu’un qui est motivé de se lever le matin pour aller bosser. »

Il est vrai qu’elle dégage quelque chose de rayonnant partout où elle passe, à l’image des différents plateaux télé sur lesquels elle est de plus en plus invitée. En tant que compétitrice acharnée, Andreeva a rapidement compris que cette bonhomie naturelle pouvait aussi lui servir sur le terrain : « Tout le monde joue très bien et parfois c’est quand quelqu’un est un peu moins bien mentalement que la différence se fait. Donc la joueuse qui essaie de rester positive tout le temps a plus de chance de gagner », expliquait-elle après Madrid.

Des parents qui n’empiètent pas sur le sportif

Parmi ses autres qualités, son coach met en avant une capacité d’apprentissage hors du commun. Cette fille est ce qu’il appelle un « projet éponge ». Explications : « Elle absorbe tout et très vite et elle met tous les conseils qu’on lui donne immédiatement en application, avec elle, contrairement à d’autres, pas besoin de répéter deux fois la même chose. Et comme la sélection naturelle se fait beaucoup là-dessus dans ce milieu, elle sort du lot aujourd’hui. » Ah oui, ce qu’on ne vous a pas encore dit, c’est que les Andreeva sont livrées par paire. A ses côtés, sa sœur aînée de 18 ans, Erika, 121e joueuse mondiale, soit 21 rangs devant sa cadette, s’entraîne également au Tennis Club Elite Tennis Center de Cannes.

« Elles s’entendent très bien, elles s’encouragent, elles se motivent, pour le moment elles en sont à se tirer vers le haut, pourvu que ça dure ! Même s’il y a forcément un peu de concurrence entre elles, je trouve que c’est très sain entre elles », raconte Jean-René Lisnard. Cela s’explique aussi par des parents qui font tout pour mettre leur progéniture dans les meilleures conditions, d’où ce déménagement en France pour marcher dans les traces de Daniil Medvedev, le plus connu des (nombreux) pensionnaires russes de l’académie cannoise, le tout sans jamais interférer sur le travail des coachs. « Ils ont l’intelligence de ne pas empiéter sur un terrain qu’ils ne connaissent pas, salue Lisnard. Pour l’instant ils sont à leur juste place, après il y a toujours des trucs à redire mais des parents qui ne font pas d’erreur ça n’existe pas. »

Reste à savoir si Mirra Andreeva réussira à confirmer les espoirs les plus fous placés en elle. Pour ça, il faudra résister à tout ce que ce milieu à de polluant, la célébrité, les gros contrats, l’argent et le risque inhérent soit de péter un plomb et d’exploser en vol, soit de tomber dans un confort qui peut être dévastateur. « Rester au top, s’habituer à cette drôle de vie, absorber tout ce qui se passe autour sans se laisser bouffer, c’est la marque des plus grands, acquiesce l’entraîneur français. Ça, c’est la partie invisible : savoir ce qu’ils ont au fond d’eux. Ça, on ne le saura qu’avec le temps. » Mais, de ce que nous confie son coach, ses ambitions sont « très, très élevées », et comme « c’est une gamine mature et intelligente », on peut espérer que ce ne soit pas qu’une étoile filante.