D’un de nos envoyés spéciaux à Lille,

Ce ne s’est pas fait tout seul, mais on n’y est presque. Mis en orbite par la victoire de la paire Gasquet-Herbert samedi, les Bleus ont désormais deux points devant eux pour enfin ramener cette satanée Coupe Davis à la maison après 16 ans d’absence. Ce sera d’abord à Tsonga de tenter sa chance contre Goffin, puis à Gasquet ou Pouille de prendre le relais si nécessaire. Lequel des trois a le plus de chance de libérer tout un pays dimanche après-midi ? 20 minutes fait les comptes.

Jo Wilfried Tsonga

Pourquoi ça pourrait être lui ?

Le 15e joueur mondial pète la forme, il l’a prouvé contre Darcis vendredi. A ce niveau, sur indoor, Tsonga vaut top 5 sans problème. Cette saison, il a remporté trois de ses quatre titres dans les mêmes conditions. Devinez le nom d’une de ses victimes en finale ? David Goffin (à Rotterdam). Vous en voulez encore. Le numéro 1 français va rentrer sans aucune pression sur le court, puisque pour une fois, on ne lui demande pas de sauver la patrie. Thierry Ascione, son entraîneur, n’y voit que du positif:

« C’est idéal. Il peut se lâcher, parce que si jamais ça se passe mal, il y a une cartouche supplémentaire. A un moment donné il a espéré ça depuis dix ans, il y est. Jo a montré que des gros matchs il pouvait en sortir, et c’est le moment d’en sortir un demain. En étant proche de lui, j’ai confiance en lui pour faire de belles choses contre Goffin ».

Qu’est-ce qui pourrait compliquer la tâche ?

Goffin, justement. Le Belge a démembré Pouille vendredi en lui jouant du violon. Le finaliste du masters n’a jamais été aussi fort, et il a l’habitude de devoir tenir le rôle du sauveur en Coupe Davis. On va dire qu’à niveau de jeu égal, ce qui serait déjà une sacré perf’de Tsonga, le 7e joueur mondial semble être capable de pousser la machine encore un cran plus haut. Sébastien Grosjean, vainqueur de l’épreuve en 2001.

« « David a été impressionnant contre Lucas, mais ça sortait moins bien au début, il s’est vraiment libéré quand il est passé devant. Il sait qu’il doit faire un sans-faute, et je suis surpris qu’il n’ait pas aligné en double. Après, Goffin habitué de ramener l’équipe à 2-2, il l’a fait contre l’Australie en demi-finale. La gestion des émotions sera importante ». »

Comment il devra s’y prendre ?

« La clé du match, c’est comment va fonctionner le service de Jo, est-ce qu’il va pouvoir le matraquer et lui imposer sa puissance. Il va falloir le faire exploser ». Merci pour le conseil, Nicolas Escudé.

Le taux de probabilité pour que ce soit lui qui ramène le trophée ? 30 %

Richard Gasquet

Pourquoi ça pourrait être lui ?

Le tigrounet de Sérignan n’aurait jamais dû jouer cette finale. Enfin, disons qu’il partait de loin et qu’il a gagné sa place dans les derniers jours du stage. La façon dont il a géré son match avec Herbert plaide pour lui. Il a été le plus régulier et celui qui a offert la meilleure qualité de jeu sur la durée. Gasquet est aussi nettement plus expérimenté que Pouille, et s’il fallait en envoyer un pour jouer le match d’une vie dimanche soir à 2-2, la logique réclamerait d’épargner ça au petit nouveau. Thierry Champion, son ex-entraîneur:

« « Si Richard est dans l’équipe, c’est parce qu’il y avait une possibilité de rentrer pour le dernier simple. Je pense que la victoire en double, psychologiquement, va lui faire du bien. Emotionnellement, ce n’était pas simple et je trouve que dans l’ensemble il a très très bien tenu, il a amené de la sécurité dans ce double. Il est dans une bonne dynamique et ça peut compter dans l’esprit de Noah ». »

Qu’est-ce qui pourrait lui compliquer la tâche ?

A priori, pas Darcis, diminué et complètement hors du coup vendredi. En revanche, on est moins catégorique sur le petit diable qui rôde quelque part dans la tête de notre Ritchie national. Vous savez, celui qui lui fait parfois perdre tous ses moyens quand il y a un truc à aller chercher au bout ? Une encyclopédie en plusieurs volumes retrace les plus belles défaites en cinq sets de Gasquet depuis le début de sa carrière. Elles commencent à dater, c’est vrai, mais certaines réputations ont la peau dure.

Comment il devra s’y prendre ?

Oublier qu’il joue une Coupe Davis et que tous les espoirs de la nation reposent sur lui. Sinon, jouer comme samedi, ça devrait suffire.

Le taux de probabilité pour que ce soit lui qui ramène le trophée ? 60 %

Lucas Pouille

Pourquoi ça pourrait être lui ?

Le Nordiste est le prochain leader de l’équipe de France de Coupe Davis. Autant l’habituer tout de suite à devoir mettre les cojones sur la table du salon. Toujours positif, Pouille n’avait pas l’air plus abattu que ça par sa défaite inaugurale contre Goffin. Mieux, il a tout de suite réclamé de pouvoir se refaire la cerise en simple. « Si on est à 2-2 dimanche, j’ai envie de rapporter un point ce week-end et je vais essayer de me préparer pour ça. Je veux garder le positif pour me préparer à un éventuel cinquième match ». « Si Lucas dit qu’il est bien et que ce n’est pas parce qu’il a perdu ce match qu’il faut penser qu’il est perdu lui-même, on peut le reconduire », appuie Jean-Paul Loth, ancien capitaine de Coupe Davis.

Qu’est-ce qui pourrait lui compliquer la tâche ?

La gestion émotionnelle d’un cinquième match décisif dans une finale de coupe Davis, face à un adversaire invaincu dans ce scénario (cinq victoires en cinq matchs pour Darcis le dimanche). Apparu très fragile sur ce plan lors de la demi-finale contre les Serbes en septembre, Pouille a le profil parfait pour choper le syndrome Paul-Henri Mathieu. Une maladie terrible qui s’abat sur le jeune joueur français sur le point de remporter la Coupe Davis contre un gars moins fort que lui.

Comment il devra s’y prendre ?

Si Pouille devait rentrer sur le terrain dimanche dans un contexte brûlant, on a qu’un seul conseil à lui donner : prendre le score et prier très fort pour que Darcis ne soit pas touché par la grâce.

Le taux de probabilité pour que ce soit lui qui ramène le trophée ? 10 %