« Quand on se fait traiter de bougnoule, ce n’est pas une bagarre », confie Yannick Larguet, agressé par Chalureau
RUGBY•Agressé à Toulouse avec un de ses amis par l’international tricolore Bastien Chalureau, Yannick Larguet soutient le caractère raciste de l’acte du joueur sélectionné au Mondial par Galthié20 Minutes avec AFP
Fatigué d’entendre son agresseur Bastien Chalureau s’exprimer dans les médias sans recevoir de contradictoire, l’ancien joueur de rugby Yannick Larguet a choisi de prendre la parole, maintenant que le Mondial de rugby est terminé et qu’il ne risque plus de polluer l’environnement des Bleus. « Je me suis tu durant la Coupe du monde, même si j’ai été extrêmement sollicité. Le Mondial en France est une chance inouïe, supporter et préserver l’équipe de France était ma priorité. Je m’efforçais aussi de protéger ma famille. Mais là, ce n’est plus possible. Quand je lis qu’il affirme que les victimes mentent et quand j’entends que cette histoire, ce n’est rien d’autre qu’une bagarre, qu’une altercation… », a expliqué Larguet à L’Equipe.
Agressé par l’international français alors qu’il rentrait chez lui avec un ami, Nassim Arif, ancien rugbyman lui aussi, dans la nuit du 30 au 31 janvier 2020, dans le centre-ville de Toulouse, Yannick Larguet n’en revient pas que Chalureau maintienne, comme il l’a encore fait récemment lors de son procès en appel, que l’agression n’avait aucun caractère raciste. « Quand on se fait frapper par-derrière en rentrant dans un parking, en se faisant traiter de bougnoules, ce n’est pas une bagarre. C’est de la couardise la plus extrême. Dans une bagarre, il y a deux personnes face à face qui veulent en découdre. La sémantique est importante. Là, c’est une agression motivée », a insisté l’ex-ailier ou centre, âgé de 43 ans.
« Ne plus rien laisser passer »
Interrogé sur ce qu’il a ressenti en voyant Bastien Chalureau être appelé par Galthié pour pallier le départ de Paul Willemse, blessé, à la Coupe du monde, Larguet confie s’être « senti seul ». « J’ai halluciné. J’ai été choqué par le silence, par cette hypocrisie latente des médias, des instances, et, enfin, par le côté anachronique et tardif de la polémique. Je connais bien certains membres du staff des Bleus, et j’ai toujours mis un point d’honneur à les épargner, à éviter ce sujet. Mais je me suis senti seul. Comme Nassim d’ailleurs. »
Aujourd’hui, s’il sort du silence, c’est aussi pour dénoncer le racisme dans le rugby de manière générale. « Il faut aussi absolument fuir et s’éloigner de cette vérité qui n’en est pas une : 'Le racisme n’existe pas dans le rugby.' Ce n’est pas vrai. Demandez aux gamins de couleur, à certains professionnels. Tout le monde sait, mais personne n’agit. Ça fait deux lignes dans un journal, et deux jours après, c’est oublié. Il faut, selon moi, accompagner, éduquer les jeunes à l’âge où ils sont en mesure de comprendre leurs erreurs, dès l’école de rugby où il faut travailler à éradiquer certaines attitudes et paroles, et en tirer parti avant de sanctionner sans expliquer. Il ne faut plus rien laisser passer. »