Stade Toulousain: Avec Pierre Pagès, le joker médical est aussi pharmacien
RUGBY•Pharmacien de profession, Pierre Pagès a mis son métier entre parenthèses pour tenter l’aventure du rugby professionnel, en passant de Blagnac (Fédérale 1) au Stade Toulousain…Nicolas Stival
L'essentiel
- Le demi de mêlée de 28 ans a signé un contrat de joker médical pour suppléer l’international Antoine Dupont.
- Passé par le Stade Toulousain chez les jeunes, Pierre Pagès se verrait bien poursuivre quelques années dans le rugby pro.
Il a parlé après l’entraîneur William Servat et ses 49 sélections en équipe de France. Il a ensuite laissé la place au double champion du monde All Black Jerome Kaino, puis au grand espoir Romain Ntamack. Devant une dizaine de journalistes, Pierre Pagès a participé à sa première conférence de presse avec le Stade Toulousain ce jeudi à Ernest-Wallon, deux jours avant le choc contre le Racing 92.
« Cela fait bizarre de se retrouver là », n’a pas caché le demi de mêlée, qui a changé d’univers cet été. Jusque-là, le joker médical d’Antoine Dupont passait ses semaines derrière le comptoir d’une pharmacie de Balma, entre deux matchs de Fédérale 1 (troisième division) avec Blagnac.
Samedi face à La Rochelle, il a disputé les 24 premières minutes de sa carrière en Top 14. A déjà 28 ans. Même si le Stade a plié sans rompre devant la furia rochelaise (victoire 33-26), l'expérimenté néophyte n’a pas raté ses débuts, avec une redoutable efficacité défensive malgré un gabarit ordinaire (1,80 m, 80 kg). « 24 minutes de bonheur », résume Pagès. « A ce niveau, tu ne dois rien rater. Le moindre relâchement, le moindre plaquage manqué se paie cher. »
« En Fédérale 1, il est clairement au-dessus »
Pour une fois, parler de « parcours atypique » n’est pas galvaudé. « Pierre mérite ce qui lui arrive, c’est un bosseur, humble, souligne Benoît Trey, le président de Blagnac. En Fédérale 1, il est clairement au-dessus, avec une passe extraordinaire pour ce niveau. Il est intelligent, il va vite, et c’est un gros défenseur, très courageux. »
Quand Antoine Dupont a laissé son genou droit sur la pelouse de Saint-Denis, le 3 février lors de France - Irlande, c’est vers Anthony Méric que l’encadrement stadiste s’est d’abord tourné pour remplacer le prodige. Puis le joker médical prêté par Toulon est revenu sur la Rade. Et Pagès a été appelé début juillet, après avoir déjà participé à plusieurs entraînements durant la saison à Ernest-Wallon.
Car Blagnac et son imposant voisin ont resserré leurs liens depuis que Frédéric Michalak a repris les rênes du club « caouec » fin 2016, avec Benoît Trey et Christophe Deylaud comme manager. Ce dernier, ouvreur iconique des Rouge et Noir dans les années 90, a conseillé Pagès aux dirigeants toulousains.
Déjà passé par le Stade Toulousain chez les jeunes
Un retour aux sources pour l’enfant de Cazères, qui avait déjà évolué au Stade « pendant cinq ans, de cadets B à Reichel. » « Mon premier coach m’avait dit : "Tu as fait le plus simple, signer au Stade Toulousain. Le plus dur, c’est d’y rester". »
Effectivement… Pour y revenir, ça n’a pas été simple non plus, avec des passages par Albi, où Pagès a grappillé huit petites minutes de Pro D2 en 2012, Castanet et Blagnac, donc, depuis 2015. « Si ce n’est pas arrivé plus tôt, c’est peut-être parce que je n’étais pas prêt, et pas assez bon », glisse l’ancien coéquipier de Rémi Lamerat (aujourd’hui à Clermont) et Teddy Iribaren (Racing 92) chez les jeunes Stadistes.
Une thèse en préparation sur la neurodégénérescence
Retourné au rugby amateur et à ses trois entraînements hebdomadaires, Pagès a enchaîné six années d’études en pharmacie, agrémentées de stages à l’hôpital. « Il me manque encore la thèse pour avoir le doctorat. J’en prépare une sur la neurodégénérescence. »
Le jury risque d’attendre un peu. Car le demi de mêlée a « envie de continuer dans le rugby professionnel ». Son contrat de joker médical s’achèvera avec le retour d’Antoine Dupont, prévu en octobre. Dans l’idéal, Pagès aimerait poursuivre à Toulouse, au côté de Dupont et de Sébastien Bézy, autre numéro 9 international, si le club le prolonge en tant que joueur supplémentaire. Sinon, pourquoi ne pas rebondir ailleurs en Top 14 ou en Pro D2 ?
« S’il poursuit dans le rugby pro, ce sera pour notre plus grand plaisir, assure Benoît Trey, du côté de Blagnac. Sinon, tout est prêt pour le réintégrer rapidement dans notre club. » Seulement, après avoir goûté au Top 14, les matchs du dimanche à Saint-Sulpice-sur-Lèze ou à Graulhet n’auront sans doute plus tout à fait le même goût.