Roland-Garros: Häagen-Dazs, humour et pépètes... Faites du bruit pour Sloane Stephens
TENNIS•L'Américaine Sloane Stephens met des torgnoles sur le court mais est vachement sympa en dehors...William Pereira
De notre envoyé à Roland-Garros,
Les Etats-Unis peuvent souffler. Certes, ils ne sont pas encore près de retrouver un phénomène semblable aux sœurs Williams mais l’après Serena et Venus se dessine tranquillement avec Madison Keys et surtout Sloane Stephens. Les deux jeunes femmes seront présentes dans le top 10 à l’issue du tournoi de Roland-Garros (10e pour l’une, 4e pour l’autre) et comptent à elles deux, trois finales et un titre en Grand Chelem, en 2017. C’était à l’US Open. Stephens y avait battu Keys et était devenu la première Américaine « non-Williams » à remporter un tournoi majeur depuis Capriati à Melbourne en 2002.
Samedi en finale contre Simona Halep, elle aura une nouvelle occasion de reléguer les illustres sœurs au second plan. On s’est donc dit qu’il était temps de se pencher sur le cas de cette cogneuse dont la personnalité hors du court ne reflète en rien son jeu.
Sweats, Haagen Dazs mais pas Five Guys
Sans vouloir faire dans la caricature, Sloane Stephens est l’incarnation du cool à l’américaine. Il faut la voir en conférence de presse pour comprendre. Détendue, bavarde, marrante et expressive, elle a le sens du spectacle et ce n’est pas un hasard si ses face-à-face avec les journalistes durent rarement moins de dix minutes. Avec elle, il se passe toujours quelque chose.
Dimanche, elle commentait, un peu jalouse, la vidéo où l’on voyait Sharapova taper des balles avec Nadal à Rome, deux semaines avant Roland : « je lui ai demandé "pourquoi je ne peux pas échanger de balles contre lui ?" et son entraîneur m’a dit "il faut que tu gagnes un autre tournoi pour jouer contre lui." […] Un jour je la dépasserai [Sharapova] et j’échangerai des balles avec Fed sur gazon. »
Deux jours plus tard, elle regrettait qu’il n’y ait « pas de glaces à la cafétéria » pour en déguster avec sa grande amie Madison Keys avant leur demie, et, le surlendemain, la voilà qui s’indignait de la disparition de la boutique Haagen Dazs sur les Champs-Elysées au profit de Five Guys (elle ne sait a priori pas que le glacier est de retour, mais cette fois dans la galerie des Champs).
« Je ne pense pas que le loyer des boutiques sur les Champs-Elysées soit dans mes prix, répond-elle à un journaliste lui demandant si elle comptait utiliser une partie de ses gains pour rouvrir la boutique. Mais vous savez, le problème c’est qu’Haagen Dazs ne fait le parfum Macadamia Nut Brittle qu’en Europe. Ça serait bien qu’ils le fassent aux Etats-Unis aussi. Si quelqu’un ici pouvait leur demander, ça serait bien. » »
Si on remonte un peu plus haut dans le tournoi, on apprend que Stephens préfère manger ses glaces dans un cône plutôt qu’une coupe et qu’elle réussit à rester parfaitement anonyme quand elle s’adonne en ville à son plus grand plaisir gustatif. « En général j’ai l’air… Je ne dirais pas d’une SDF, mais je ne suis pas toujours présentable. Ce n’est pas volontaire mais je porte beaucoup de sweat-shirts, j’en ai quatre gris et je tourne. J’ai l’air de quelqu’un d’un peu fou, donc personne ne s’approche de moi. » Pourtant, à l’entendre parler, on a sacrément envie de devenir pote avec elle.
De 934e mondiale à vainqueure de l’US Open
C’est vrai qu’elle est drôle, cette histoire d’Häagen Dazs. Mais attention à ne pas en abuser, Sloane. « Si un joueur ou une joueuse aime se boire un Coca de temps en temps, ça va. Le problème c’est si sa boisson de base c’est le Coca, là ce n’est plus la même chose ! Donc voilà, Stephens, sa petite faiblesse c’est la glace, très bien. Ce n’est pas handicapant sur sa carrière si elle n’en abuse pas trop », nous rassure Paul Quetin, préparateur physique de la FFT. Jusqu’à preuve du contraire, sa carrière n’en pâtit pas trop, non. Ou du moins est-ce moins néfaste que n’a pu l’être cette fichue blessure au pied contractée en août 2016, responsable d’une convalescence longue de onze mois et d’une chute vertigineuse à la WTA (934e mondiale) pour l’Américaine.
Encombrante pause, encombrant classement mais Stephens fait avec. Elle remet les pieds dans le plat avec la certitude de prendre en pleine face des têtes de série à l’US Open 2017 et s’en accommode. Barty, Georges et Venus Williams - pour ne citer qu’elles – tombent sous les coups de parpaing et la sérénité de la jeune Américaine. « Je suis très calme sur le court, tout le temps. Je n’ai pas tellement de hauts et de bas. J’essaye juste de rester calme et de jouer mon jeu », expliquait-elle à la veille de sa finale à Roland contre Simona Halep. A part Camila Giorgi, qui l’a embarquée jusqu’à 8-6 dans le troisième set dans la Bombonera du court n°18, personne n’a réussi à dérégler la machine Sloane Stephens sur la terre battue parisienne. Voyez plutôt ces belles roustes collées par l’Américaine à ses opposantes.
Les raclées, c’est bien mais contre Halep, ça ne suffit pas toujours. Garbiñe Muguruza avait humilié la concurrence - dont Sharapova - avant de s’incliner sèchement face à la n°1 mondiale (6-1, 6-4). « C'est une formidable joueuse, elle n’est pas n°1 pour rien », a poliment commenté Stephens, qui disputera donc sa deuxième finale de Grand Chelem samedi. La première tentative a été une franche réussite : elle lui a permis de connaître les joies d’une victoire majeure et d’un gros prize money (un peu moins de 3,5 millions d’euros à l’US Open). Les internets s’étaient d’ailleurs bien marrés face à la réaction de la néo-lauréate au moment de recevoir son chèque.
Résultat, et puisqu’on vous dit qu’on s’amuse bien en conf avec Sloane, un journaliste d’outre-Atlantique a remis une pièce dans le jukebox en demandant à la joueuse si elle savait combien elle toucherait en cas de victoire finale à Roland. Elle lui dit qu’elle l’ignore et lui demande « combien c’est ? » Réponse du loustic : « Je ne vais pas vous le dire parce que je veux vraiment voir cette merveilleuse réaction de surprise sur votre visage ». « Je ne sais pas si ici on vous le dit aussi sur le court. Vous savez, les Américains sont très "wow, 3,7 millions [de dollars], c’est génial". Les Européens sont plus discrets sur l’argent », rétorque-t-elle. Et en plus, ils ont des glaces goût Macadamia Nut Brittle. Et toc.