CécitéLes parathlètes, des champions de l’instinct

Jeux paralympiques de Paris 2024 : Un sens en moins mais plus d’instinct

CécitéSans la vue, les parathlètes se reposent sur l’ouïe et une perception de l’espace confondantes
Les joueurs de cécifoot impressionnent par leur faculté à se repérer dans l'espace.
Les joueurs de cécifoot impressionnent par leur faculté à se repérer dans l'espace. - Gregory Picout
Virginie Tauzin

Virginie Tauzin

L'essentiel

  • Les jeux paralympiques 2024 se dérouleront du 28 août au 8 septembre 2024 en France.
  • Les athlètes déficients visuels sont présents sur plusieurs disciplines, dont le judo et le cécifoot, un des sports adaptés les plus connus du grand public.
  • Retour sur le rôle des autres sens, dans la pratique de ces sports où les yeux ne permettent plus de se repérer dans l’espace.

«Leurs mains, ce sont leurs antennes. » C’est ainsi qu’Antoine Hays, directeur du para-judo à la fédération, décrit le superpouvoir de ses athlètes. Au judo, sport de proprioception (la perception des différentes parties de son corps) et de préhension, ceux qui n’ont plus leurs yeux pour se repérer dans l’espace ont d’autant plus développé ces compétences clés. Pour eux, tout se passe dans les mains : les actions démarrent en prise directe, en tenant le kimono de l’autre. C’est le kumi-kata.

Une communication « exacerbée »

L’oreille joue aussi son rôle : l’arbitre, au centre du tatami, emploie le terme « jogai » pour rappeler les athlètes vers lui s’ils se trouvent près de la bordure et les amener à se remettre en position. Collés à l’adversaire, les parajudokas se positionnent, se décalent et sentent, avec leurs antennes, le bon moment pour attaquer. « Le travail de proprioception et de kinesthésie est tel que des athlètes voyants viennent s’entrainer avec nous en portant des bandeaux sur les yeux », raconte Antoine Hays.

Au cécifoot, qui se joue à cinq contre cinq, dont un gardien voyant, il faut aussi ajouter aux qualités techniques et athlétiques des spécificités cognitives. Comment retrouver ses coéquipiers sur le terrain, sinon, se diriger ensemble vers les cages adverses et viser le rectangle ? « La communication est exacerbée », atteste Charly Simon, directeur technique du cécifoot à la fédé handisport. « J’ai », « j’y vais », « j’avance » sont autant d’indications lancées par les joueurs à leurs coéquipiers, tout comme « perdu » quand le ballon a été récupéré par l’équipe adverse. Un ballon par ailleurs sonore puisqu’il est équipé de grelots. « Les joueurs ont développé un sens de la reconnaissance des sons, et en particulier de la voix, mais aussi des facultés de déplacement dans l’espace, puisqu’ils doivent imprimer le schéma tactique mis en place par l’entraîneur », poursuit Charly Simon.

Le goût de l’or

Aux Jeux de Paris, l’équipe de France de cécifoot jouera en extérieur au Champ-de-Mars dans une compétition très ouverte, tandis que les para-judokas s’affronteront tout près, dans l’arène temporaire du Grand Palais éphémère. « On espère avoir neuf athlètes en compétition, et ce sont autant de chances de médailles », lance Antoine Hays, qui insiste sur « la saveur particulière » qu’aurait ces dernières pour ces athlètes aux « parcours de vie » parfois complexes. On imagine, la sensation ultime.