PSG – OL : « On ne le pleurera pas »… Mbappé et Paris, on s’est aimé comme on se quitte
TRISTE FIN•Alors que Kylian Mbappé pourrait disputer samedi son dernier match sous les couleurs du PSG, en finale de Coupe de France contre Lyon, la fin de l’histoire entre Paris et le joueur a été marquée par de nombreux ratésAymeric Le Gall
L'essentiel
- Le PSG affronte l’Olympique Lyonnais en finale de la Coupe de France, samedi, au stade Pierre-Mauroy de Lille.
- Ce sera la dernière occasion de voir Kylian Mbappé sous le maillot du Paris Saint-Germain avant son départ au Real.
- Contrairement à ce qu’auraient certainement souhaité le joueur et sa famille, ce départ du PSG s’est fait dans un contexte de tension et de désamour.
Cette fois-ci, c’est la bonne. Sept ans après avoir rejoint le PSG, Kylian Mbappé devrait disputer samedi soir en finale de la Coupe de France contre Lyon le tout dernier match de sa carrière avec les Rouge et Bleus. Sans que l’on sache exactement quelle coloration donner à ce passage qui, par-delà les buts et les nombreux records, aura été émaillé de hauts et de bas, de polémiques à la pelle qu’on se fera un plaisir de ne pas vous énumérer.
Meilleur joueur du club et tête de proue du projet qatari de ces dernières années, Kylian Mbappé n’est paradoxalement jamais tout à fait vraiment parvenu à créer ce lien passionnel avec le public parisien, du moins celui habitué à se rendre chaque semaine Porte d’Auteuil depuis des années. La faute au club, d’abord, qui, malgré les beaux discours de façade, l’aura trop souvent placé bien plus haut que l’institution qu’il prétend ériger en étendard. La faute au joueur, aussi, qui, de par son statut d’icône mondiale et sa propension à vouloir prendre toute la lumière, n’a jamais su donner la sensation de vouloir se fondre dans un collectif pour le rendre plus fort.
A l’arrivée, la relation entre l’enfant-roi de la région et son club phare va se terminer avec le même goût amer du début de saison, quand celui-ci moisissait dans le loft des pestiférés, puni de n’avoir pas voulu (re)prolonger son contrat. Mbappé voulait maîtriser son destin et partir libre au Real Madrid et, sur ce point, il aura eu gain de cause. Mais l’homme tant loué pour son intelligence communicationnel et stratégique aura aussi vu le storytelling de fin d’histoire lui échapper partiellement.
« Ça ne dégageait absolument rien de sincère »
Pour un joueur qui rêve de marquer l’histoire partout où il passe, quitter le Paris Saint-Germain de cette manière, dans un quasi-anonymat, un soir de défaite contre Toulouse au Parc des Princes, sans hommage officiel de la part du club, restera forcément comme une blessure d’orgueil indélébile. Dieu qu’on fut loin des adieux (démesurés) de Zlatan Ibrahimovic qui faisait entrer ses enfants en plein match avec des maillots floqués « King » et « Legend », sous les yeux médusés des adversaires nantais du soir. Au fond, cette fin tristoune n’est qu’un symbole de plus de l’histoire contrariée entre les deux camps.
« La fin d’histoire est clairement ratée, je ne vois pas comment on pourrait dire le contraire. J’ai l’impression que tout est calculé, notamment ce qu’il s’est passé avec le CUP avec ce tifo préparé à la va-vite après pas mal de débats en interne. C’était un hommage un peu artificiel. Même quand il est venu au pied du virage, j’ai trouvé qu’il y avait zéro émotion. Il était là pour les photos, pour donner une bonne image, mais ça ne dégageait absolument rien de sincère », constate, blasé, Pierre, abonné à Auteuil et membre du Collectif Ultras Paris.
Non seulement l’absence d’hommage officiel du club et son silence assourdissant après la vidéo de Mbappé pour annoncer son départ n’ont pas choqué Claire, autre fidèle du virage Auteuil depuis des dizaines d’années, et membre du CUP, mais il est même parfaitement justifié.
« On ne peut pas enlever ce qu’il a fait, ses buts, ses records, mais si c’est un grand joueur, c’est loin d’être un grand homme. Quand, dans son message en vidéo, il n’a pas un mot pour le président, on imagine mal Nasser lui rendre hommage derrière, tranche-t-elle. Je suis contente que le club soit resté fort, qu’on n’ait pas été dans les faux-semblants. On a pleuré Motta, Maxwell, Verratti, Thiago Silva ou Di Maria, on ne pleurera pas Mbappé. Au revoir et bonne continuation. »
Expert en communication sportive chez Vae Solis, entreprise qui conseille de nombreux clubs de foot, Florian Ridard décortique le message implicite qu’a voulu faire passer le club en plaçant le départ de Mbappé au second plan, loin derrière la célébration collective du douzième titre de champion de France. « La relation entre Mbappé et les propriétaires du PSG a toujours été basée sur un rapport de force. Elle a d’ailleurs davantage été politique que sportive. Et comme dans toutes les relations politiques, tu envoies des messages. Là, le message était que le club n’avait pas du tout apprécié la manière dont les choses se sont passées, notamment cette vidéo pour annoncer son départ. Ils ont montré qui étaient les boss. Et dans ces cas-là, ce n’est jamais le joueur. »
Un scénario qui lui échappe
En vérité, si le scénario de fin a totalement échappé au contrôle du joueur et de son entourage, cela fait plusieurs mois que celui-ci ne maîtrisait plus grand-chose. Depuis que son départ a fuité dans la presse, en février dernier, Mbappé n’a plus jamais bénéficié du même traitement de la part de Luis Enrique. Mis sur le banc dans la foulée contre Nantes, remplacé contre Rennes, à Monaco ou au Vélodrome, où il n’a pas manqué de jouer à chaque fois un mauvais sketch devant les caméras de télé ou sur les réseaux sociaux, l’enfant de Bondy n’a pu que constater que, tout Mbappé qu’il soit, il y a des choses sur lesquelles il n’avait guère d’emprise.
Il lui en restait une, quand même, qu’il a gâchée dans les grandes largeurs, face au Borussia Dortmund en demi-finale de Ligue des champions. L’histoire aurait pu (beaucoup) mieux se terminer s’il avait brillé lors de cette double confrontation et qualifié le PSG en finale de C1. Il y a même fort à parier que beaucoup lui auraient pardonné le reste.
« Je trouve qu’il n’a pas été au niveau de ce qu’il prétendait être et mériter. Il voulait des responsabilités, on les lui a données, il a eu les clés du club et ce n’est pas pour autant qu’on a gravi un échelon. Se faire éliminer contre Dortmund en demie, pour moi c’est un échec, et il en est l’un des premiers responsables, juge Claire. On l’a beaucoup vu et entendu dans les médias, mais on ne l’a pas vu lors de la double confrontation. Et ce n’est pas la première fois qu’il fait défaut sur le terrain. »
Une communication sauve-qui-peut peu convaincante
A l’arrivée, on gardera plus en tête ses bouderies grandiloquentes à Monaco ou après sa sortie prématurée au Vélodrome que ses prouesses sur le terrain. « Je trouve que sur ces deux dernières années, le clan Mbappé a quand même multiplié les fautes de communication en plaçant toujours le cas personnel au-dessus de l’institution, à tel point que l’image du joueur dans l’opinion publique en a été un peu écornée », assure Florian Ridard.
« Toute sa communication est artificielle de A à Z, il n’y a aucune spontanéité, tout est calculé, réfléchi », peste Pierre, abonné de longue date à Auteuil, en faisant notamment référence à cet « Envoyé Spécial » intégralement consacré au joueur et diffusé au mois de janvier dernier. Une vaine tentative pour réhabiliter le joueur aux yeux des Français, avant son grand départ au Real. Florian Ridard :
« Ils ont essayé de récupérer la main en faisant ce qu’aucun joueur de foot n’avait fait jusqu’à présent mais ça ressemblait plus à un clip promotionnel qu’à une émission classique d’Envoyé Spécial. Ils lui ont déroulé le tapis rouge. Aucun code de l’émission n’a été respecté. Même si, sur le fond, ce que font Mbappé et sa mère à travers l’association est tout à fait louable, les ficelles étaient un peu grosses et le timing était mauvais. Je considère que cette séquence-là, en termes de communication pure, est très opportuniste et très peu stratégique. » »
« Ça sonne faux, c’est autocentré, c’est assez détestable dans le sens où le but caché est de redorer un blason qui a été pas mal écorché de par son comportement. Ça ne marche plus avec moi, assure Claire. Tout était préparé pour qu’il parte auréolé de cette image de gendre idéal, de personnalité préférée des Français… Il est au-dessus de tout et ne le cache même pas. C’est nuisible pour une équipe. A quel moment on parle de football, d’émotion, d’affection ? Très rarement avec lui, malheureusement. »
Samedi, il lui reste une toute dernière occasion de sauver ce qui peut encore l’être en termes d’image. Même si certains supporters, comme Pierre, ne voit pas la chose de la même manière. « Le scénario idéal serait qu’il ne joue pas et qu’on la gagne sans lui. Ça prouverait que, comme lui, on a déjà tourné la page. »