FOOTBALLJoaquin Valdés, le psychologue de la remontada qui suit Enrique à la trace

PSG : « Ils sont inséparables »… Joaquin Valdés, le psychologue de la remontada qui suit Luis Enrique à la trace

FOOTBALLLuis Enrique a débarqué à Paris avec Joaquin Valdés dans ses valises, un psychologue qui l’accompagne partout depuis 2008 et leur passage sur le banc du Barça B
Aymeric Le Gall

Aymeric Le Gall

L'essentiel

  • Fidèle en amitié comme au travail, Luis Enrique ne s’est jamais séparé de son psychologue, Joaquin Valdés, qui l’aide à travailler l’aspect mental de ses joueurs.
  • Si Joaquin Valdés a d’abord travaillé personnellement pour Luis Enrique, pour l’aider à mieux gérer sa communication, il officie aussi auprès du groupe.
  • A Paris, celui-ci devrait avoir de quoi faire avec une équipe psychologiquement marquée par des déboires répétés en Ligue des champions.

Le bruit court à Paris que l’adjoint principal de Luis Enrique, Rafel Pol, pourrait déjà être amené à quitter le club dans les plus brefs délais. On ne sait pas encore si cela est lié à l’ambiance générale plutôt délétère qui se dégage de ce début d’aventure, avec l’imbroglio maous costaud autour du cas Mbappé et/ou Luis Campos, ou s’il s’agit de raisons extérieures. Toujours est-il que si on avait dû désigner un membre du staff susceptible de prendre ses jambes à son cou, on aurait plutôt misé sur Joaquin Valdés. Pourquoi lui ? Car c’est celui qui est chargé partout où passe Luis Enrique de gérer l’aspect psychologique et émotionnel des joueurs. Autant vous dire qu’au PSG, il ne risque pas de chômer.

Mais la tâche semble tellement velue, avec une équipe psychologiquement marquée par des années de débâcles et d’effondrements mentaux en Ligue des champions, qu’il y aurait de quoi avoir le tournis. D’un autre côté, s’il parvient à redonner une once de confiance à ce PSG-là, Joaquin Valdés aura fini le jeu. Pourtant, avant de travailler auprès des joueurs, ce diplômé en psychologie de l’activité sportive et ancien judoka septième dan, a d’abord été embauché par et pour « Lucho ». C’est d’ailleurs ce qu’il explique encore régulièrement quand on l’interroge sur Valdés, comme lorsqu’il a pris les rênes de la sélection espagnole. « Le psychologue, c’est moi ! », rigola-t-il lors d’une conférence de presse avant le Mondial en Russie en 2018.

« Le psy, c’est pour moi ! »

Franc du collier, volontiers sanguin et provocateur, l’ancien milieu de terrain a toujours eu une relation pour le moins tendue avec les médias. Et il a vite compris que pour réussir dans son nouveau métier d’entraîneur, il lui faudrait travailler son relationnel. Ainsi, lorsqu’il a pris les rênes du Barça, après s’être fait la main sur la Cantera, il débriefait quasi quotidiennement ses interventions médiatiques avec Joaquin Valdés. L’un des rares journalistes à avoir les bonnes grâces de Luis Enrique, au point même de compter aujourd’hui parmi ses amis, Manfredo Alvarez, nous raconte.

« Luis Enrique est quelqu’un qui a un gros caractère, qui peut vite s’enflammer, et qui a besoin de savoir gérer et dominer ses émotions pour faire passer ses messages, que ce soit aux joueurs mais aussi aux journalistes. Etre entraîneur de grands clubs ou de grandes sélections vous expose de fait publiquement et très régulièrement. C’est donc un aspect important à maîtriser. Et Joaquin Valdés l’aide au quotidien sur ces questions-là. Ils analysent ses passages médiatiques et ils définissent les moments où il faut faire un bon mot, les moments où il faut aller au combat ou les moments où il faut esquiver. »

Valdés lui donne également des conseils sur la manière de se comporter pendant un match, comment donner telle ou telle consigne, comment ne pas donner l’impression d’être tendu, au risque de transmettre cette tension aux joueurs. C’est lui qui est parvenu, à force de discussion, à apaiser les tensions apparues entre Luis Enrique et Léo Messi, en 2015, quand celui-ci a décidé de mettre l’Argentin sur le banc lors d’un match de championnat en janvier 2015. C’est aussi lui en partie qui a rendu l’exploit possible face au PSG en 2017 en Ligue des champions lors de la remontada.

« Luis Enrique a connu Joaquin Valdés au Sporting Gijon et ils ont tout de suite accroché. Lucho est quelqu’un qui a toujours accordé de l’importance à l’aspect psychologique comme facteur de performance. C’est pour ça que, dès qu’il est devenu entraîneur de la réserve du Barça, il lui a proposé de le suivre dans cette aventure, et ils ne se sont jamais quittés depuis, ils sont inséparables », relate Alvarez. Du Barça à la Roma en passant par la sélection espagnole et le PSG, les deux hommes sont inséparables. A Paris, un observateur du groupe les décrit comme « extrêmement proches au quotidien ».

Si la tête va, tout va

Cette relation, et le fait que Joaquin Valdés soit d’une certaine manière l’ombre de Luis Enrique au quotidien, n’a rien de normal dans un milieu du foot toujours frileux à aborder les problématiques psychologiques de manière approfondie. C’est pourtant une nécessité pour Marc-Antoine Verkrusse, le premier psychologue à avoir travaillé sur le long terme avec un club pro, le Losc, c’était entre 2006 et 2017.

« Ce doit être un travail de longue haleine et non être une histoire de one shot, de coup d’éclat, de truc auquel ont fait appel dans des circonstances bien particulières. On se souvient de Yannick Noah avec le PSG en 1996 lors de la Coupe des Coupes. Il était là comme booster mental. Pour moi, il faut aller au-delà de ça, avec un suivi régulier des joueurs, avec plusieurs dimensions : le bien-être psychologique, le développement d’habileté mentale dans la gestion des émotions, etc. Mais les clubs ont encore du mal aujourd’hui à passer le cap de manière pérenne. Même moi, à Lille, alors que le club avait la volonté de prendre ces questions au sérieux, c’était toujours un travail dans l’ombre, un truc un peu caché, un peu masqué. »

Pour lui, c’est une « anomalie » que les clubs ne soient pas encore convaincus de l’importance de bosser au quotidien l’aspect mental d’un groupe. « Dans la mesure où tous les clubs ont d’immenses départements de performances, avec des analystes vidéos, des préparateurs physiques, des kinés, des analystes datas, des nutritionnistes, c’est étrange que la dimension mentale ne soit pas encore appréciée à sa juste valeur. C’est paradoxal car c’est très souvent elle qui est pointée du doigt comme accélérateur ou frein à la performance. C’est un des facteurs prépondérants de la performance. »

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C’est aussi ce que pense Joaquin Valdés, comme il l’expliquait lors d’une conférence avec des étudiants en psychologie du sport. « De quoi a besoin un sportif pour être à son meilleur niveau ? Du physique, de la technique, de la stratégie et du mental. Et ces quatre aspects sont tout aussi importants les uns que les autres. Si on ne prend pas soin de la psychologie des joueurs, alors le reste ne peut pas fonctionner », posait-il en guise d’introduction.

Trouver sa place dans le groupe et gagner la confiance des joueurs

Pour ce faire, le travail de Joaquin Valdés passe énormément par l’observation. « Pour prendre le pouls d’un groupe, il faut être présent sur le terrain. Je suis un psychologue du sport qui est présent sur le terrain de jeu, lors des voyages, des matchs, dans les vestiaires », explique-t-il. Et une fois qu’il sent qu’un joueur n’est pas pleinement épanoui, il en fait part à Luis Enrique qui décide alors de la marche à suivre. « Pour Luis Enrique, la plupart des choses se discutent de manière collégiale, de façon que chaque situation se résolve de la meilleure des manières. Le préparateur physique donne son avis sur ce qu’il connaît, pareil pour l’entraîneur adjoint, pour moi sur les questions psychologiques, et à la fin c’est le coach qui tranche, qui décide d’agir ou non sur tel ou tel sujet », détaillait-il devant les élèves.

Cela passe alors par des entretiens individuels, des discussions informelles à la cantine du club, ou par des exercices de groupe. Marc-Antoine Verkrusse : « En plus du travail de veille, je faisais des petits ateliers pour leur donner des billes, des techniques validées scientifiquement, des exercices de relaxation, de respiration, de visualisation mentale, tout un tas de choses qui ont fait leurs preuves dans le domaine de la gestion des émotions. » Reste, pour ça, à se faire accepter par le groupe, ce qui n’est pas toujours évident car les joueurs ont appris depuis le centre de formation à cacher leurs émotions et leurs faiblesses.

« Il faut trouver la bonne démarche et se faire accepter par les joueurs, leur faire comprendre que ce n’est pas une tare que de parler de ses problèmes. Il y a toujours des résistances par rapport aux psys, un truc assez fantasmatique comme quoi on peut savoir ce que vous pensez rien qu’en vous regardant, ce sont des représentations sociétales de notre métier, il est donc important de bien expliquer les choses en amont pour que les joueurs perçoivent l’intérêt de ce travail et fassent confiance à la personne. » A Paris, vu le passif psychologique du groupe, il ne devrait pas être compliqué de faire comprendre aux joueurs qu’il est dans leur intérêt de s’asseoir sur le divan.