ASSE: La responsabilité de Romeyer, le profil du futur coach... Les questions que pose le départ de Gasset
FOOTBALL•Jean-Louis Gasset a tenu en compagnie du co-président du club Roland Romeyer une conférence de presse, ce mardi, pour annoncer la fin de son aventure sur le banc stéphanois. Un sacré coup dur pour les VertsAu centre d'entraînement de L'Etrat, Jérémy Laugier
L'essentiel
- L’ASSE a organisé une conférence de presse spéciale ce mardi pour annoncer le départ de son entraîneur Jean-Louis Gasset.
- Très apprécié des joueurs et des supporters, l’ancien adjoint de Laurent Blanc quitte donc les Verts sur une qualification en Ligue Europa, 18 mois après avoir récupéré le club à la 16e place en Ligue 1.
- 20 Minutes fait le point sur le contexte et sur les conséquences de cette fin d’aventure entre Jean-Louis Gasset, qui s’estime « rincé », et l’ASSE.
L’heure n’était pas aux coups de com' parfaitement maîtrisés, ce mardi au centre d’entraînement de l’ASSE à L’Etrat (Loire). Assis côte à côte, Jean-Louis Gasset et Roland Romeyer n’ont ainsi pas feint leur émotion pendant 40 minutes, au moment d’annoncer le départ de l’entraîneur des Verts. Après 18 mois plus que satisfaisants, tant au niveau des résultats (de 16e en décembre 2017 à 4e en mai 2019) que du jeu pratiqué, le coach de 65 ans a décidé de privilégier sa vie de famille. Si sa décision était prise « depuis un moment », il n’a pas voulu « déstabiliser le groupe » ni « plomber l’ambiance » samedi après la victoire (3-0) contre Nice. 20 Minutes se penche sur les cinq principales questions entourant cette conférence de presse et les conséquences pour Sainté.
- Les dirigeants auraient-ils pu convaincre Jean-Louis Gasset de rester ?
De nombreux articles ont relayé ces dernières semaines d’importantes divergences entre Jean-Louis Gasset et Roland Romeyer. De quoi avoir précipité la décision de l’ex-coach de Montpellier ? « J’ai lu qu’on ne s’entendait pas trop mais on a eu des relations normales avec quelques frictions logiques qui se passent dans tous les clubs. C’est partout pareil, les présidents connaissent la bourse et les limites de la bourse et nous, coachs, on ne pense que terrain et bons joueurs », a expliqué l’intéressé, rappelant « les gros efforts » faits par la direction en janvier 2018, avec les recrutements de Debuchy, Subotic et M’Vila notamment. Non, Jean-Louis Gasset a d’emblée livré son véritable motif de départ : « J’ai pris la décision de rentrer chez moi ». Une envie de retrouver son cocon familial dans la région montpelliéraine qu’il a vite développée.
« « Quand on arrive à un âge un peu mûr, qu’on est très fatigué, on se demande quelle est la priorité de sa vie : la passion qui dure depuis 40 ans ou la famille. Aujourd’hui, j’ai choisi la famille. Personne ne peut lutter contre ma famille, j’ai pris la décision de profiter de ma mère, de mes enfants et de mes petits enfants. Rien n’aurait pu me faire changer d’avis. » »
Très touchant, celui qui vivra donc son dernier match sur le banc stéphanois vendredi à Angers est marqué physiquement. « Personnellement j’ai fini rincé parce qu’il y a une pression très très forte ici, poursuit-il. Je n’abandonne rien du tout mais je ne suis pas en état, je n’ai plus l’énergie. Je suis usé, j’ai besoin de repos, de recul et de voir ma famille. » Il est donc peu probable de le voir, à 65 ans, reprendre un nouveau challenge la saison prochaine, et encore moins en tant qu’entraîneur principal.
« Si je suis autant fatigué, c’est qu’avant j’étais numéro 2. La différence est là. Je n’avais comme souci que l’entraînement, pas les relations avec les dirigeants, les petits contretemps, la presse. Je ne me rendais pas compte de tout ça quand j’étais avec Laurent Blanc. Là, il y a beaucoup plus de décisions à prendre, il faut parler tout le temps et s’adapter aux soucis des uns et des autres. » On le sent presque libéré de ne plus avoir à le faire à partir de samedi matin.
- Quelle trace va laisser Jean-Louis Gasset à Sainté ?
Roland Romeyer s’est montré extrêmement reconnaissant au moment de dresser le bilan de Jean-Louis Gasset. « Pour moi, c’est le plus grand entraîneur passé à Saint-Etienne depuis que je suis au club [en 2010] », estime l’associé de Bernard Caïazzo. Au-dessus donc du bilan majeur de Christophe Galtier avec les Verts (de 2009 à 2017) ? « J’accepte et je respecte sa décision avec un très grand regret, a soupiré Roland Romeyer. Je suis malheureux de le perdre. Il a rempli deux objectifs difficiles à atteindre et je ne le remercierai jamais assez d’avoir apporté de la joie et de la fierté à l’ensemble du peuple vert. »
Car si la qualité de jeu était souvent critiquée dans le Chaudron durant l’ère Galtier, Jean-Louis Gasset a très vite fait la quasi-unanimité auprès de ses joueurs et des supporters, en plus d’une moyenne de points record depuis Robert Herbin, il y a plus de 35 ans. Entre un hommage qu’il a perçu comme « un frisson total, bouleversant » samedi contre Nice puis une banderole accrochée à L’Etrat par les Magic Fans ce mardi («Cette saison ne peut pas se terminer par ton départ », « Dirigeants, acceptez les conditions exigées »), il est évident que cette décision est un crève-cœur pour les fans des Verts.
- La solution interne privilégiée avec Ghislain Printant ?
Roland Romeyer et Bernard Caïazzo commencent à avoir un bel historique d’adjoints ayant réussi de manière spectaculaire leur passage comme coach numéro un, entre Christophe Galtier (d’abord numéro 2 d’Alain Perrin), puis Jean-Louis Gasset, arrivé en novembre 2017 comme adjoint de Julien Sablé. Jamais deux sans trois avec une promotion de Ghislain Printant ? Son ami Jean-Louis Gasset a en tout cas vendu au mieux sa candidature auprès de Roland Romeyer durant la conférence de presse de ce mardi.
« « Ce n’est pas moi qui vais choisir. Mais il a œuvré sans compter. Avec Ghislain, on a remis Saint-Etienne là où le club doit être. Il a plusieurs avantages : il a déjà entraîné en Ligue 1 [avec Bastia de 2014 à 2016], il a de la bouteille, il connaît le groupe par cœur et il a les leaders avec lui. » »
Mais si Roland Romeyer penchait pour cette solution interne, on peut imaginer qu’il l’aurait sans doute déjà actée et annoncée durant la conférence de presse de ce mardi. « J’ai énormément apprécié aussi Ghislain, son professionnalisme et sa proximité avec les joueurs, indique le co-président de l’ASSE. Tout le vestiaire l’aime. Mais même si on n’a pas beaucoup de temps, c’est trop tôt pour qu’on prenne une décision. En tout cas, mon téléphone n'arrête pas de sonner car Saint-Etienne intéresse. »
Marqué par « le fiasco » du remplacement de Christophe Galtier (coucou Oscar Garcia), Roland Romeyer a été bref au moment de dresser le portrait-robot du futur coach des Verts : « Nous voulons continuer le travail mis en place par Jean-Louis Gasset. Nous essaierons de trouver l’entraîneur… non pas le clone de Jean-Louis mais celui qui sera le plus compétent pour continuer ce projet ». L’ASSE est-elle prête à des efforts financiers pour ce choix majeur ? « La plus belle fille du monde ne peut donner que ce qu’elle a », glisse un Roland Romeyer soudain poète.
- Dominique Rocheteau lui aussi sur le départ ?
S’il a réussi à contenir son émotion concernant le départ de Jean-Louis Gasset, Roland Romeyer a été pris par les larmes ce mardi au moment d’évoquer Dominique Rocheteau. Car le fameux « ange vert » (64 ans) lui a lui aussi annoncé qu'il quittait le club lundi. « En trois jours, j’en ai vécu des émotions », a confié, la voix tremblante, le président stéphanois, après s’être là aussi fendu d’un hommage rempli de nostalgie. Arrivé comme vice-président du conseil de surveillance de l’ASSE en juin 2010, Dominique Rocheteau est ensuite devenu conseiller du président, puis coordinateur sportif, et enfin directeur sportif depuis juin 2017. Le nom de son successeur, à ce poste clé dans la vie du club, n’a pas non plus été révélé ce mardi.
- Les joueurs majeurs vont-ils tous chercher à partir ?
Il est rare qu’un entraîneur de Ligue 1 soit aussi clairement lié à autant de signatures de joueurs cadres. Les internationaux Mathieu Debuchy et Yann M’Vila, qu’il a côtoyés avec Laurent Blanc chez les Bleus, c’est Jean-Louis Gasset. Neven Subotic, c’est lui aussi, tout comme la signature officielle de Rémy Cabella (après un prêt d’un an) et celle de Wahbi Khazri. Extrêmement proche de ses joueurs, qu’il a remerciés en premier durant la conférence de presse et qu’il a qualifiés de « gladiateurs » et de « vrais hommes », le coach de l’ASSE sait que Yann M’Vila a notamment lié son sort à lui.
Malgré un contrat jusqu’en 2022, le taulier du milieu à Sainté a à plusieurs reprises annoncé qu’il ne resterait pas en cas de départ de Gasset. Une réflexion que pourraient avoir Rémy Cabella et Mathieu Debuchy, très attachés eux aussi à leur coach. « Je ne suis pas à la place des joueurs mais ils ont des contrats, a simplement précisé Jean-Louis Gasset. Ils étaient très solidaires avec moi car ils me sentaient un peu usé et qu’ils voulaient me booster. »
Une démarche qui n’a pas suffi à convaincre l'attachant technicien, reparti de la salle de presse de L’Etrat avec la main de Roland Romeyer sur l’épaule. Dans le même temps, Yann M’Vila s’est arrêté à la sortie de l’entraînement pour échanger à bâtons rompus avec quelques supporters présents. Il a notamment reconnu que si l’option Ghislain Printant était retenue par la direction de l’ASSE, « ça pourrait changer des choses » concernant ses envies d'ailleurs. Revoilà Sainté à un tournant pour son retour en Ligue Europa, deux ans et demi après le 16e de finale contre Manchester United.