FOOTBALLAvant le docu sur Netflix, comment Antoine Griezmann gère-t-il sa com'?

Equipe de France: Entre «bad buzz» légendaires et gestion en famille, comment Antoine Griezmann gère-t-il sa com'?

FOOTBALLLa plateforme de diffusion Netflix consacre un documentaire au Français Antoine Griezmann
Griezmann avec le trophée.
Griezmann avec le trophée. - Odd ANDERSEN / AFP
Aymeric Le Gall

Aymeric Le Gall

L'essentiel

  • Netflix va diffuser un documentaire sur le joueur de l'Atlético de Madrid, « Antoine Griezmann: Champion du monde » le 21 mars prochain.
  • C'est l'occasion pour 20 Minutes de revenir sur la gestion de la communication du joueur de l'équipe de France, entre gestion maison, bad buzz et manque de reconnaissance.

Antoine Griezmann a retrouvé ses potes de l’équipe de France dans le cadre des éliminatoires à l’Euro-2020, avec deux matchs à disputer en Moladvie (vendredi) et contre l’Islande au Stade de France (lundi). C’est aussi le moment choisi par Netflix pour sortir le documentaire, Antoine Griezmann : Champion du monde, produit par 3e Œil, Max Motion et Mediawan Rights, en ligne jeudi, le jour de son vingt-huitième anniversaire.

« Encore un doc ? ! », voilà ce qu’on s’est dit en apprenant la nouvelle, après la diffusion de deux premiers documentaires, l’un sur la chaîne L’Equipe,sorti en 2017, l’autre sur TMC avec Alessandra Sublet diffusé cet été après la victoire au Mondial. Partant de ce constat, une question nous taraude : Antoine Griezmann n’en fait-il pas trop en termes de communication ?

« Déjà ce doc, ce n’est pas une volonté de Griezmann, nous rétorque d’emblée le réalisateur Alex Dell. C’est Alessandra Sublet, qui avait déjà travaillé sur un premier projet qui a lancé l’idée. » « Je ne suis pas là pour tirer la couverture à moi, mais c’est vrai que j’ai voulu initier ce deuxième projet, confirme l’animatrice radio et télé. Quand j’ai soumis l’idée à Antoine, il m’a dit "pourquoi pas, mais un deuxième doc ça fait peut-être beaucoup." Il a eu des doutes, c’est normal. Antoine c’est quelqu’un d’humble et de pudique donc il n’avait pas trop dans l’idée de repartir pour un tour. »

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La communication se fait en famille

Le journaliste Arnaud Ramsay a également travaillé avec le joueur sur son autobiographie Derrière le sourire, il est donc bien placé pour évoquer la communication de Griezmann. « Je comprends qu’on puisse lui reprocher d’en faire beaucoup, de se mettre en scène mais il faut bien se rendre compte que la plupart du temps, rien ne vient de lui. Il reçoit un nombre de propositions affolantes et n’en accepte que très peu. Un exemple : avant le livre qu’on a fait ensemble, je lui avais proposé de faire un manga autour de sa vie mais il a préféré décliner. »

On touche là à l’une des particularités pour un joueur de sa renommée : Antoine Griezmann ne fait pas appel à une boîte de conseil spécialisée censée gérer son image, comme c’est le cas pour la plupart des grandes stars du ballon rond de nos jours (il travaillait avant avec la société 4SUCCESS mais a décidé de se passer de leurs services en 2017).

Arnaud Ramsay détaille : « Sa force, sa fraîcheur, ce qui fait sa popularité - mais aussi ce qui peut faire sa limite -, c’est qu’il y a une forme d’amateurisme assumé dans la communication de Griezmann. Ce n’est pas péjoratif du tout, mais contrairement à des Messi ou Ronaldo qui ont de superstructures globales très verrouillées autour d’eux, Antoine Griezmann gère ça de manière assez simple, assez directe. Tout ça, il le gère seul avec sa sœur et un de ses amis d’enfance qui vit à Mâcon. Il n’a pas confié ses intérêts à de grosses boîtes de com’ qui, elles, pourraient en faire trop. Il y a un côté familial qui est en décalage par rapport à ce qu’on voit habituellement dans ce milieu. »

Quelques bad buzz légendaires

Cette manière de fonctionner est à double tranchant. Car si les boîtes de com’ peuvent parfois donner de leurs joueurs une image trop lisse, trop sage, trop institutionnelle (chiante, pour le dire tout net), elles savent aussi les erreurs à éviter à l’heure de la toute-puissance des réseaux sociaux. « Ca peut aussi lui revenir en boomerang comme par exemple quand il se grime en noir, qu’il fait son blackface. C’était plus une maladresse qu’autre chose, mais c’est le risque quand on gère sa communication tout seul. »

Outre le blackface, on note au moins deux autres belles maladresses de la part du joueur.

  • Son passage chez Quotidien où il annonce à demi-mot qu’il a des chances de signer à Manchester United (alors qu’il est encore sous contrat avec l’Atlético).

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  • Le clip vidéo produit par Kosmos, la boîte du Barcelonais Gerard Piqué, dans lequel il annonce, à trois jours du début de la Coupe du monde avec l’équipe de France, qu’il a finalement décidé de rester à l’Atlético.

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Ces accrocs, qui ont pu agacer ou interloquer à la fois les supporters de foot et les journalistes sportifs, ont aussi pu par moments ternir la bonne image qu’il véhiculait jusque-là aussi bien au grand public qu’aux connaisseurs de foot. Celle d’un garçon simple, gentil, qui n’a pas changé malgré la notoriété, « d’un super mec tout simplement », dixit Alessandra Sublet, ou encore du fameux gendre idéal. « Je pense qu’il sait exactement où il va et qu’aujourd’hui, dans sa communication, il a pris le parti de faire comme il avait envie de faire sans se soucier forcément du regard des autres, poursuit Alessandra Sublet, l’auteure de Griezmann Confidentiel. Et comme ça suit aussi sur le terrain, avec la saison de fou qu’il fait l’an passé avec l’Atlético et l’équipe de France, c’est compliqué d’aller le chercher. »

Nul n’est prophète en son pays

Griezmann se fout de ce qu’on pense de lui, vraiment ? Non, et il l’a encore montré récemment quand, lors d’une émission sportive sur beIN Sports, une journaliste lâche un soupir après qu’un de ses confrères a défendu le bilan sportif de Grizou en comparaison avec celui de Kylian Mbappé. Dans la foulée, le joueur publie un tweet pour s’étonner de ce « pfffff » lâché à l’antenne à son encontre. Et quand ce n’est pas lui qui monte au créneau, c’est son frère qui s’en charge sur les réseaux sociaux.

Dans le même genre, Arnaud Ramsay assure que Griezmann « lit tout » ce qui est dit sur lui dans la presse sportive française.

« Je me souviens qu’il avait extrêmement mal pris la une de L’Equipe où on le voyait un genou à terre, comme abattu, quelques jours après le premier match laborieux à l’Euro contre la Roumanie. Il considère, à mon sens à tort, que la presse française doit être derrière les Bleus et derrière lui. Il avait donc contacté les journalistes de L’Equipe en privé pour s’en plaindre. En revanche quand ils ont fait un peu fait campagne pour lui au Ballon d’Or, il en était fier et satisfait. » »

Ce besoin de se défendre, de défendre son bilan, son style, comme il a pu le faire lors de la campagne pour le Ballon d’Or (et que certains lui ont reproché) trouve peut-être son origine dans le parcours chaotique d’Antoine Griezmann à ses débuts et le rapport ambigu qu’il a entretenu avec la France durant sa jeunesse. On rembobine : après s’être mangé de nombreux refus de la part des centres de formation français, le joueur alors âgé de 14 ans s’exile en Espagne pour y trouver la reconnaissance que notre pays lui a toujours refusée. Formé à la Real Sociedad et révélé aux yeux du monde de l’autre côté des Pyrénées, le garçon pâtit peut-être encore d’un manque d’exposition et de considération dans son pays natal.

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« Lui je ne sais pas s’il le ressent comme ça, réfléchit Alex Dell, mais moi je trouve qu’il y a un vrai décalage entre ce qu’il fait et ce qu’on dit de lui en France ». Un constat partagé par Didier Deschamps cette semaine à Clairefontaine. « Cela a toujours été le cas des Français qui partent tôt à l’étranger, a expliqué le sélectionneur, en conférence de presse à Clairefontaine lundi. Antoine a réalisé une année 2018 de très, très grande qualité, en étant décisif avec son club en Ligue Europa avant de l’être avec nous pour devenir champion du monde. Il aurait mérité, certainement, d’avoir certaines récompenses qu’il n’a pas pu avoir (le Ballon d'Or). Après, l’exposition médiatique en France pourrait être un peu plus importante, c’est vrai. » Pour ça, rendez-vous sur Netflix le 21 mars prochain.