OL-Barcelone: Pourquoi les exploits européens font-ils à ce point partie «de l'ADN lyonnais»?
FOOTBALL•Avant de défier le Barça mardi (21 h), l'OL a déjà fait tomber depuis vingt ans le Bayern, le Real Madrid, Liverpool et Manchester CityJérémy Laugier
L'essentiel
- Brillant vainqueur de Manchester City et du PSG cette saison, l’OL va cette fois affronter le grand Barça, mardi (21 heures) en 8es de finale de la Ligue des champions.
- D’anciens joueurs lyonnais, dont Sidney Govou, décryptent pour 20 Minutes comment l’OL s’est « décomplexé » depuis vingt ans sur la scène européenne.
«Il faut que le football français aille le plus loin possible en Coupe d’Europe, il faut arrêter d’avoir peur, on est bons. » En vrai, la pertinente sortie médiatique de Kylian Mbappé, à la suite du succès parisien à Manchester United (0-2), concerne-t-elle vraiment l’OL ? Après avoir pris quatre points sur six en poule contre Manchester City et avoir été la première à faire tomber le PSG en Ligue 1, l’équipe lyonnaise a prouvé cette saison qu’elle ne nourrissait pas de complexe contre les gros morceaux. « Nous sommes taillés pour les grands rendez-vous », assume Bruno Genesio, au moment de se projeter sur l’immense défi du 8e de finale aller de Ligue des champions face au Barça mardi (21 h).
Depuis trois ans, l’OL de Bruno Genesio frôle souvent la caricature d’équipe déroutante, capable de briller en Europe contre City, l’AS Roma (4-2) ou la Juve (1-1 à Turin), tout en battant trois fois le PSG en L1. Mais aussi d’être éliminée des coupes par Guingamp, Caen et Strasbourg, ou de s’incliner en championnat contre Reims, Dijon et Lorient. Cette faculté à souvent se sublimer sur la scène européenne ne date pas d’hier à Lyon. Depuis vingt ans, le Bayern Munich, l’Inter Milan, le Real Madrid et Liverpool ont tous été surpris par l’OL.
« Juste avant d’affronter le Bayern, on voulait limiter la casse »
« Dès qu’on a les petites étoiles sur le maillot, tout est différent à Lyon, se souvient Jean-Marc Chanelet, latéral lyonnais de 2000 à 2003. Retrouver l’OL à ce niveau de la compétition, ça n’est jamais un hasard. Ce club parvient souvent à se lâcher quand tout le monde l’annonce perdant. Complexer en Europe est un mal français, mais pas lyonnais. » Cela n’a pas toujours été le cas, à en croire son ancien coéquipier Sidney Govou.
a« Il nous fallait un premier match référence en Ligue des champions pour lancer la machine, confie-t-il. Dans notre inconscient, juste avant d’affronter le Bayern en 2001, on voulait limiter la casse. Mais tout s’est bien goupillé (3-0). » L’intéressé en sait quelque chose.
En vingt minutes et deux bolides mystifiant Oliver Kahn, Sidney Govou s’est fait un nom en Europe, à 21 ans. Et l’OL avec lui. « On a vite vu que ce succès a décomplexé tout le monde : les joueurs de l’époque, les supporters et la ville. Durant les rassemblements en équipe de France, tous les joueurs m’avouaient qu’ils voulaient éviter l’OL en Ligue des champions, ça m’a marqué. Après le Bayern, il y a eu une récurrence des exploits lyonnais en Europe. Donc on sait qu’encore aujourd’hui, à Lyon, on peut battre n’importe qui. Ces grands rendez-vous de Ligue des champions sont dans l’ADN du club. »
« Chaque joueur se sent vraiment fort avant d’entrer sur le terrain »
Une expression qu’emploie volontiers aussi Philippe Violeau, en pointant sans surprise le principal responsable. « Cette volonté de toujours jouer pour gagner suit les générations à l’OL et ça ne vient pas en claquant des doigts, confie l’ancien milieu défensif lyonnais de 1997 à 2003. C’est tout le travail et le savoir-faire de l’ère Aulas. Il est hyper présent avant ce genre de matchs et il trouve très souvent les mots justes. Je ne sais pas si les préparations de grands rendez-vous peuvent être aussi bien maîtrisées dans d’autres clubs. Chaque joueur se sent vraiment fort avant d’entrer sur le terrain. »
Est-ce ainsi qu’un Maxime Gonalons marque à 20 ans un but crucial à Liverpool, que Jean II Makoun claque une frappe en lucarne à Iker Casillas, ou que Maxwel Cornet signe plus de buts (trois) en deux confrontations face à Manchester City que dans toute sa saison de Ligue 1 ? « Ces soirs-là, avec l’OL, on voit souvent des gestes, des buts ou des attitudes inhabituels, estime Philippe Violeau. Personnellement, au lieu de parcourir 11 km comme souvent, j’en faisais 14 sans ressentir de fatigue, le tout en étant précis dans le jeu. On se sent habité par un esprit différent, comme si nous n’étions pas nous-mêmes. »
« A la base, Lyon n’était pas une grande ville de foot »
Une dimension quasi mystique qui ne sera pas de trop pour renverser la bande à Lionel Messi mardi, encore un peu plus en raison de la suspension de Nabil Fekir. Cela passera forcément par un Parc OL (à guichets fermés) en transe. Sidney Govou, qui a tant connu le Gerland des grands soirs, a sa petite idée sur cette euphorie ayant si souvent entouré Lyon en Coupe d’Europe.
« « A la base, Lyon n’était pas une grande ville de foot. Pour vraiment réveiller la ville et sublimer les Lyonnais, il fallait donc de grandes affiches. A mes débuts, pour une rencontre type OL-Sochaux un samedi aprem, il n’y avait personne dans le stade. Tout cet environnement a un impact sur les joueurs. Ça a énormément évolué depuis mais il y a peut-être encore un peu de ça. Je vis à Lyon et ça fait longtemps en ville que les gens ne me parlent plus que de ce match contre le Barça. » »
Pas dit en effet, même en 2019, que Lyon s’embrase à l’idée d’un duel entre le Caennais Enzo Crivelli et Marcelo, huit jours plus tard, en quart de finale de Coupe de France.