VIDEO. Des France-Brésil légendaires, Bob Marley et «sac à merde»... C'était Henri Michel
FOOTBALL•L'ancien sélectionneur des Bleus est décédé à l'âge de 70 ans...B.V. avec J.L, D.P et A.L.G
L'essentiel
- Henri Michel est décédé à l'âge de 70 ans.
- Ancien sélectionneur des Bleus, légende de Nantes, on vous raconte la carrière hors-norme d'un homme important du foot français.
Henri Michel n’est plus. L’ancien sélectionneur de l’équipe de France et légende du FC Nantes a été vaincu par la maladie à 70 ans. Retour sur une carrière qui a mené cet amoureux du foot de l’Erdre à l’Afrique, en passant par Los Angeles et des France-Brésil légendaires.
Légende du FC Nantes
Vendredi soir, lors des 75 ans du club, Henri Michel a été désigné «Légende des Légendes du club». Malade, il n’avait pas pu assister à l’événement. Cette désignation montre à quel point ce milieu de terrain très élégant laissera une trace indélébile au FCN, où il a joué de 1966 à 1982. «Mickey», comme il était surnommé, détient le record du nombre de matches disputés sous le maillot du FCN (532) entre 1966 et 1982. Club avec lequel il remporta trois titres de champion de France (1973, 1977 et 1980) et la coupe de France (1979). « C'était un joueur exceptionnel, confie Gilles Rampillon, qui a évolué de 1970 à 1982 à ses côtés au milieu du terrain à Nantes. Il était très technique et avait une frappe de balle incroyable.»
Yannick Bigaud, speaker pendant 40 ans, n’a pas oublié « cet artiste » du ballon rond. «Un type d’une élégance, d’une beauté à voir. Avec Jean-Marc Guillou, c’était le seul joueur capable de remonter le terrain balle au pied sans la regarder. Des contrôles fabuleux. On a eu des très grands joueurs à Nantes, mais lui, c’était fou. Il aurait dû faire une carrière plus importante encore. Un type super.» Au futur musée du club, Henri Michel aura évidemment une place à part. «Il est partout dans ma tête, dans mon bureau, explique Philippe Laurent, responsable du futur musée. Il a été désigné "Légende des Légendes du FCN", ça prouve le phénomène que c’était. La semaine dernière, je l’avais contacté pour savoir s’il était d’accord que j’entreprenne un projet spécial le concernant, il avait donné son accord… » Juste avant de partir.
Le serrage de pince avec Bob Marley
C'est l'histoire d'une photo qui est entrée, elle aussi, dans la légende. Nous sommes à l'été 1980, le FC Nantes du capitaine Henri Michel est en reprise d'entraînement après son titre de champion de France et Bob Marley, lui, en tournée dans la région. Grand fan de foot, il sollicite le FC Nantes pour faire un petit 5 contre 5 avec ses potes. Le club accepte et envoie Henri Michel, Rampillon et quelques autres au feu. S'en suit un «pur moment de bonheur, racontait Rampillon à So Foot. J'ai même gardé une photo de moi avec le Maître. Le fait que Bob Marley ait sollicité cette rencontre prouvait qu'ils en avaient envie… et les moyens ! C'était un petit match après l'entraînement, un petit cinq contre cinq. On avait joué avec des petits buts et c'était très agréable. Bob Marley et son groupe étaient réellement passionnés de football. » De tout ça nous reste donc la photo, mythique, d'un serrage de pince pour l'histoire.
Le titre olympique de 84
Cela fait longtemps que les Espoirs français se consument de ridicule, incapables de se qualifier pour la seule compétition de leur catégorie d’âge qui compte. Mais les Bleus ont pourtant connu une belle histoire olympique grâce à Henri Michel. C’était l’été 84, celui de tous les bonheurs pour le foot français. Victoire à l’Euro à la maison avec Platini et consorts, puis conquête de l’Ouest à Los Angeles. Avec une équipe oubliée depuis (4 joueurs seulement participeront à la Coupe du monde 86), Michel donnera une médaille d’or inespérée à la délégation tricolore…face au Brésil, qui s’habituait tout juste à devenir la victime favorite des Bleus.
Enfin, plutôt l’International Porto Alegre, qui représentait 90% de l’effectif brésilien. Peu importe, c’était bien le Brésil, les images sont là pour le prouver. Et les 100 000 spectateurs du stade de Pasadena aussi.
Le premier France-Brésil légendaire de 86
Le plus beau match de l’histoire de l’équipe de France pour tous ceux qui ont l’âge de l’avoir vécu. Quart de finale à Guadalajara, Mexique, 21 juin, à midi pour plaire aux télés européennes. Un cagnard du diable, des artistes partout sur la pelouse, et un coup tactique magique d’Henri Michel. Le sélectionneur des Bleus voit son équipe à la rammasse après le premier but de Careca. Il décide alors de changer ses plans en replaçant Luis Fernandez au milieu de terrain, alors que le Parisien n’en touchait pas une en arrière-droit. La décision la plus importante d’un sélectionneur tricolore ? Sans ça, on n’aurait peut-être jamais eu droit à l’inoubliable « Vas-y Luis, vas-y mon petit Bonhomme » de Thierry Roland avant le tir au but vainqueur de Fernandez.
« Sac à merde »
Dommage pour Raymond Domenech, mais il ne décrochera pas la palme du premier sélectionneur de l’équipe de France à s’être fait violemment basher par l’un de ses joueurs. Bien avant le célèbre « casse-toi sale fils de pute » de Nicolas Anelka au Mondial 2010, c’est Henri Michel qui s’était fait salement triturer par un autre poète : Eric Cantona. Le 15 juin 1988, quand il voit qu’il ne fait pas partie de la liste de l’équipe de France pour aller défier la Tchéquoslovaquie, Canto sort la machette.
« Je lisais un truc de Mickey Rourke puisque c’est un gars que j’adore, qui disait que celui qui s’occupait des Oscars à Hollywood était un sac à merde », commence le marseillais avant de prendre un grande inspiration et tacle à la gorge: « Je pense qu’Henri Michel n’en est pas loin. » La bombe est lâchée, elle va coûter cher à la plus grande bouche du foot français. Car si Henri Michel avait choisi de penser que Canto avait « parlé sous le coup de la colère », la Fédé’, sur décision de son président Fournet-Fayard, décide quant à elle d’exclure l’attaquant jusqu’au 30 juin 1989. « Il m'a pratiquement traité de sac à merde », dira Michel quelque temps après. Oui, pratiquement.
Sorcier blanc
Dans la foulée de Claude Le Roy, Henri Michel est devenu après son passage raté au PSG en tant qu’entraîneur ce qu’on appelle un « sorcier blanc », c'est-à-dire un entraîneur européen à la tête d’une sélection africaine. Le Cameroun, le Maroc, la Tunisie, Côte d’Ivoire, re le Maroc, la Guinée équatoriale et le Kenya, tout ça entre 1994 et 2012, Henri Michel a vu du pays, avec comme palmarès un titre de vice-champion d’Afrique 2006 avec les Eléphants ivoiriens.
Ajoutez à ça ses passages dans des clubs grecs, sud-africains, égyptiens, saoudiens… Bref, l’ancien sélectionneur de l’équipe de France a apporté sa science aux quatre coins du monde. « Il y a des tas de choses attirantes, des cultures aux civilisations, en passant par les langues, un football totalement différent que l'on soit au Maghreb, en Afrique du Sud ou centrale, déclarait-il à Ouest-France en 2013. J'ai un vrai coup de cœur pour ces gens-là. Quand on y a goûté, c'est difficile de s'en passer, malgré toutes les contraintes et les défauts qu'il peut y avoir. »