OM-Monaco: Des engrais potassiques à l'ASM, de Paris-Turf à l'OM... Vasilyev, un modèle pour Eyraud?
FOOTBALL•Comme «Vadim» avant lui, «Jacques-Henri» est un nouveau venu dans le game...Jean Saint-Marc
L'essentiel
- Le foot, c’est leur deuxième, voire leur troisième vie professionnelle : Vadim Vasilyev et Jacques-Henri Eyraud viennent du monde des affaires (comme, d'ailleurs, beaucoup de dirigeants).
- Et si le premier, qui a amené Monaco au sommet l’an dernier, servait de modèle aux nouveaux patrons marseillais ? On se pose la question avant le choc OM-ASM, ce dimanche à 21 heures.
Les soirées de 6-1 sont un peu longuettes, même en loge présidentielle. On imagine donc que Jacques-Henri Eyraud ne garde pas un souvenir incroyable de cette rencontre avec Vadim Vasilyev, fin août, à Louis-II. Il n’empêche : les deux présidents, dont les clubs se retrouvent ce dimanche soir (21h), ont beaucoup de choses à se dire. Sur le PSG, sur l’arbitrage, sur le mercato… Et on n’en doute pas, Eyraud (ou plutôt « Jacques-Henri », pardon) écoutera attentivement. « Si je devais m’inspirer d’un exemple, ce serait plutôt de celui de Monaco que de l’exemple parisien », expliquait le président olympien en juin dernier. Vadim Vasilyev doit acquiescer.
(Officiellement la dernière référence à Star Wars de ce papier)
Patrons du 3e et du 4e de Ligue 1, les deux hommes occupent leur premier poste dans le foot. Et c’est directement sous les sunlights des… Pardon. « Dans un club d’envergure, à forte aura », corrige l’agent Stéphane Canard, qui connaît bien les deux hommes « tous deux très rigoureux. » Une rigueur BCBG, tendance école de commerce. Après une première carrière dans la diplomatie soviétique, Vasilyev a surtout bossé en tant que trader, dans les engrais potassiques ( miam). Eyraud a lui été porte-parole de Disneyland puis entrepreneur dans le monde des médias, à la tête de Paris-Turf et de Sport365, notamment.
Un audit, et ça repart
Jeune et fringant quinqua, Vasilyev n’a que trois ans de plus qu’Eyraud… Mais quelques années de plus dans le foot. Arrivé à Monaco en 2013, en tant que conseiller de son boss de toujours, Rybolovlev, il prend du galon rapidement, jusqu’au poste de vice-président / directeur général. « Il est vite devenu omniprésent. Il observe bien, il a très vite appris le foot… Comme il a très vite appris le français », confie un autre agent, Hervé Marchal, conseiller de plusieurs joueurs passés par le Rocher.
« Dans les années Ligue 2, il était vraiment en retrait, se souvient Jacques Benveniste, cadre du Club des supporters monégasques. Pendant deux ans, on a eu un défilé de consultants, très compétents, qui faisaient le bilan de l’ASM. On a eu des réunions avec des questionnaires très précis, c’était très poussé, et ils ont tout restructuré ensuite. »
La restructuration, Jacques-Henri Eyraud a les deux mains dedans. Lui aussi a fait un audit du club, avec l’aide, notamment du fameux cabinet EY (ancien Ernst & Young). La réorganisation a suivi, saveur «plan social » pour certains. Elle se poursuit : Alexandre Neyton, nouveau directeur de la sécurité, a pris son poste début janvier. Et OM TV (entre autres) est encore en chantier.
Mais dans le cercle proche, que des fidèles. « Jacques-Henri Eyraud est très bien entouré, et comme c’est quelqu’un d’érudit et d’intelligent, il sait prendre l’information là où elle se trouve, reprend Stéphane Canard. Dans un club comme l’OM, l’apprentissage se fait en accéléré ! » En matière sportive, c’est (fort logiquement) Zubizarreta et Garcia qui ont la main. Mais JHE n’est jamais loin. « Comme Vadim (sic), il a le dernier mot dans les négos, conclut le conseiller d’Abdennour (entre autres). Evidemment qu’Eyraud est dur en affaires… Mais comme je le suis aussi, ça fait de bonnes négociations ! »
Un peu méfiant vis-à-vis des agents, le président olympien en a blacklisté toute une bande. On est très loin, donc, de l’intime proximité entre les dirigeants monégasques et le puissant Jorge Mendes. La façon dont Vasilyev et consorts gèrent leur mercato peut tout de même être observée de près : le fameux « trading joueurs » dont rêvait Vincent Labrune rapporte gros, chaque année, à Monaco.
« Meilleur dirigeant européen »
358 millions d’euros l’été dernier, par exemple. « Ce que fait Vasilyev avec les ventes de jeunes joueurs, pour moi, c’est le modèle à suivre en Ligue 1, car les clubs ne peuvent pas rattraper le PSG en termes de dépenses », commente Aaron Gourley, red-chef du magazine FCbusiness, qui a filé le prix du « meilleur dirigeant européen » à Vadim. Un Vadim qui a d’ailleurs porté à bout de bras le changement de stratégie, en 2014, sous la pression du fair play financier. Michaël, supporter de l’ASM et rédacteur pour Planete-ASM nous raconte :
« C’est lui qui a été envoyé au feu par Rybolovlev pour expliquer les départs. Cette nouvelle politique de ventes, c’est lui qui a dû faire avaler ça aux supporters. Il est plutôt bon dans sa com' vis-à-vis des supporters, on sait qu’il ne faut pas paniquer à chaque grosse vente, qu’on survivra. »
En attendant les grosses ventes, l’OM fait au contraire dans les gros achats. Et la tendance hiver-été 2017, c’était plutôt le daron moustachu, trentenaire bien tassé. Avec Payet, Rami, Abdennour, Evra ou Sertic, l’OM n’a pas vraiment fait dans la jeune pépite inconnue. A part Sanson et Amavi. Mais tout cela est un « work in progress », comme le dirait le très start-upper Jacques-Henri Eyraud. Qui veut construire « l’OM next generation » (là par contre, c’est authentique). La flopée de partenariats avec les clubs amateurs, le projet de nouvelles infrastructures pour le centre de formation : le but, c’est évidemment de former des joueurs de grande valeur.
La formation, c’est une des « jambes » du projet McCourt. L’autre, c’est la « fan experience » (c’est le passage Google Trad de cet article). Avec cette question : comment tirer plus de ressources du Vélodrome, aujourd’hui géré par une filiale de Bouygues, que l’OM veut détrôner. Comment gagner plus avec son stade : question insoluble, en revanche, pour Vasilyev dont le Louis-II sonne désespérément creux. Là-dessus, pas de modèle. Les pépites, ça s’achète… Pas les supporters.