Ligue 1: Entre punchline et exploit, quand Thierry Laurey s'est révélé aux yeux du foot français
FOOTBALL•Après l'exploit contre le PSG et avant le match à Bordeaux, vendredi à 20h45, 20 Minutes s'arrête un instant sur le coach strasbourgeois...Alexia Ighirri
L'essentiel
- Le coach de Strasbourg Thierry Laurey avait crevé l’écran avec sa conférence de presse avant la réception du PSG.
- Son équipe avait d’ailleurs réalisé l’exploit en battant Paris samedi (2-1).
- Avant le déplacement du Racing à Bordeaux, vendredi à 20h45, 20 Minutes propose de faire plus ample connaissance avec Thierry Laurey.
Depuis le match contre Paris et avant celui à Bordeaux, vendredi à 20h45, il a beaucoup été question du coach du Racing club de Strasbourg. « Un peu trop à mon goût mais c’est pas grave », nous répond Thierry Laurey, quand on vient lui demander de parler un peu de lui. Pas forcément l’exercice qu’il préfère : « Non… Et puis je trouve qu’il y a des gens qui racontent beaucoup de conneries et donc ça commence à m’énerver. »
Il faut dire qu'avec des punchlines et autres saillies bien senties autour de la venue du PSG, il a crevé l’écran. Mais après les paroles, il y a eu les actes. Avec l'exploit des siens contre le PSG invaincu jusqu’alors, le coach s’est révélé aux yeux du foot français.
Le coach réfute l’idée d’une leçon tactique et la joue collectif : « Je ne suis pas tout seul à travailler. On a fait ce qu’on a pu. Au vu de l’effectif qu’on avait, des blessures, on a essayé de faire une équipe qui était la plus cohérente possible pour essayer d’embêter les Parisiens. Au départ c’était ça l’objectif. C’est plus des ballons de contre qu’on a contre eux. C’est pour ça qu’on avait mis Martin Terrier d’un côté, Nuno Da Costa de l’autre et Stéphane Bahoken devant. On avait misé là-dessus, qu’à un moment donné l’équipe parisienne soit haute et qu’on puisse contrer. »
« Un franc-parler, pas une grande gueule »
Pour autant, la victoire face à l’ogre parisien ne l’avait pas grisé : Thierry Laurey a poussé un «coup de gueule» à l’issue de la rencontre, notamment sur l’analyse faite de la victoire du promu alsacien.
« Il a un caractère, assure Olivier Bogaczyk, attaquant qui avait vu arriver Thierry Laurey sur le banc de Sète (2007) pour ses premiers pas en tant qu’entraîneur numéro 1. C’est aussi une de ses forces. Il sait où aller, comment y parvenir. Ce n’est peut-être pas une méthode mais une philosophie. »
Le coach de Montpellier, Michel Der Zakarian, qui évoluait en défense centrale au MHSC avec Thierry Laurey dans les années 1990 se souvient : « Même quand il était joueur, il avait son franc-parler. On ne va pas dire que c’est une grande gueule, mais il aime parler. »
Une encyclopédie du foot
L’homme n’est pas du genre taiseux. Curieux en revanche. « Il a un avis sur tout, on peut parler de pleins de choses avec lui. Quand il savait qu’un joueur faisait de la guitare, il pouvait parler musique », raconte Olivier Bogaczyk, qui note tout de même un sacré défaut : « Il est mauvais perdant. Donc je donne un conseil : ne jouez pas au tarot dans son équipe ! Parce que quand tu fais un mauvais coup, il t’explique comment tu aurais dû faire pour ne pas perdre. »
Compétiteur sur tous les terrains donc. Quid du football ? Nos interlocuteurs s’accordent à dire que Thierry Laurey est « une encyclopédie, il connaissait tous les joueurs, de CFA aux pros ».
Le coach du Racing balaye l’idée de l’encyclopédie (« Non, non, loin de là ! ») mais revendique l’amour pour son métier : « Forcément, c’est ma passion depuis ma plus tendre enfance. J’ai toujours voulu être joueur. Même amateur. » Et entraîneur ? « J’ai toujours eu cette vocation de transmettre, de partager des choses. Plus que d’imposer ».
« « Je ne me voyais pas faire autre chose, dans un bureau, enfermé, avec des tas de personnes autour de moi à qui tu dois envoyer des mails et compagnie. Mon truc c’est d’être dehors, partager avec des gens, de vivre une aventure, échanger, s’engueuler, cajoler. J’aime pas que des gens puissent parler là-dessus à tort et à travers ». »
Tout n’a pas été rose dans la carrière d’entraîneur de Thierry Laurey. Après son départ d’Amiens (2009), relégué en National, il connaît 21 mois de chômage. Période durant laquelle, « il a pris le stage à l’UNFP des joueurs sans club, c’est quelque chose de fort ! Il aime le métier, il aime les joueurs », poursuit son ancien joueur Olivier Bogaczyk. Qui voit des similitudes avec Jean-Louis Gasset, dont Thierry Laurey a été l’adjoint pour son début de carrière sur le banc.
Tirer le meilleur des joueurs
Un « mentor », dixit le coach alsacien, qui l’a marqué : « Forcément, la première personne que tu rencontres dans ton nouveau métier elle a un impact sur toi. C’est un peu comme votre premier amour. Ça vous marque un peu plus que les autres, même si vous trouvez la bonne personne après. Jean-Louis est passionné, féru de stratégie, de tactique, qui travaille beaucoup sur l’humain. Il n’hésite pas à piquer les gens aussi pour en tirer le meilleur. »
Un domaine où le Racingman excelle aussi : « Quelques fois, il ne faut pas avoir peur de se mettre en danger en piquant les gens. Ce qui est important c’est ce qui va être rendu sur le terrain. Si je dois me fâcher avec quelqu’un pour le rendre meilleur sur le terrain, ça ne me pose pas de problème. » Même si ça ne fonctionne pas à tous les coups : « Certains vont t’en faire grief. Il faut faire attention avec quelles personnes tu joues à ce jeu-là. Il y en a qu’il faut emmener de manière un peu plus douce. C’est assez fin à maîtriser. »
Une chose qu’il a apprise au cours de sa carrière, n’ayant aucun problème à reconnaître qu’il « a progressé notamment sur le plan humain. La communication, le management, ce sont des choses qui étaient un peu nouvelles quand tu reprends une équipe, là t’apprends un peu sur le tas. Il faut vite retenir les leçons. »
« Mais à l’extérieur du vestiaire, il est protecteur avec ses joueurs, abonde Olivier Bogaczyk. C’est un coach qui arrive à tirer le meilleur des joueurs, partout où il passe. »
Un homme de challenge
Nos interlocuteurs ne sont en rien étonnés de voir le tacticien à ce niveau. Fort notamment de trois montées en quatre ans dont deux coup sur coup avec le Gazélec entre 2013 et 2015. « Ce qu’il a fait avec Ajaccio c’est extraordinaire, admire l’ancien attaquant. C’était un chantier ! Mais je pense qu’il aime le challenge, la difficulté. »
Michel Der Zakarian prend un peu plus de recul : « On est tous amenés à avoir des bons ou des mauvais résultats à un moment donné. Ça dépend de beaucoup de choses, de l’équipe, de joueurs, de notre travail… C’est une aventure humaine entre le groupe et le staff et un club aussi. Strasbourg c’est une ville qui transpire le foot. » Qui colle finalement si bien au profil du passionné Laurey.