A Marseille

La fan zone ? Sympa. Un bar du Vieux-Port ? Mouais. Mais non, pour cette demi-finale France-Allemagne, c’est inévitablement au Stade Vélodrome qu’il faut être. Seulement voilà, vous n’avez pas de billet, parce qu’en mars, vous étiez trop occupé à réserver votre camping à Hossegor. Pas de panique, 20 Minutes a écumé Internet pour vous. Une plongée dans l’univers de filou des revendeurs de places de l' Euro 2016.

Avant toute chose, c’est légal de racheter un billet à quelqu’un ? Voilà ce qu’autorise l’UEFA :

Vérification faite auprès de Me Jean-François Vilotte, avocat de l’instance du foot européen, toute autre plateforme que celle de l’UEFA est illégale. Sites de billetterie, réseaux sociaux, vendeurs à la sauvette… Tout. Même si vous revendez au prix d’achat et que vous êtes avec la personne le jour du match. « Et même si le billet est vrai, il peut être annulé par l’UEFA ou inutile si un contrôle d’identité est mené à l’entrée du stade », prend soin de préciser le juriste, qui insiste sur les impératifs de sécurité liés à l’identification du spectateur. Un vendeur risque 15.000 euros d’amende, un acheteur, d’être accusé de complicité.

Avertissement pris, on se lance. Commençons par la plateforme de revente de l’UEFA. Comme indiqué par notre collègue lors de sa palpitante quête de billets avant la compétition, d’abord il faut attendre (et ne surtout pas réactualiser la page).

[Nous avons exclu d’emblée l’option « hospitality » de l’UEFA, qui porte très mal son nom en proposant des places VIP à 2.900 euros]. On laisse cette page ouverte mouliner tranquilou et on va s’attaquer au « dark » internet aka Le Bon Coin et autres.

« Album panini Euro 2016 : 2.000 euros »

Farfouiller sur Le Bon Coin est notre premier réflexe, comme celui de tout vendeur ou acheteur. On y trouve une bonne centaine d’annonces proposant des places. A 2.000 euros pour la plus chère. Mais surtout, pas mal d’intitulés improbables. « Ski nautique demi-finale » ou « Quatre clous demi-finale ». « Sinon, ils ne valident pas les annonces, se justifie N., auteur d’au moins 10 offres différentes mais proposant toutes quatre places à 950 euros chacune (achetées 300 euros « environ »). « Le premier qui vient [à Antibes dans les Alpes-Maritimes], elles sont à lui ». Le jeune homme argumente. « J’ai eu ces places au tirage au sort, elles sont bien placées, il y a les numéros de tickets et j’ai la facture UEFA mais je ne pourrais pas y être. »

Fred* la joue encore plus fine. Son annonce est titrée : « Album panini Euro 2016 : 2.000 euros ». Ça fait un peu cher la photo de d’Adil Rami. Le texte intégral est à peine plus transparent, précisant : « Ils sont complets notamment pour les équipes présentes pour la demi-finale au Vélodrome (France - Allemagne) ». Wink wink. Evidemment, ce Marseillais ne vend pas d’album Panini mais bien quatre places pour le match de jeudi. « Je ne le mets pas, les gens comprennent ». La modération du site, moins.

Ce mardi, il n’a été contacté qu’une seule fois, par un acheteur qui en voulait 150 euros. Fred a payé ses places 165 euros l’unité. « Je vais peut-être baisser à 300 euros, mais en dessous, je les garde pour mes potes ». Vu le temps que ça lui prend, pas question de les revendre à perte. Il remet chaque jour une annonce différente, quand la précédente est supprimée par le site. Sur un site d’enchères bien connu, le vendeur a aussi testé tous les mots-clés refusés par le robot : « Ticket, ça ne marche pas, billet non plus, mais demi-finale oui », égrène-t-il en connaisseur.

Bénéfice espéré pour Fred = Entre 500 euros et 1.300 euros
Bénéfice espéré pour N. = 2.600 euros

De l’autre côté de l’ordi, Jennifer et Elena* trépignent. Toutes deux cherchent désespérément une place mais pataugent entre les statuts Facebook et Twitter jetés à la mer et les prix exorbitants. « 1.400 euros en catégorie 4 », souffle la première, « 400 euros en catégorie 2 », râle Elena.

Ironie du sort, cette acheteuse travaille pour l’UEFA. « On n’est pas des habitués de la chose, se défend-elle, mon mari a vu quatre matchs et à chaque fois les billets étaient obtenus officiellement via la plateforme officielle, qui est un vrai parcours du combattant. » Cette fois, elle veut mettre 250 euros maximum (pour une place). « On va certainement retenter les heures d’attentes sur le site légal dans la journée ». Et dans le pire des cas**, la fan zone du Prado est gratuite.

*Le prénom a été changé

**Plus de six heures après le début de notre recherche sur la plateforme légale de revente, nous n’avons toujours pas pu obtenir de places.