A Nantes,

Ils seront tous aux fourneaux au moment du coup d’envoi de la demi-finale Allemagne-France. Au restaurant nantais « L’Atlantide 1874 », situé Butte Sainte-Anne, le chef étoilé Jean-Yves Guého et toute son équipe se préparent à une soirée particulière, jeudi soir. Contrairement aux idées reçues, la salle du resto sera pleine (50 couverts) pendant la rencontre. Il va falloir ruser pour se tenir au courant de l’évolution du score car évidemment, aucun écran de TV ne sera allumé. Entretien avec Jean-Yves Guého, le chef étoilé du restaurant.

Etes-vous un passionné de football ?

Je suis l’équipe de France parce que je l’aime, par chauvinisme, par patriotisme, mais c’est tout. En revanche, certains membres de mon personnel font des paris, le téléphone connecté en permanence dans la poche.

Jeudi soir, à l’heure du coup d’envoi, vous aurez du monde ?

Le restaurant sera plein. Ce sont des réservations qu’on a depuis une semaine. J’espère qu’on n’aura pas trop d’annulations surtout (rires). Je pense aussi au business, ça serait con que le resto soit vide.

Hors de question d’allumer une télé pour suivre le match ?

On a des télés dans le restaurant, mais les gens viennent là pour passer un bon moment au calme. Bon, il y a certains clients qui vont nous demander le score, c’est sûr…

Et vous en cuisine, dans le rush, vous allez suivre ça comment du coup ?

Sur les téléphones portables. Tiens, je suis sûr que le pâtissier, il aura la TV sur son téléphone caché dans le tiroir… Lors de la Coupe du monde 98, je me souviens qu’on avait mis une télé en cuisine, mais là, si on en met une, je pense qu’on ne va pas réussir à suivre le match et faire le service en même temps.

Vous êtes finalement assez tolérant avec votre équipe pour l’événement ?

Ce n’est pas souvent non plus. Ça peut être perturbant, mais ce n’est pas pour ça qu’on va cuisiner plus mal et qu’il y aura de plats trop cuits ou pas assez. Je suis prêt à mettre un écran de TV en cuisine ici à la place des casseroles, mais le second chef de cuisine n’est pas d’accord.

Votre rôle sera de recadrer si ça manque un peu de concentration ?

Oui, maintenir la pression, rappeler aux gars qu’on est en plein service tout en lâchant un peu de temps en temps. Allez, au moment de l’hymne, on mettra la Marseillaise dans la cuisine je pense. Ce qui est drôle, c’est qu’un de nos cuisiniers est Allemand. Il s’appelle Botho. On va pouvoir le brancher comme on le fait depuis le début de la compétition.

Et vos clients, ils s’en moquent vraiment du résultat ?

En fait, je pense que les clients sauront ce qu’il se passe car dès qu’il y aura un but, tout le monde va gueuler en cuisine. En 98, on a même des clients qui se levaient pour voir les buts à côté de nos cuisiniers. Ça crée un côté convivial et sympa. Jeudi, je pense que nos clients ne sortiront pas de chez nous sans connaître le résultat. Dommage pour ceux qui auront enregistré…

C’est dur de faire travailler tout le monde un soir de grand match ?

Certains voulaient être en repos jeudi, mais tout le monde travaille. Il interpelle un cuisinier : "Hein Mickaël, jeudi soir, tout le monde travaille ?" Deux cuisiniers lui répondent par la négative. Personne ne travaille, je suis donc tout seul. Non, ils sont tous là, je vous rassure (rires). Notre métier veut ça. Et puis, ils savent qu’ils seront tous à la maison devant la télé, dimanche, pour la finale, car on est fermé.

Est-ce vrai que certains clients se présentent les soirs de gros matchs dans des restaurants gastronomiques vides et demandent des ristournes ?

Je n’ai jamais eu ça. Il y a souvent plus de femmes que d’hommes… Après, ce n’est pas faux, les salles de restos sont vides les soirs de grands matchs. Ce matin [mardi], au Marché d’intérêt national (MIN) de Nantes, certains collègues restaurateurs m’ont dit qu’ils n’allaient pas avoir grand monde et donc pas beaucoup travailler. C’est marrant les grands matchs de foot, mais pour le business, ce n’est pas toujours très bon.