Et si le Tour de France 2015 mettait le bronzage cycliste à la mode?
CYCLISME•La malédiction du coureur prendrait fin...Antoine Maes
Elle s’appelle Julie Gautier, elle a 20 ans et attend de savoir si elle a décroché un BTS Assistant de Gestion PME-PMI. Mais si on l’a contactée, c’est surtout parce qu’elle a ouvert sur Facebook la page « Ce sont les cyclistes les plus sexy ». La description du groupe est sibylline : « Tu trouves que les cyclistes sont sexy dans un maillot et un cuissard moulant ? T’aimes leur bronzage trop trop stylé ? Si oui, t’as raison ! Rejoins-nous. » Le bronzage du cycliste, stylé ? « C’est le fait d’avoir un beau bronzage sur des belles cuisses et beaux mollets. Après, tout dépend si on aime les cyclistes ou non », explique notre admiratrice.
Désolé, mais c’est la canicule pour tout le monde.
La question qui tue, alors que le Tour de France s’élancera d’Utrecht (Pays-Bas) samedi : les plages françaises vont-elles enfin se remplir de touristes cultivant le fameux « bronzage cycliste » (à ne pas confondre avec le bronzage agricole, qui ne concerne que les bras). Après tout, pourquoi pas : les hipsters investissent des sommes folles dans des fixies, les livreurs n’ont jamais été aussi lookés, et certains se baladent même avec des casques à boudin des années 1960. En clair, le vélo c’est tendance à mort. « Jamais je n’aurais pensé que la petite casquette reviendrait à la mode, remarque Steve Chainel, professionnel dans l’équipe Cofidis. Peut-être que dans dix ans, on en sera fier de ce bronzage, qu’on cultivera cette marque, et qu’on arrivera dans les salles de sport en disant : "Moi je suis cycliste, et ça se voit." Les bodybuilders exposent leurs muscles, on pourra peut-être exposer nos marques de bronzage. »
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Désolé pour vous qui vous pointez déjà au taf avec vos marques de chemisette, mais même le peloton est encore divisé sur la politique à suivre sur ce sujet brûlant. Steve Chainel voit deux courants majeurs chez les cyclistes quand il s’agit de s’exposer au soleil.
1. Les pros du bronzage intégral : « Ils ne veulent aucune marque. Le plus extrême parmi ceux-là c’est Filippo Pozzato. Dès qu’il y a un rayon de soleil, il ouvre le maillot, parce que ça fait partie intégrante des points négatifs du job. Sur une course de trois semaines comme le Tour, malheureusement, on n’échappe pas à la marque de lunette, de cuissard, de la socquette et au bras. »
2. Les intégristes du bronzage cycliste : « Ceux sont les champions du monde du millimètre près. Ils mettent le cuissard pile où il y a la marque pour pas qu’il y n’ait de décalage. On a une marque aux poignets à cause des gants, une marque au biceps avec le maillot, une marque de cuissard à la cuisse. Et puis il y a les chaussettes, ça c’est effet immédiat quand on est en tong. Enfin, la grosse marque, c’est la lanière du casque à la place des pates et le nez rouge. »
« Cycliste… sous la douche #bronzage #TDF2014 pic.twitter.com/3ehc1CPzvt — Brindille (@Brindille_) 5 Juillet 2014 »
A 31 ans, Steve Chainel a eu le temps de se faire une religion sur le sujet. « Quand arrive l’été, il y a les premières photos qui sortent avec les marques. Ce n’est pas tabou dans le milieu on en parle beaucoup. Moi ça ne me travaille pas ». Un peu plus à la plage, où il sent encore « certains regards un peu moqueurs, un peu rigolos », signe que le grand public n’est sans doute pas encore prêt à franchir le pas.
En attendant, le cycliste, pro ou amateur, fait ce qu’il peut. Avec son équipement d’abord. Depuis quelques années, des maillots qui laissent passer les rayons du soleil ont fait leur apparition, « avec un tissu micro-aéré qui laisse passer les UV. On bronze à travers le maillot. Faut même faire gaffe, tu as vite fait d’avoir une grosse marque », prévient Steve Chainel. Un coureur du calibre de Christopher Froome s’y est d’ailleurs laissé prendre.
Et puis, enfin, il y a les conjoints. Ou les potentiels conjoints. Steve Chainel n’a jamais pris un stop quand une fille a constaté avec horreur son bronzage. Simplement parce qu’il a « rencontré (sa) femme assez tôt ». Ça n’empêche pas madame, cycliste elle-même, de considérer le bronzage cycliste comme un « tue-l’amour ». On parle quand même d’un type affûté comme c’est pas permis. Alors imaginez ce que ça donnerait sur un cyclo bedonnant. « Eux, ils se la pètent mais ça ne leur va pas du tout », prévient Julie Gautier. Sa fan-page a désormais cinq ans, et elle avoue ne pas avoir atteint son objectif : « Ça m’énervait de voir plein de pages sur les footballeurs, je voulais faire concurrence, mais c’est impossible. » Sans doute une question de crème solaire.