Eric Carrière: «On ne sait pas où en sont les cadres des Bleus, c'est flou»
INTERVIEW•L'ancien milieu de terrain des Bleus juge les milieux récupérateurs de l'équipe de France à 38, jours de l'Euro...Propos recueillis par Romain Scotto
A l'occasion de l'Euro, 20Minutes et Foot365 s'associent pour vous permettre de composer vous aussi votre liste des 23. Ne rêvons pas, Laurent Blanc ne prendra probablement pas votre avis en compte, mais ce n'est pas une raison de ne pas le donner. Avant la divulgation de la liste, Eric Carrière se penche sur le cas des milieux défensifs des Bleus. International à 10 reprises (pour 5 buts), l’ancien Lyonnais est plutôt inquiet quand il juge l’état de forme des joueurs appelés régulièrement par Laurent Blanc…
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Avec des joueurs en méforme comme Yann M’Vila, Alou Diarra, le secteur de la récupération n’est-il pas le plus ouvert de la liste de Laurent Blanc?
Certainement parce que de nombreux joueurs ne sont pas à leur meilleur niveau. Cela pose problème, c’est évident. M’Vila fait une deuxième partie de saison moyenne. Il n’y a pas de joueur qui se dégage par ses performances en club. En équipe nationale, c’est une fois de temps en temps. Marseille a des difficultés et Diarra avec. Rennes c’est un peu pareil. Il faudrait au moins deux joueurs qui se dégagent et ce n’est pas le cas. Marvin Martin est revenu à un très bon niveau. Il a un profil comme Cabaye pour faire jouer les autres. Mais il y a deux postes à prendre pour des joueurs plus costauds. Dans des registres différents. C’est flou de manière générale. On ne sait pas où en sont les cadres.
S’il est remis sur pied, Abou Diaby peut-il bénéficier d’un blanc-seing malgré son faible nombre de matchs cette saison?
S’il est remis, oui. Il aurait été un indiscutable. Mais malheureusement il est souvent blessé. Dans le choix ce n’est pas évident de se dire qu’on le prend alors qu’il sera peut-être blessé. C’est un choix délicat. Si Laurent blanc l’aime bien ce n’est pas pour rien. Il a la capacité d’être bon dans les duels mais aussi d’éliminer les lignes balle au pied. C’est important. Un mec comme Alou Diarra est plus défensif et a moins ce côté créatif. Peut-être que Laurent Blanc prendra le risque.
Peut-on avoir une surprise dans ce secteur de jeu? Un Balmont, Mavuba, Moussa Sissoko?
Je ne pense pas. Avec Domenech peut-être, mais avec Laurent Blanc, non. J’aime beaucoup Capoue par exemple, c’est un joueur d’avenir qui fait une très belle saison. Mais ce ‘n’est pas évident de prendre des joueurs qu’i n’ont pas de sélection en équipe de France sur une compétition majeure, je ne pense pas que ce soit la meilleure solution. Si j’étais sélectionneur, je ne suis pas sûr de le prendre maintenant, c‘est un peu tard. Il n’a pas l’expérience.
Laurent Blanc peut aussi reculer un joueur comme Nasri ou Cabaye dans un rôle de récupérateur. Est-ce une option que vous appréciez?
Un Nasri, peut-être moins que Cabaye. Mais ça dépend de l’adversaire. Face à une équipe contre laquelle on sait qu’on aura le ballon, ce sera plus facile. Si on doit défendre, ce sera plus compliqué. Il faut pouvoir s’adapter à l’adversaire.
Dans le groupe de la France (Angleterre, Suède, Ukraine), il y a possibilité d’imposer son jeu…
Oui, bien sûr. Sur un groupe de 23, avec quatre défensifs, je prendrais deux joueurs forts dans les duels et deux capables d’animer le jeu. Ça dépend de l’équilibre que Laurent Blanc va choisir. Il y a des joueurs comme Malouda qui peuvent aussi redescendre d’un cran. Tout dépend ce qu’on appelle «récupérateur». Un joueur devant la défense ou deux. Il y a beaucoup d’incertitudes sur la façon de jouer de l’équipe de France.
Yann M’Vila pourrait aussi quitter Rennes l’été prochain. Faut-il que les transferts soient réglés avant l’Euro?
Cette situation n’est pas évidente à vivre. C’est un enjeu personnel, savoir où on va vivre, évoluer. Si M’Vila veut partir, ce n’est pas l’idéal, ça fait cogiter. Certains peuvent aussi se dire: «Il faut que je brille à l’Euro pour partir». L’idéal est de disputer une compétition en se disant qu’on va la jouer et pas en pensant à ce qu’il va se passer après. Chez les joueurs il y a beaucoup plus de calcul qu’à mon époque. Moi je n’ai pas connu ça. Il faut profiter de ce qu’on peut vivre et jouer des matchs de haut niveau. C’est ce qui a fait défaut à l’équipe de France depuis quelques compétitions. Pour le grand public, on a l’impression que les joueurs sont là mais ne vivent pas la compétition à fond. Ils vivent l’aspect médiatique, les retombées. J’aurais envie de leur dire: «Profitez de ça, jouez des matchs de haut niveau, éclatez vous. Le reste suivra si t’es bon.»