Bixente Lizarazu: «L'OM n'est pas capable de faire un match exceptionnel»
INTERVIEW•Ancien joueur du Bayern passé par l'OM, l'ex-international mesure l'écart de niveau entre les deux clubs...Propos recueillis par Romain Scotto, à Munich
Entre ses huit années passées à Munich et les quelques mois sur la Canebière, Bixente Lizarazu ne souhaite pas comparer deux expériences radicalement différentes. Présent dans les couloirs de l’Allianz Arena à la veille du quart de finale retour de Ligue des champions entre les deux clubs, le consultant TF1 évoque pour 20 Minutes le défi démesuré qui attend les Olympiens après leur défaite de l’aller (0-2).
Le Bayern que vous retrouvez aujourd’hui en tant que consultant TF1 a-t-il beaucoup changé?
Il n’a pas du tout changé. Il y a les mêmes dirigeants. Uli Hoeness est toujours là. Il a passé sa vie dans ce club. Il était manager pendant près de trente ans. Aujourd’hui, il est président du club. Il y a toujours Karl-Heinz Rummenigge. Franz Beckenbauer n’est pas aux affaires mais il chapeaute un peu tout ça. C’est toujours le même centre d’entraînement. Pour le stade il y a une évolution puisqu’il y avait le stade Olympique à l’époque. C’est plus le stade de ma génération. C’est là que j’ai gagné tous mes titres. Mais sinon, ça n’a pas changé. Oui, il y a la culture club, la culture familiale, la culture de la gagne. Pour moi, c’est le club le mieux géré en Europe. C’est un modèle pour Michel Platini (le président de l’UEFA). Mais je ne reviens pas si souvent. Je suis revenu pour les 60 ans d’Uli Hoeness, et les dix ans de notre victoire en Ligue des champions (2001). On avait fait une grosse fête à l’Allianz Arena. Ils savent faire les choses en grand ici.
Cette «culture club» justement, n’est ce pas ce qui manque à un club comme l’OM aujourd’hui?
Il y a beaucoup de choses dont ils peuvent s’inspirer au Bayern. C’est un modèle. Mais il n’y en a pas qu’un. Le Barça, par exemple a un modèle basé sur la culture du jeu en triangle. Chaque club a sa particularité. Ici, les anciens sont à des postes très importants. Ce sont les décideurs et ils gèrent parfaitement puisque cela fait dix-neuf années consécutives qu’ils font des bénéfices et en même temps, ils arrivent à gagner des titres. Qui peut prétendre cela dans le football international?
Avec une finale ici à l’Allianz Arena, le Bayern gagnera-t-il la Ligue des champions cette année?
C’est ce qu’on dit, sauf qu’il y a le Real et le Barça. Sauf catastrophe, s’ils ne font pas vraiment n’importe quoi, ils devraient être en demi-finale. Mais après, les deux clubs espagnols sont au-dessus. Sur deux matchs, la magie du football peut niveler les écarts, même si le Real et le Barça sont plus armés sur toutes les lignes. Le Bayern est armé offensivement. Mais défensivement ce n’est pas suffisant quand on compare au top du top européen.
Sur quoi doit miser Marseille pour réaliser l’exploit?
C’est très compliqué. Comment doit s’y prendre Didier Deschamps? Attaquer à tout va pour rattraper ses deux buts. Sauf qu’il va laisser beaucoup d’espaces aux flèches de devant. Robben, Ribéry, Müller, Gomez sont très adroits. Est-ce qu’il doit être très défensif? Ca me paraît compliqué parce qu’il y a deux buts à rattraper. Il faut trouver le juste milieu des deux. En fait, il faudrait que l’OM fasse un match exceptionnel. Sont-ils en mesure de le faire dans le contexte actuel, je ne le pense pas. Si l’OM s’est qualifié contre l’Inter, c’est parce qu’ils n’ont pas encaissé de but. Là, en encaissant ces deux buts… On ne peut pas dire que c’est mission impossible pour le retour, mais il y a un peu de ça quand même.
Vous qui connaissez bien Didier Deschamps, lui avez-vous parlé avant ce match?
Oui, on se parle. Il sait. On voit le Bayern tous les week-ends à la télé. Il a déjà assez de soucis avec son équipe. Il sait très bien quelles sont les armes de ce Bayern. C’est pour cela qu’il ne peut pas jouer que la carte de l’offensive. Je lui souhaite surtout la qualification pour la Ligue Europa à travers la Coupe de la Ligue.
Vous avez évolué dans les deux clubs, et même si vous êtes Français, votre cœur doit balancer pour le Bayern…
Oui, enfin, j’ai passé huit ans et demi au Bayern et j’ai fait un stage de cinq mois à l’OM. On ne peut pas comparer les choses. Il n’y a rien à comparer, mais je ne serai pas supporter dans mes commentaires. Je fais abstraction de tout ça. Le jeu, c’est de décrypter un match. Je fais la part des choses entre mon métier et ce que j’ai vécu en tant que joueur.